Accident mortel de TGV en Alsace : "on veut comprendre"

Les victimes de l’accident du TGV en essai, le 14 novembre en Alsace, réclament la lumière sur le drame qui a fait 11 morts et 42 blessés.

TEMOIGNAGE EXCLUSIF
C’est l’accident oublié. Le 14 novembre dernier, au lendemain des attentats de Paris, un TGV en essai déraille en Alsace, faisant 11 morts et 42 blessés. Il s’agit de la pire catastrophe ferroviaire qu’a connue le TGV. Pourtant, les survivants et les proches des victimes s’estiment lésés.

"Est-ce que ma fille n’a pas remplacé un sac de sable ?" Sur Europe 1, la mère de Fanny, 25 ans, qui accompagnait dans la rame son petit ami, un technicien rescapé, a décidé de s’exprimer pour la première fois et de lancer un appel. "Je crois que ma fille a fait l’objet d’une expérimentation", témoigne Christine Dujardin. "Les premiers temps, les rames d’essai utilisaient des sacs de sable pour simuler le poids des voyageurs. Je me demande si cette fois-ci, on n’a pas utilisé des invités pour simuler le poids des voyageurs. Est-ce que ma fille n’a pas remplacé un sac de sable ?"

Les onze tués faisaient partie d’une équipe de 49 techniciens et cheminots à bord de la rame, qui effectuait un essai sur la ligne à grande vitesse destinée à relier Paris à Strasbourg en 1h48 à partir d’avril 2016. "Elle n’aurait pas voulu entrer dans ce train si elle avait connu les risques", assure la mère de famille. "Elle a fait une entière confiance, elle pensait presque faire un voyage inaugural. Nous, notre famille, avons passé des moments assez cruels. Tout le corps de Fanny n’a pas été trouvé le même jour. On nous a rappelés plusieurs jours après."

"C’est assez terrible à vivre". "C’est assez terrible à vivre", poursuit-elle. "On veut comprendre. On attend avec impatience les résultats de l’enquête. Et en attendant, avec le peu qu’on a, nous grandissons. On aimerait toucher le ciel, pour Fanny, pour Marc et Laurence, pour Jérémy, Fabrice, pour les deux Alain, pour Daniel, toutes les personnes qui ne sont plus là".

"On se sent exclus, seuls, à l’écart". Ce sentiment est largement partagé l’ensemble des familles. "On se sent exclus, seuls, à l’écart", confie un jeune homme. "On ne parle que de Brétigny, alors que le déraillement du TGV a fait plus de morts. Comme si la mort de ma sœur n’était pas prise en compte."

La vitesse mise en cause. L’enquête judiciaire est en cours. A ce jour, deux rapports intermédiaires - un de la SNCF, un autre du Bureau d’Enquêtes sur les Accidents de Transport Terrestre (BEA-TT) - ont été publiés, pour une même conclusion : la vitesse serait la cause unique du déraillement. A l’entrée du virage de l’accident, le train a été enregistré à 265 km/h au lieu de 176 km/h normalement.

"Je penche plus pour une défaillance du train que pour l’erreur humaine", confie la femme d’un cheminot mort dans l’accident. Mais les parents d’un autre salarié décédé voient les choses autrement. "Le conducteur a sans doute été déconcentré par les gens qui étaient à côté de lui", disent-ils. D’où cette question centrale : que faisaient des invités non-cheminots dans ce TGV ? "Quand il rentrait de certains essais, notre fils nous disait ’c’est toujours plein de monde, c’est dangereux.’ Il trouvait ça irresponsable. Il ne nous a jamais proposé, lui, de nous accompagner."

"A cause de Brétigny, on est plus que sceptique". Sur ce sujet, entre autres, les familles attendent des réponses. "Mais comment faire confiance à la SNCF ?", s’interroge un proche de victime. "A cause de Brétigny, forcément, on est plus que sceptique", ajoute-t-il.

Crédit photos : Source : europe1.fr Auteur : Arthur Helmbacher et T.M Date : 15.02.2016

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