Bruxelles veut mieux soutenir les victimes du terrorisme

L’ex-ministre de l’intérieur belge, Joëlle Milquet, préconise la création de fonds de garantie nationaux, sur le modèle de celui mis en place en France.

Joëlle Milquet, ancienne ministre belge de l’intérieur et actuellement conseillère spéciale du président de la Commission de Bruxelles a remis à Jean-Claude Juncker un rapport en vue d’améliorer le statut des victimes d’attentats terroristes et de violences intentionnelles en Europe. Ce document, présenté lundi 11 mars – Journée européenne d’hommage aux victimes du terrorisme –, a été rédigé « à titre personnel » et ne reflète pas nécessairement la position de la Commission et de son président, indique un communiqué.

Il vise, en tout cas, à améliorer et simplifier les procédures d’indemnisation, à mieux soutenir les victimes et à alléger les processus bureaucratiques. Surtout quand une personne a été victime d’un acte terroriste dans un autre pays que le sien : dans ce cas, indique Mme Milquet, une victime doit pouvoir rapidement se tourner vers son Etat, et pas celui où les faits se sont déroulés.

La conseillère spéciale a dressé une liste d’une quarantaine de recommandations, dont certaines peuvent être rapidement traduites en actes, selon elle. Elle plaide notamment pour la création d’un véritable mécanisme de « réparation effective », et plus seulement de compensation ou d’assistance, avec la reconnaissance d’un réel droit à l’indemnisation.

Nécessité de centres d’accueil

Celui-ci existe, en théorie, au niveau européen mais de nombreuses victimes ne peuvent en bénéficier : ce n’est qu’à l’issue d’un long parcours judiciaire que la plupart des Etats interviennent, quand la justice a constaté que l’auteur de l’acte était soit insolvable, soit mort. C’est le cas dans 90 % des dossiers, précisé Mme Milquet, qui loue au passage la pratique française.

Elle prône, en effet, la mise en place de fonds nationaux de garantie calqués sur celui qui existe en France et, également, d’un fonds européen qui serait accessible aux Etats membres pour leur permettre de procéder rapidement aux indemnisations. Le rapport évoque aussi la nécessité de centres d’accueil, au niveau national et européen, pour les victimes. Mme Milquet adresse, au passage, des reproches aux autorités de son propre pays où, après les attentats du 22 mars 2016, des victimes ont été traitées, dit-elle, de manière très inadéquate.

Des processus d’indemnisation ne sont toujours pas clôturés et une victime, un informaticien de l’aéroport de Zaventem qui affirme avoir subi un grave traumatisme psychologique vient de terminer une longue grève de la faim sur le lieu même de l’attentat. Le premier ministre Charles Michel lui a assuré que les textes légaux en vue de la création d’un statut de solidarité nationale pour les victimes allaient bientôt être adoptés. Le texte a, en réalité, été voté en 2017 mais n’est toujours pas appliqué.

Dans son rapport, Mme Milquet propose encore que, pour le calcul des dommages, on renonce au principe de montants forfaitaires afin de prendre en compte la situation de chaque victime, sans fixation d’un plafond d’indemnisation et avec d’autres préoccupations que l’argent : l’assistance psychologique et l’accompagnement des victimes tout au long de leur convalescence devraient être des priorités.

Le chemin sera encore long

« Ce rapport montre clairement la nécessité de poursuivre notre travail en faveur des droits des victimes », affirme M. Juncker tandis que la commissaire à la justice, Vera Jourova, dit suivre de près les progrès accomplis dans les différents Etats membres. Elle indique que les recommandations de Mme Milquet seront désormais examinées afin de déterminer « quelles mesures pratiques peuvent être définies aux niveaux européen et national en vue de faciliter les indemnisations ». Avec, entre autres, une analyse des meilleures pratiques dans les pays membres.

La formulation, plutôt vague, laisse entendre que le chemin sera encore long, même si Mme Milquet estime bénéficier du soutien du président Juncker, lequel voudrait qu’une série de mesures soit adoptée avant la fin du mandat de la Commission, qu’il dirigera jusqu’à l’automne.

Une directive a déjà été adoptée en novembre 2015 et renforcée en mars 2017. Elle concerne les droits des victimes et fixe une série de critères et d’obligations auxquels sont censées se soumettre les capitales. Treize d’entre elles n’ont toutefois pas traduit ses textes dans la législation nationale et font désormais l’objet d’une procédure d’infraction.

La Commission Juncker ambitionne aussi de créer un Centre d’expertise pour les victimes, qui devrait être opérationnel dans le courant de l’année. Mme Milquet préfère le terme de « Centre de résilience ».

Source : Le Monde
Auteur : Jean-Pierre Stroobants
Date : 11/03/2019

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