Ce médecin raconte la terrible nuit de l’attentat du 14-Juillet aux urgences de Lenval

A l’occasion d’un exercice attentat mené samedi à Nice, Gilles Brezac, médecin anesthésiste qui a coordonné les urgences de l’hôpital Lenval le soir de l’attentat, revient sur cette tragédie.

LE DÉBUT DE LA SOIRÉE

"Ce soir-là, les urgences ont une activité classique. C’est même relativement calme. On a une dizaine d’enfants. Et, ce qui n’est pas anodin, au bloc, on intervient sur une péritonite. On a l’équipe type : deux pédiatres jusqu’à minuit, un réanimateur, un anesthésiste, cinq internes. Je suis au bloc avec un chirurgien viscéral, un interne et deux infirmières qui ont été rappelées."

L’ATTENTAT

"Le Samu appelle en disant : “Il y a un accident de la voie publique, il y a neuf victimes avec des arrêts cardiaques sur des enfants”. Les réseaux sociaux aidant, on se rend compte que c’est plus grave. Mais on n’a pas d’information officielle. Le réseau téléphonique est saturé. A 22h50, on n’a toujours pas la notion d’attentat et on est toujours au bloc. Les soignants attendent des blessés sans savoir combien ni dans quel état ils sont."

LES PREMIERS BLESSÉS ARRIVENT

"Dans la première demi-heure après l’attentat arrivent six blessés légers, enfants et adultes. Très choqués. Ils disent qu’il y a des morts partout.
Avant 23 heures, le plan blanc est activé. On appelle de l’aide de l’extérieur, on organise l’hôpital de l’intérieur pour faire face.
A 23 heures, la salle d’urgences est prête. La première victime en urgence absolue arrive à 23h05. En un quart d’heure, on a six urgences absolues. On est trois médecins.
Par hasard, une équipe du Samu d’Antibes, qui était là, a gonflé nos effectifs. Pendant les vingt premières minutes, on a pu gérer. Après les médecins de l’hôpital arrivent, grâce aux réseaux sociaux notamment. Et tout se met en marche.
"

LES VICTIMES SONT EN URGENCE ABSOLUE

"On s’était préparés à un attentat par armes de guerre, avec des blessures de guerre. Là, on a une attaque au camion bélier et des lésions qui ressemblent à celles d’un tremblement de terre, des traumatismes fermés plus durs à prendre en charge que des traumatismes ouverts : des traumatismes faciaux, crâniens, des fractures du bassin etc."

LA NUIT N’EN FINIT PAS

"La plupart des victimes arrivent dans des voitures, il n’y a pas eu de médicalisation. Ce sont des urgences extrêmes. Il faut trier ces patients pour pouvoir le gérer. Aller très vite. La dernière urgence absolue arrive vers minuit. Au total, on a reçu 47 patients, 35 enfants et 12 adultes, dont onze en urgence absolue. Cent vingt personnes étaient mobilisées. Les conditions sont extrêmement difficiles."

QUE RETENIR ET AMÉLIORER ?

"La collecte des informations est très compliquée, nous avons eu parfois l’impression de progresser à l’aveugle.
L’identification des victimes est difficile, surtout quand elles sont dans le coma. Nos réseaux informatiques ne sont pas toujours optimaux.
Il faut améliorer la communication qui permet une prise en charge très rapide, avoir des logiciels réactifs qui puissent travailler en temps réel, imaginer, peut-être, dans un premier temps, de travailler sur un dossier papier.
Il faut surtout retenir la solidarité et la belle synergie des équipes ce soir-là.
"

Source : nicematin.com
Auteurs : L.B. et S.G.
Date : 9 avril 2017

Crédit photos : Source : nicematin.com Auteurs : L.B. et S.G. Date : 9 avril 2017

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