Concordia : "les rescapés se sentent abandonnés"

Dix jours après le naufrage du Costa Concordia, les rescapés français commencent à réfléchir aux possibilités d’action. Me Bertrand Courtois, avocat spécialiste du droit maritime, qui travaille très étroitement avec le comité de victimes, répond aux questions de LEXPRESS.fr 

Dix jours après le naufrage du Costa Concordia, les rescapés français commencent à s’organiser. Un comité de victimes fondé par Anne Decré, qui était à bord du paquebot au moment du drame, vient de se former. Me Bertrand Courtois, avocat spécialiste du droit maritime, qui travaille très étroitement avec l’association, répond aux questions de LEXPRESS.fr 

Quelles actions prévoyez-vous d’entreprendre ?

Il ne faut surtout pas se précipiter. Dix jours après le drame et alors que l’enquête n’en est qu’à son début, il est impossible de dire formellement quelles actions nous allons entreprendre. Nous devons d’abord étudier le dossier, les différentes responsabilités et les possibilités d’actions qui s’offrent à nous. Mais nous devons prioritairement fédérer les victimes du Costa Concordia et réfléchir ensemble aux actions que nous souhaitons entreprendre. Le comité de victimes créé par Anne Decré espère rassembler entre 50 et 70% des 460 rescapés français. Plus le comité sera soudé et représentatif, plus les actions entreprises auront des chances d’aboutir. 

Quelles sont les possibilités juridiques qui s’offrent aux victimes ?

La première possibilité est d’entreprendre une action en Italie. Le naufrage a eu lieu là-bas, l’armateur est italien, le bateau a été construit à Gênes... Une enquête pénale sur la responsabilité a été ouverte par le parquet de Grosseto. Nous pouvons également nous tourner vers le système français. Certaines victimes envisagent de porter plainte en France. Mais dans l’idéal, le comité souhaite que le parquet français s’autosaisisse afin qu’une procédure pénale soit ouverte. Cela nous permettrait principalement d’avoir accès aux informations de l’enquête italienne. 

Quelles sont les principales demandes des victimes ?

Nous souhaitons une complète et juste indemnisation des victimes. Outre le remboursement des frais du voyage - ce que la compagnie s’est d’ores et déjà. engagée à faire - il faut que la perte des bagages et les effets personnels perdus soient remboursés. Nous réclamons également que tous les frais de retour, les achats immédiats comme les lunettes, les portables ou les appareils dentaires et les frais annexes tels que le serrurier soient pris en charge. Mais le plus important sera la réparation du préjudice d’angoisse, constitué par la peur de la mort. 

A combien peuvent s’élever les réparations ?

C’est trop tôt pour le dire. La jurisprudence est très variée sur le sujet. Dans l’affaire du Queen Mary 2, le préjudice a, par exemple, été évalué à 50 000 euros pour certaines personnes. Mais en attendant les réparations, nous allons faire une demande de provision de 5000 à 7000 euros par personne auprès de Costa afin de prendre en charge les frais immédiats. 

Dans quel état d’esprit sont aujourd’hui les victimes ?

Très angoissées. Au début, la priorité était d’être sauvé, de rentrer chez soi, de retrouver les siens. Mais maintenant que cette période de "survie" est passée, ils accusent le contrecoup. Les nerfs lâchent. Beaucoup commencent à réaliser qu’ils sont passés près de la mort, certains ont même vu des gens mourir. Les rescapés se sentent d’autant plus abandonnés qu’il n’y a aucun suivi psychologique de la part de la compagnie. 

Lexpress.fr - Carole Politi - 24 janvier 2012


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