Un témoin de l’accident du Concorde remet en cause la thèse officielle

Un commandant de bord à la retraite a affirmé mercredi au procès en appel de l’accident du Concorde d’Air France en 2000 avoir vu le supersonique en feu plusieurs centaines de mètres avant l’emplacement de la lamelle censée avoir déclenché l’accident.

Jean-Claude Samoyault est le premier d’une série de témoins cités par le principal prévenu, la compagnie américaine Continental Airlines, qui doivent défiler cette semaine devant la cour d’appel de Versailles.

Leurs témoignages avaient été écartés pendant l’instruction par les experts judiciaires, qui les avaient jugés en contradiction avec les éléments matériels dont ils disposaient (traces au sol, etc).

En première instance, en 2010, le tribunal correctionnel de Pontoise (Val-d’Oise) avait jugé qu’un DC10 de Continental Airlines avait déclenché l’accident qui a fait 113 morts le 25 juillet 2000 à Gonesse (Val-d’Oise), en perdant une lamelle métallique sur la piste de décollage du Concorde.

Le tribunal avait retenu qu’après avoir roulé sur cette pièce un pneu du Concorde avait éclaté, perforant le réservoir et provoquant l’inflammation du kérosène.

M. Samoyault, ancien pilote d’Air France, a expliqué que le jour de l’accident, il était aux commandes d’un avion en attente de décollage de Roissy pour Boston. Il se trouvait dans une position pratiquement perpendiculaire à la piste sur laquelle s’élançait le Concorde, piloté par son collègue et ami Christian Marty. "C’était mon dernier vol avant la retraite", a-t-il relaté, très ému.

"A 300 ou 400 mètres de ma position, j’ai vu une flamme issue du réacteur intérieur gauche" du Concorde, a-t-il dit. Cette flamme s’est agrandie et dégageait une importante fumée noire, et "peu après", "pratiquement instantanément", la tour de contrôle annonçait au Concorde : "Vous êtes en feu".

L’ancien pilote a situé l’endroit du départ de feu à hauteur d’une bretelle dite "Sierra 6", identifiable par une marque de peinture blanche au sol.

Un plan de la piste montre que cet emplacement se situe plusieurs centaines de mètres avant l’endroit où est tombée la lamelle.

Sur le banc des parties civiles, l’avocat d’Air France, Me Fernand Garnault, a cherché à pointer des incohérences dans ce témoignage. "Votre bonne foi n’est pas en cause, mais peut-être vos souvenirs ne correspondent-ils pas à la réalité des choses", a-t-il suggéré au témoin.

"Pendant 30 ans à Air France, est-ce qu’un jour votre employeur a mis en cause votre parole ?", a protesté l’avocat de M. Samoyault, Me Olivier Metzner. "Jamais", a répondu l’ex-pilote, qui a dit être parti en retraite en bons termes avec la compagnie française.

Le procès, qui a débuté le 8 mars, a repris mercredi après une interruption d’une dizaine de jours. Il doit durer au moins jusqu’à la fin mai et pourrait déborder sur juin.

Le Nouvel Observateur - 2 mai 2012


Nous soutenir

C’est grâce à votre soutien que nous pouvons vous accompagner dans l’ensemble de vos démarches, faire évoluer la prise en charge des victimes par une mobilisation collective, et poursuivre nos actions de défense des droits des victimes de catastrophes et d’attentats.

Soutenir la FENVAC

Ils financent notre action au service des victimes