Explosion d’AZF : une étrange hypothèse à un mois du jugement

L’arrêt de la cour d’appel de Toulouse sur la catastrophe d’AZF sera rendu le 24 septembre. A un mois de cette décision, le site préventique.org propose une nouvelle hypothèse, celle de deux explosions, avec pour origine, l’usine de la SNPE, qui jouxtait AZF. Étonnant.

Décidément, jusqu’au bout, la catastrophe d’AZF va susciter des rumeurs et des interrogations. La thèse du ministère public - celle de la mise en contact de produits incompatibles à la suite de négligence dans l’usine - ne satisfait pas tous ceux, qui depuis des années, se creusent la tête pour trouver de nouvelles hypothèses à cette catastrophe qui a causé la mort de 31 personnes le 21 septembre 2001.

Dernière hypothèse en date : celle du groupe « Préventique ». Une fois encore, c’est du côté de la SNPE que les regards se tournent, en désignant la voisine d’AZF comme responsable de la catastrophe. Selon le site, relayé par les agences de presse, c’est une fuite de carburant de fusées provenant de la SNPE (qui produisait le carburant d’Ariane) qui serait à l’origine de l’explosion du hangar 221. L’occasion de relayer la vieille affirmation selon laquelle il y aurait eu deux explosions : la première dans la SNPE qui, provoquant des vibrations, aurait alors déclenché l’explosion de... deux bombes dormantes sous le hangar 221 de l’usine AZF.

RIEN EN HUIT MOIS DE PROCÈS
Pourtant, la catastrophe d’AZF a été disséquée en long, en large et en travers à l’occasion de deux procès qui ont duré chacun quatre mois. Et toutes les hypothèses ont déjà été moulinées, analysées et disséquées. à aucun moment dans les deux procès, il n’a été prouvé une première explosion à la SNPE : tous les dégâts qui y ont été observés sont dus à l’explosion du hangar 221, les destructions « signent » un souffle venant de l’usine AZF, et rien ne signale une explosion propre à la SNPE.

Ensuite, on imagine très mal comment les vibrations pourraient se communiquer à des « bombes dormantes » qui auraient sommeillé ainsi sous le hangar 221. D’autant que pendant les deux procès, les experts et historiens ont bien démontré que pas une bombe, ni allemande, ni anglaise ou américaine n’est tombée dans ce secteur. Et qu’en tout état de cause, si ce type de bombe avait explosé, on en aurait retrouvé les traces caractéristiques dans le « cratère » issu de l’explosion.

Depuis le début de cette affaire, le groupe Total, mais aussi bon nombre de « contributeurs », n’ont pas voulu croire à l’hypothèse de l’erreur humaine, et ont exploré toutes les pistes possibles et imaginables, notamment, les pistes terroristes. Tout récemment encore, certains se demandaient si Mohammed Merah lui-même n’aurait pas été impliqué dans cette explosion, puisqu’il fréquentait des gens qui fréquentaient des gens qui fréquentaient des gens qui travaillaient à l’usine AZF…

Le jugement de première instance est resté ambigu : il est très critique sur la manière dont Grande Paroisse avait organisé la gestion des déchets, et note un certain nombre de dysfonctionnements qui auraient pu rendre possible la mise en contact des produits incompatibles et donc, l’explosion. Mais le tribunal n’a pas pu, tout au long du procès de première instance, trouver de lien direct entre les fautes relevées dans le fonctionnement de l’usine, et le dommage, l’explosion. Pas de preuve formelle, donc, pas de condamnation possible.

Si les parties civiles espèrent toujours que les magistrats en appel établiront ce lien et condamneront Grande Paroisse, la défense de Total, elle, voit que la brèche est toujours ouverte et que le doute peut persister. Depuis la catastrophe, elle a présenté toutes les hypothèses alternatives, persuadée que « le sandwich chimique de l’accusation ne marche pas » selon l’expression de son avocat Me Daniel Soulez-Larièvre.

A un mois du délibéré, voilà une étude destinée encore à semer le doute. Et quelque soit l’arrêt rendu le mois prochains, fantasmes et hypothèses auront toujours la peau dure.


TOUT EST PARTI DE CETTE REVUE

Le groupe Préventique se présente comme une entreprise spécialisée dans le management global du risque. C’est aussi une maison d’édition spécialisée sur le risque, et enfin une entreprise de conseil sur le management du risque. Son dernier numéro (ci-contre) est donc consacré à une contre-expertise « par une équipe indépendante de scientifique et d’industriels ». Elle propose un scénario qui peut « bouleverser le devenir de cette affaire » peut-on lire sur le site de ce groupe. On peut lire aussi : « Approché récemment par les sociétés du groupe Total exploitant le complexe de Lacq, le groupe Préventique va désormais s’engager dans le projet de développement d’une importante activité de formation sur ce site. »


Dominique Delpiroux - La dépêche.fr - 29 août 2012


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