Français enlevés au Cameroun : ce que l’on sait de Boko Haram et Ansaru au Nigeria

Sept touristes français ont été enlevés mardi dans le nord du Cameroun, près de la frontière du Nigeria où ils ont été emmenés par leurs ravisseurs. Cet enlèvement intervient trois jours après celui de sept employés étrangers d’une société de construction libanaise dans le nord du Nigeria, revendiqué par le groupe islamiste nigérian Ansaru.

Interrogé par des journalistes en marge d’un déplacement à Athènes, François Hollande a évoqué la piste Boko Haram : "Je vois surtout l’implantation d’un groupe terroriste, Boko Haram en l’occurrence, dans cette partie-là du Cameroun et c’est suffisamment inquiétant pour nous mobiliser". Que sait-on de Boko Haram et de Ansaru ?

Boko Haram : plusieurs factions aux objectifs variés
La secte Boko Haram - "les valeurs occidentales sont sacrilèges", en langue haoussa - est née en 2002 à Maiduguri, dans le nord du Nigeria. Elle prône l’instauration d’un émirat islamique régi par le strict respect de la charia. La loi coranique a pourtant été promulguée en 2000 dans 12 Etats du nord du Nigeria, majoritairement musulmans. Mais les partisans de cette secte reprochent aux exécutifs locaux leur tiédeur. Ce groupuscule islamiste est devenu violent en 2009, après l’arrestation puis l’exécution de son leader, Mohammed Yusuf. Ses partisans ont alors plongé dans la clandestinité.

Les violences liées à Boko Haram et leur répression sanglante par les forces de l’ordre nigérianes ont fait 3000 morts depuis 2009. Les principales victimes de Boko Haram sont des musulmans, mais le groupe vise aussi régulièrement des chrétiens, en menant des attaques contre des églises.

On considère que Boko Haram est composée de différentes factions qui poursuivent des objectifs variés. Parmi les individus s’en réclamant, on trouverait des éléments criminels, qui agissent sous le couvert du groupe. De nombreux analystes soulignent que ce mouvement est né et s’est développé au Nigeria en raison de l’ampleur de la corruption et de la pauvreté dans le nord du pays.

L’internationale djihadiste

En juin 2012, les Etats-Unis ont inscrit les noms de trois extrémistes islamistes nigérians sur leur liste noire du terrorisme mondial, mais pas Boko Haram en tant que tel, au motif que ses objectifs étaient surtout internes au Nigeria.

Pourtant, dès 2005, la secte salafiste aurait envoyé certains combattants s’entraîner dans le nord du Mali, dans les sanctuaires d’Aqmi, Al-Qaïda au Maghreb islamique. De même, les chebab somaliens ont hébergé et formé des disciples du gourou Abubakar Shekau. Boko Haram disposerait aussi de bases arrières au Niger comme au Tchad. En novembre, Abubakar Shekau a exprimé, dans une vidéo postée sur Internet, sa solidarité avec les combattants d’Al-Qaïda dans le monde et dans "l’Etat islamique au Mali", selon le centre de surveillance des sites islamistes SITE.

Cette extension de la secte au-delà de ses frontières a été soulignée par Washington au mois de janvier : le général Carter Ham, commandant en chef de la force américaine en Afrique (Africom), expliquait alors qu’Aqmi et Boko Haram cherchent à "coordonner leurs forces".

Jusqu’à présent, Boko Haram en tant que tel n’avait pas revendiqué d’enlèvement. En revanche, un autre groupe issu de cette mouvance s’est illustré dans des kidnappings, Ansaru.

Ansaru, dernier né de la mouvance djihadiste en Afrique

L’enlèvement au Nigeria d’un ingénieur français, Francis Collomp, a été revendiqué par le groupe islamiste nigérian Ansaru au mois de décembre.

Ce groupuscule a aussi revendiqué lundi l’enlèvement, la veille de sept employés étrangers de la société de construction libanaise Setraco, la plus importante prise d’otages jamais réalisée dans le nord du Nigeria.

Ce groupe relativement nouveau est en expansion depuis sa revendication de l’enlèvement de Francis Collomp. Ansaru semble être une faction dissidente de Boko Haram ayant des liens avec Aqmi.

Selon le site américain de la Jamestown foundation, le Jama’atu Ansarul Musilimina fi Biladin Sudan ("partisans de l’islam en Afrique noire") est apparu en janvier 2012, avec la publication d’un communiqué annonçant sa formation à Kano, dans le nord du Nigeria.

Le groupe dissident serait dirigé par Abu Usamata Al’Ansari, qui s’était opposé aux méthodes de Boko Haram, "inhumaines pour la communauté musulmane". Le groupe reproche à Boko Haram de ne pas viser les "vrais ennemis" de l’islam, à savoir les Occidentaux. Il a fait savoir qu’il ne tuerait pas les non-musulmans nigérians sauf en cas de légitime défense.

Le premier fait d’armes d’Ansaru remonterait au mois de mars dernier, avec l’enlèvement d’un Britannique et d’un Italien. Deux hommes qui, par la suite, ont été tués lors d’une tentative de libération effectuée par les forces britanniques et nigérianes.

Catherine Gouëset, l’express.fr, le 19 février 2013


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