Drame d’Allinges : la SNCF et RFF n’avaient pas été alertés de la dangerosité du passage à niveau

Après le chauffeur qui a livré un vibrant témoignage le matin, ce sont les responsables de la SNCF et de RFF (Réseau ferré de France) qui ont été appelées à la barre vendredi 4 avril au tribunal de Thonon-les-Bains (Haute-Savoie).

C’était le troisième jour du procès du drame d’Allinges qui se déroule jusqu’au vendredi 12 avril.

Au terme d’une audition musclée où il est apparu qu’aucun des deux acteurs ferroviaires n’avait été alerté de la dangerosité du passage à niveau n°68 d’Allinges, le président du tribunal, Benjamin Deparis, a fait part de sa surprise. Il s’est montré étonné que ni la SNCF ni RFF n’aient "une politique nationale de la dangerosité des passages à niveau".

Anne Lambusson, responsable régionale de RFF, lui a simplement répété qu’il existant une liste des passages préoccupants. Elle compte 172 sites à ce jour ; celui d’Allinges y a été inscrit en 2012, quatre ans après l’accident et quelques semaines seulement après la mise en examen des deux entreprises. Mme Lambusson a ajouté : « A RFF on n’a pas d’agent sur le terrain en train d’analyser boulon par boulon ! »

Le juge a ensuite voulu pousser les deux responsables ferroviaires dans leurs retranchements. « Un passage à niveau peut être dangereux sans être inscrit sur la liste ? Sans qu’il y ait eu d’accident ? » « La preuve », a osé la responsable régionale de la SNCF, Josiane Beaud, provoquant des soupirs dans les rangs des parties civiles.

Maître Georges Rimondi, avocat de parties civiles, s’est emporté face à ces réponses : « Il y a une dimension roulette russe à considérer qu’un passage à niveau n’est préoccupant que lorsqu’il y a des accidents mortels ! »
« Qui est responsable de la sécurité des passages à niveau ? », insiste le juge

Les deux représentantes des entreprises publiques ont eu, en outre, à expliquer comment est assurée la sécurité sur les passages à niveau. Le sentiment qui se dégage, à voir l’insistance des avocats et du juge, est que leurs réponses sont pour le moins confuses. Le président du tribunal, Benjamin Deparis, a posé plus d’une dizaine de fois la même question : "Qui est responsable de la sécurité des usagers des passages à niveau ?"
Un début de réponse a été apporté par Josiane Beaud pour qui son entreprise a la charge de l’entretien des passages à niveau. Mais, comme Anne Lambusson elle n’a pas été en mesure de citer une personne chargée de cette mission malgré les relances du juge. Dans la soirée, on a finalement appris qu’il n’y avait aucun expert, en tout cas chez RFF, chargé de ce volet sécurité.

Le juge et les avocats voudraient entendre Guillaume Pepy, président de la SNCF.

En l’absence de réponse, en début de soirée, le président Deparis a repris la parole de façon très solennelle : « Le tribunal aura à juger. La question est donc de savoir qui peut nous dire qui est responsable de la sécurité sur les passages à niveau. La question se pose de la venue de M. Pepy ou de quelqu’un d’autre. Il semblerait que M. Pepy ait un avis sur la question. »
Guillaume Pepy, président de la SNCF cité comme témoin à ce procès, devait venir la semaine prochaine or, lors de la première audience, mercredi 3 avril, l’avocat de la SNCF, Maître Michel Bertin a expliqué que celui-ci ne viendrait pas.

A l’issue de l’audience, il a par ailleurs été décidé, en accord avec les parties civiles, les prévenus et le procureur, qu’aucun transport sur les lieux du drame ne serait organisé au cours du procès. S’il avait été nécessaire, celui-ci aurait dû être organisé mercredi 10 avril.

Les débats reprendront lundi 8 avril à 9 heures avec l’audition des parties civiles.

lemessager.fr, EMMANUEL ROUXEL, le 6 avril 2013


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