Brétigny : l’enquête confiée à trois juges

Douze jours après la catastrophe ferroviaire de Brétigny-sur-Orge (Essonne), l’enquête a été confiée à trois juges d’instruction qui vont se concentrer sur les raisons du basculement de l’éclisse, très probablement à l’origine du drame qui a fait six morts.

Ecartant « a priori » l’acte de malveillance, le procureur de la République d’Evry, Eric Lallement, a ouvert mercredi une information judiciaire pour homicides et blessures involontaires. Soit les mêmes chefs qui avaient présidé à l’enquête en flagrance ouverte le soir même du déraillement du Téoz 3657 reliant Paris à Limoges.

« A priori aujourd’hui, l’acte de malveillance est écarté », a déclaré le magistrat selon qui, le basculement d’une éclisse « semble être à l’origine de la catastrophe ».

L’enquête judiciaire sur la base des premières constatations d’un expert indépendant en accidentologie, Robert Hazan, épouse donc les conclusions avancées très rapidement par la SNCF et son président Guillaume Pepy.

Au lendemain du drame, la compagnie ferroviaire avait abondamment communiqué sur le retournement de cette pièce d’acier de dix kilos reliant deux rails pour expliquer « l’origine matérielle » de la catastrophe.

Une hypothèse confirmée par l’enquête interne de neuf jours diligentée par la SNCF dont les conclusions ont été adressées au parquet, au directeur du Bureau d’enquête sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT) et au président de l’Établissement public de sécurité ferroviaire (ESPF). Le contenu de cette enquête est désormais soumis au secret de l’instruction.

Les causes de cette défaillance - « un événement inédit sur le réseau » selon un cadre de la SNCF - vont donc être au coeur des investigations menées par le collège des juges instructeurs.

Rupture ou desserage des boulons ?

« Les recherches vont se concentrer sur les causes de l’absence, de la rupture et/ou du desserrage des écrous de cette éclisse », a précisé le magistrat. « Est-ce qu’il y a eu rupture ou desserage » des boulons qui tiennent les éclisses ? « C’est un point important », a-t-il ajouté, précisant que les pistes du défaut de fabrication ou du défaut d’entretien de ces pièces étaient « ouvertes ».

Dans cette perspective, la priorité des juges « sera de diligenter des expertises métallurgiques », a avancé M. Lallement.

Balayant les critiques apparues dans la presse sur une scène de déraillement qui n’aurait pas été suffisamment « figée » par les enquêteurs et que des dizaines et des dizaines de secouristes ont pu piétiner, le procureur a assuré que tous les boulons situés à proximité de l’aiguillage avaient été saisis.

« Les saisies ont été faites extrêmement rapidement », a-t-il dit.

Écrous, boulons, essieux mais également les voitures du train sont désormais sous scellés.

Plus tôt dans la journée, la SNCF avait indiqué lors d’une conférence de presse que la vaste campagne de vérification nationale des aiguillages lancée après la catastrophe n’avait pas décelé de risques pour la sécurité.

« Les vérifications n’ont pas décelé de situation de nature à engager la sécurité », a affirmé Pierre Izard, directeur de la branche SNCF Infra chargée de l’entretien et de la maintenance du réseau, pour le compte de Réseau ferrée de France (RFF).

Interrogés sur la maintenance de l’aiguillage où a débuté le déraillement du Paris-Limoges, M. Izard et M. Pepy ont redit qu’il avait fait l’objet d’une visite « visuelle » le 4 juillet au cours de laquelle aucune anomalie n’avait été signalée. Ils n’ont, en revanche, pas pu préciser la date de la dernière intervention manuelle sur l’aiguillage et en particulier, l’éclisse.

« Nous prendrons à nouveau toutes nos responsabilités lorsque les premiers résultats des enquêtes judiciaires et administratives seront connus », a affirmé Guillaume Pepy.

Outre l’information judiciaire qui promet d’être « longue » selon le parquet, la deuxième enquête toujours en cours, menée par le BEA-TT, devrait prendre plusieurs mois.

Six personnes sont mortes dans le déraillement du train le 12 juillet en gare de Brétigny, deux passagers originaires du Limousin et quatre habitants de l’Essonne présents sur le quai. Selon le parquet, sept personnes restent hospitalisées.

Libération avec AFP - 24 juillet 2013


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