Attaque du Westgate : le Kenya poursuit son enquête

L’enquête se poursuivait vendredi sur le carnage du centre commercial Westgate de Nairobi, au troisième et dernier jour de deuil national au Kenya où doivent se tenir des prières collectives d’hommage aux victimes, sur fond de nouvelles menaces islamistes.

Les insurgés islamistes somaliens shebab, qui ont revendiqué l’attaque du Westgate et ses 67 morts - un bilan provisoire -, se sont moqués dans la nuit de jeudi à vendredi des Kényans et de leur gouvernement, « toujours dans le désarroi », et ont menacé sur leur compte Twitter : « ce n’était que l’avant-première du premier acte ».

Le leader des shebab, Ahmed Abdi Godane, avait déclaré mercredi soir que le carnage était « un message » au pays, dont les troupes combattent depuis fin 2011 les insurgés en Somalie, et « aux Occidentaux qui ont soutenu l’invasion kényane ».

Les mesures de sécurité ont été renforcées au Kenya, mais aussi dans deux autres pays intervenant en Somalie comme l’Ouganda et le Burundi.

Human Rights Watch a rappelé vendredi dans un communiqué que depuis l’entrée de l’armée kényane en Somalie, « des dizaines d’attaques » ont touché le Kénya, tuant « plus de 100 personnes » et en blessant « des centaines ».

Interpol sur place

Jean-Michel Louboutin, directeur exécutif des services de police d’Interpol, est arrivé jeudi à Nairobi.

Son organisation a émis, à la demande du Kenya, un mandat d’arrêt international contre la Britannique Samantha Lewthwaite, veuve d’un des kamikazes des attentats de Londres de 2005, pour des charges remontant à 2011 - « possession d’explosifs et complot criminel ». Son nom plane depuis le début sur l’attaque de Nairobi, à laquelle certains médias l’accusent d’avoir participé.

Interrogé par l’AFP, M. Louboutin n’a pas souhaité s’exprimer sur l’implication de la « veuve blanche », comme la surnomment les médias, renvoyant vers les autorités kényanes.

Des informations contradictoires ont été diffusées par le gouvernement, une ministre évoquant la présence de Britanniques, dont la « veuve blanche », et d’Américains parmi les assaillants. Ce qu’ont ensuite refusé de confirmer le président kényan Uhuru Kenyatta et le ministre de l’Intérieur Joseph Ole Lenku.

Ce dernier avait estimé mercredi que l’enquête, à laquelle participent également des policiers de plusieurs pays (Royaume-Uni, Etats-Unis, Israël, Allemagne et Canada), prendrait « au moins une semaine ».

Il s’agit notamment d’« identifier les auteurs », selon M. Louboutin. Cinq d’entre eux ont été tués pendant le siège, 11 suspects sont en détention, et d’autres islamistes se trouvent probablement sous les décombres du Westgate.

Selon un bilan officiel provisoire, 61 civils ont péri, ainsi que six membres des forces de sécurité et cinq assaillants. Quelque 240 personnes ont également été blessées. Mais d’après la Croix-Rouge, 61 personnes sont toujours portées disparues.

Les craintes sont grandes qu’une partie d’entre elles se trouvent également dans les ruines. Un tiers du toit servant de parking avait cédé mardi après un incendie, la chute de tonnes de béton faisant s’effondrer trois étages du Westgate.

« Maintenant le défi, c’est de soulever ces trois niveaux et de regarder ce qu’il y a dessous », a expliqué M. Louboutin.

Tirs au bazooka

Plusieurs membres des forces kényanes ayant participé aux opérations contre les islamistes ont raconté à l’AFP que l’incendie avait éclaté lundi vers 13H00, lorsque les Kényans avaient tiré, à au moins deux reprises, au bazooka antichar de 84 mm contre les assaillants, retranchés dans une pièce blindée d’un supermarché.

« Personne », selon les mêmes sources, ne savait à ce moment-là combien de personnes, islamistes et otages, se trouvaient dans le supermarché - dont le toit s’est finalement effondré mardi. Le ministre de l’Intérieur a estimé qu’il en restait très peu.

Les forces de sécurité ont ensuite fouillé longuement le labyrinthe de boutiques jusqu’à mardi après-midi, tirant parfois préventivement des rafales de mitraillette mais ne trouvant plus personne, ont ajouté ces sources.

Mardi soir, le président kényan avait finalement annoncé officiellement la fin du siège et décrété trois jours de deuil national.

Vendredi après-midi, une prière publique d’hommage aux victimes, organisée par l’organisation charitative Saint-John Ambulance, devait se tenir sur le parking où les secours s’étaient installés pendant la crise. Une autre prière publique « pour la paix et la positivité », devant durer 24 heures, doit commencer samedi à l’initiative des Jeunes Jaïns (une religion proche de l’hindouisme).

A travers la ville, des cellules de soutien psychologique continuaient d’accueillir des Kényans traumatisés.

Selon des sources sécuritaires, un commando de 10 à 15 personnes avait pris d’assaut le centre commercial samedi à la mi-journée, moment de forte affluence, s’en prenant aux employés et aux clients à la grenade et à l’arme automatique avant de s’y retrancher avec des otages.

Des témoins ont indiqué que certains assaillants parlaient anglais, d’autres kiswahili (langue parlée au Kenya), et peut-être arabe.

A Nairobi où vivent de nombreux étrangers, le Westgate était régulièrement cité par les sociétés de sécurité comme une cible possible de groupes lies à Al-Qaïda, tels les shebab.

libération.fr avec AFP - 27 septembre 2013


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