Catastrophe de Brétigny : les cheminots accusent la casse du service public

Déraillement de Brétigny-sur-Orge, réforme du système ferroviaire, 
4e paquet ferroviaire… Jeudi, la fédération CGT des cheminots a tenu, face à la presse, à faire entendre sa voix dans les grands dossiers qui agitent aujourd’hui le monde du rail. Une première depuis le déraillement de l’intercités Paris-Limoges, le 12 juillet dernier, en gare de Brétigny-sur-Orge (Essonne), qui a fait 7 morts et plus d’une trentaine de blessés. Et si la CGT s’est montrée discrète au lendemain de la catastrophe ferroviaire, c’est qu’elle a «  estimé que, par respect pour les victimes, leurs familles et proches, ainsi que pour les cheminots qui se sont engagés avec les secours, l’heure n’était ni aux commentaires ni à la polémique  », a précisé, en préambule Gilbert Garrel, secrétaire général de la CGT cheminots.

Mise au point

Pour autant, aujourd’hui, l’heure est à la mise au point. La communication rodée de la SNCF et de RFF, relayée par la majorité des médias, s’échine à considérer le « défaut de maintenance » ou l’erreur humaine comme cause unique de la catastrophe de Brétigny-sur-Orge. Mais la CGT, elle, porte dessus un autre regard. « Sur un réseau vieillissant qui nécessite donc plus de surveillance, la direction de la SNCF a réduit les équipes, doublé, voire 
triplé les périmètres d’intervention (...) », affirme Gilbert Garrel. Et pour exemple, sur le secteur de Brétigny, en 2005, une brigade chargée de la surveillance des voies comptait 19 cheminots, aujourd’hui, ils ne sont plus que 9 (!). Pour la CGT, la politique économique de la SNCF, la course à la réduction des coûts et à la productivité, les coupes franches dans les effectifs de la maintenance, le recours quasi systématique à la sous-traitance et l’externalisation galopante sont à mettre au banc des accusés.

668 incidents signalés depuis début 2013

« Les cheminots, aujourd’hui, n’ont plus les moyens humains et matériels de faire du bon travail », déclare la CGT, qui affirme par ailleurs que, depuis des mois, des rapports d’incidents remontent au sommet de la hiérarchie, sans être suivis d’effet. « Du 25 juin 2013 au 17 juillet 2013, de nombreux cas ont été détectés sur l’aiguillage de Brétigny et, au total, sur l’année 2012 et sur l’ensemble du réseau 
national, ce sont 1 063 incidents de sécurité, dont 211 déraillements, qui ont été répertoriés, loin des seuls 126 annoncés par la direction de la 
SNCF », affirme la CGT, ajoutant que « depuis le début de 2013, 668 incidents de sécurité ont déjà été signalés sur l’ensemble du réseau ».

Par ailleurs, le syndicat a décidé de se porter partie civile lors de procès du déraillement de Brétigny pour, entre autres, « avoir en main l’ensemble du dossier puisque les 8 CHSCT concernés n’ont pas eu accès au rapport de sécurité interne à la SNCF au motif du secret de l’instruction, alors même qu’il était entre les mains de certains journalistes ». Gilbert Garrel a également regretté que la catastrophe ferroviaire de Brétigny n’ait pas servi de leçon. « La commission européenne des transports et son président, Siim Kallas, n’ont rien changé dans leur vision de la libéralisation (...) et de la généralisation de la concurrence. Quand il s’agit d’ouvrir le ferroviaire aux marchés et d’en faire une activité commerciale potentiellement rémunératrice, la sécurité passe au second plan ! » s’insurge-t-il.

Opposition au 4ème paquet européen

De là l’opposition franche, réitérée par la CGT, au projet de 
4e paquet ferroviaire, en préparation à Bruxelles, et à la future réforme gouvernementale du système ferroviaire, laquelle, en réorganisant en profondeur le système de gouvernance de la SNCF et de RFF, prévoit la création de trois Epic : « Découper pour mieux privatiser », analyse la CGT. Pire, à l’heure où la financiarisation du système ferroviaire et la casse du service public sont pointées du doigt comme mettant en danger la sécurité des cheminots et des usagers, Guillaume Pépy 
s’apprête à présenter son nouveau plan, « Excellence 2020 ». Un plan où « les dérives du passé sont actualisées, avec de nouvelles réorganisations, des réductions budgétaires, des filialisations et externalisations », dénonce la CGT.

Contre la libéralisation du secteur et la casse du service public de transport ferroviaire à l’échelle européenne, la Fédération syndicale européenne de transports (ETF) appelle, le 9 octobre, «  les cheminots de toute l’Europe à se mobiliser. (Car), malgré les refrains qu’on nous assène tous les jours, rien n’impose l’ouverture à la concurrence au plan européen  ». La CGT, l’Unsa et SUD rail se sont d’ores et déjà ralliées à l’appel de l’ETF.

humanite.fr avec Marion d’Allard - 4 octobre 2013


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