Ouverture du procès du dramatique incendie de l’hôtel Paris-Opéra

Le dramatique incendie de l’hôtel Paris-Opéra qui avait fait 24 morts – dont neuf femmes et onze enfants –, en avril 2005 parmi les familles étrangères en difficulté logées dans l’établissement s’ouvre jeudi 14 novembre à Paris.
Huit ans et demi après les faits, quatre personnes sont poursuivies pour homicides et blessures involontaires devant le tribunal correctionnel, mais ni les pouvoirs publics ni les acteurs sociaux, comme l’auraient souhaité les victimes. La plupart des vingt-deux familles hébergées dans l’hôtel y avaient été envoyées par le SAMU social, via des associations. Sont finalement poursuivis le veilleur de nuit, sa petite amie de l’époque et le couple de gérants de l’établissement. Une employée des services de contrôle de la préfecture qui avait visité l’hôtel un mois avant le drame sera entendue comme témoin assisté.

L’incendie du Paris-Opéra avait été le premier d’une série dans des hôtels ou meublés de la capitale abritant majoritairement des étrangers, qui avait fait 52 victimes en quelques mois et débouché sur un renforcement des normes anti-incendie dans l’hôtellerie.

UNE "SCÈNE DE GUERRE"

Appelés peu après deux heures du matin, les pompiers découvrent "une scène de guerre" en arrivant sur place, dans une petite rue derrière les Galeries Lafayette. "Une pluie de corps s’était abattue sur la voie publique, des gens paniqués jetaient des enfants par la fenêtre", rapportera un responsable des pompiers. L’incendie a été attisé par les gestes affolés des familles qui ont ouvert portes et fenêtres, mais aussi, comme le détermineront les enquêteurs, à cause du temps mis pour appeler les secours.

Le veilleur de nuit, par ailleurs fils des gérants, qui avait consommé cocaïne et alcool le soir du drame, est accusé de n’avoir pas immédiatement alerté les pompiers, tentant en vain d’attaquer les flammes à l’extincteur. Les secours seront finalement appelés par l’employé d’un hôtel voisin.

Quant à l’origine du sinistre, c’est la petite amie du veilleur, lui-même grièvement blessé, qui reconnaît un geste dramatique. En "rage" contre son état et son comportement : il buvait avec des clients et ne s’occupait pas d’elle après lui avoir demandé de venir – elle était partie en jetant à terre ses affaires dans la salle à manger dans laquelle le couple s’installait la nuit sur une couche improvisée. Habits, draps et couettes étaient tombés sur des bougies installées au sol, causant le drame.

"LE SOUCI DE RÉPONDRE AUX ATTENTES DES VICTIMES"

L’hôtel était par ailleurs en sur-occupation, avec 77 personnes présentes pour une capacité d’accueil fixée à 62. Enfin, le veilleur de nuit n’avait pas la formation anti-incendie obligatoire. Philippe Blanchetier, avocat de l’ex-petite amie, souligne qu’elle "a le souci de répondre aux attentes de la justice et surtout des victimes". Mais "que ce serait-il passé si on n’avait pas eu un [veilleur de nuit] sous l’emprise de stupéfiants et d’alcool et mieux formé ?"

Les gérants algériens sont, eux, "terrifiés" à l’idée du procès, qu’ils ne comprennent pas, explique leur défenseur, Romain Boulet. Pour l’avocat, le sureffectif "n’est pas une cause constitutive du déclenchement de l’incendie", ils ignoraient que leur fils dormait dans une salle non prévue pour cela, quant à l’absence de formation, "vu l’état dans lequel était le fils, ça n’aurait pas changé grand-chose".

Les victimes, tout en se réjouissant du procès, regrettent que les services de l’Etat puissent "échapper à une explication", selon Aomar Ikhlef, vice-président de leur association. Le procès est prévu jusqu’au 22 novembre. Le fils et son ex-petite amie encourent trois ans prison, les gérants cinq, avec la circonstance aggravante de manquement délibéré aux règlements.

Le Monde.fr avec AFP - 14 novembre 2043


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