"Tout accident est pour la FENVAC la faillite d’un système de sécurité"

Stéphane Gicquel, juriste, secrétaire général de la Fédération Nationale des Victimes d’Accidents Collectifs (FENVAC) depuis novembre 2007 est un homme particulièrement occupé ces derniers jours depuis l’ouverture, le 2 février, du procès du crash du Concorde dans lequel la FENVAC est partie-civile. L’occasion de rappeler ce qu’est la FENVAC, pourquoi et pour qui elle se bat.

Quels sont les objectifs de la FENVAC ?

L’originalité de la FENVAC est d’une part l’entraide entre les familles de victimes, des familles de victimes qui s’engagent pour l’amélioration de la prise en charge des victimes, l’aide directe aux familles de par l’expérience que chacune peut avoir de son propre drame. Mais outre cet objectif, il y a l’entraide, mais aussi la justice et la vérité. Ainsi qu’une réflexion sur la prévention des risques et la mémoire.

Donc vous intervenez aussi au niveau des ministères ?

Evidemment. D’abord sur les questions de réglementation. Nous faisons aussi partie d’un certain nombre d’organismes, par exemple l’Institut pour la culture de la sécurité industrielle et nous avons des partenariats avec certaines entreprises par exemple GDF-Suez, EDF, Total pour faire des échanges sur la sécurité.

La FENVAC regroupe combien d’associations à l’heure actuelle ?

Depuis 15 ans la FENVAC réunit les familles et/ou les associations de 75 accidents et catastrophes, à la fois d’explosions, d’incendies, de catastrophes naturelles, d’accidents aériens ou routiers, de collisions, de naufrages. Au total, l’ensemble de tout ce qui est accidentss et catastrophes.

Comment fonctionne la FENVAC ?

Je travaille avec des collaboratrices qui sont des stagiaires élèves avocat.

Concernant le procès du Concorde, vous étiez récemment dans l’émission "C dans l’air" d’Yves Calvi. Finalement quel est le rôle de la FENVAC ?

Eh bien moi- même ou une collaboratrice assisteront à chacune des 53 audiences prévues de façon à couvrir l’ensemble du procès. D’ailleurs, la FENVAC a ouvert un blog à cette adresse procesconcorde.fenvac.org , ainsi tout le monde pourra suivre le déroulé de ce procès. C’est une première pour nous. Pourquoi l’avons nous fait ? Tout simplement parce que la première vertu d’un procès pénal qui dure quatre mois c’est que beaucoup de choses sont dites. Nous allons rendre publiques des choses qu’on aurait peut-être préféré taire…Notre objectif est de donner de la transparence et de la publicité sur les débats. Démontrer et disséquer tout ce qui a pu entourer ou participer à cet accident.

Combien de parties-civiles dans ce procès ?

Il y en a très peu. Je pense, y compris les parties civiles institutionnelles, nous sommes environ une vingtaine. Quant aux prévenus, ils sont avant tout là pour incarner et représenter un système. Certains ont quand même eu des responsabilités dans la conception du système Concorde comme dans son suivi de navigabilité.

Il y a deux thèses en présence dans ce procès. Celle de la lamelle perdue par un appareil de la Continental Airways et celle très récente de la perte d’une entretoise sur le train. Quel est votre sentiment ?

Effectivement il y a la thèse de l’instruction judiciaire qui est celle de la lamelle. Aujourd’hui fort opportunément le débat judiciaire est troublé voire intoxiqué par la seconde. En présentant comme des révélations la surcharge de l’avion, l’absence de cette entretoise. Or ces éléments sont dans le dossier judiciaire et ils ont été testés. Il en va de même du témoignage des pompiers. Notre réaction est de nous étonner qu’on ressorte des éléments qui étaient dans l’instruction, qui n’avaient pas fait l’objet de constatations ni de contestations de la part de Continental .C’est sur ces pseudos éléments qu’a été demandée l’annulation de la procédure. D’où ce paradoxe à la fois vouloir un débat et en même temps empêcher le débat. A la FENVAC, nous le percevons comme une manœuvre dilatoire sur le plan judiciaire.

Finalement, qu’attend la FENVAC de ce procès ?

Dès le premier jour nous avons plaidé afin que ce procès aille à son terme en combattant notamment les demandes procédurales destinées à annuler le procès. Nous sommes aussi et surtout là pour rappeler la dimension humaine d’un accident. Ce n’est pas le procès du crash d’un avion vide. C’est bien pourquoi la présidente du tribunal a placé le procès dans cette dimension humaine en procédant à la lecture du nom des 113 victimes, du nom des blessés.
En tant que fédération nous attendons aussi le débat qui devra être loyal, contradictoire et qui permette de disséquer durant quatre mois l’ensemble de la chaîne des responsabilités pour s’interroger sur le système de la sécurité aérienne. Tout accident est pour la FENVAC la faillite d’un système de sécurité. Et cela doit alimenter la réflexion et remettre en cause les fonctionnements, notamment lorsqu’il y a des signes avant-coureurs forts comme dans le cas du Concorde… »


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