Affaire Xynthia : retour douloureux à La Faute-sur-Mer

Le transport sur les lieux s’est déroulé jeudi dans une atmosphère de deuil.

La procession judiciaire chemine lentement sur la digue qui fut submergée le 28 février 2010 à La Faute-sur-Mer (Vendée), lors du passage de la tempête Xynthia. Le président du tribunal correctionnel des Sables-d’Olonne, flanqué de ses deux assesseurs, ouvre la marche, suivi des cinq prévenus, dont l’ancien maire de la commune, des avocats, des journalistes, et d’une longue théorie de parties civiles. Certaines ont apporté des fleurs. Un important déploiement de gendarmes assure la sécurité de ce transport sur les lieux.

Régulièrement, on marque le pas devant une petite pancarte mentionnant le nom et l’âge de l’une des 29 victimes de la catastrophe. La digue, depuis, a été consolidée et rehaussée : elle délimite aujourd’hui plus franchement qu’à l’époque la « cuvette mortifère » décrite par le juge d’instruction dans son ordonnance de renvoi. Mais elle reste dérisoire, même en ce jour de septembre où l’Océan - qu’on ne voit pas d’ici - roule des flots bienveillants jusqu’aux plages propices à la rêverie, et où la rivière Lay a pris la forme d’un placide ruban gris pour se jeter dans l’Atlantique.
« Cuvette mortifère »

Puis l’on descend de la digue pour arpenter les lotissements détruits par des pelleteuses après le drame. Rues sans but, lampadaires sans rien à éclairer, épaves de voitures concassées, monceaux de gravats comme autant de terrils du malheur. Des rubans de chantier rouge et blanc matérialisent, au milieu des herbes folles, l’emplacement des pavillons engloutis, tandis que des tubulures de plomberie coiffées de signaux rouge et jaune fluo indiquent la hauteur du plafond et celle, extravagante, de la mer surgie dans la nuit : parfois, les deux sont alignés. L’actuel maire, Patrick Jouin, assiste à cette huitième journée du procès, avec deux de ses adjoints : « Il y a eu 600 maisons déconstruites, rappelle-t-il, soit 20 % du territoire de la commune. » On arrive à cet instant devant l’endroit où les Bounaceur avaient fait construire leur résidence. Le panneau rappelle les âges des quatre membres de la famille noyés en 2010 : 73, 43, 13 et 4 ans.

Dans un silence absolu, le cortège se disloque aux portes du lotissement fantôme. Quelle leçon judiciaire le tribunal peut-il tirer de cette émouvante déambulation, lui qui dispose déjà de plans, de relevés, de photographies, de témoignages ?

Un jour, explique M. Jouin, il devrait y avoir dans cette brèche urbaine un centre d’équitation, un golf de 9 trous, une piste cyclable… Pour l’heure il n’y a rien, et ce rien hurle le souvenir d’une nuit infernale. La nature, indifférente au malheur des hommes, reprend ses droits, les arbres sont pleins de vigueur - et les plus beaux, dans ce lieu désolé, ce sont les saules pleureurs.

lefigaro.fr - le 25.09.2014 - par Stéphane Durand-Souffland


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