Accident de Brétigny : vers de nouvelles mises en examen pour la SNCF et RFF ?

Les victimes du déraillement du 12 juillet 2013 demandent aux juges d’étendre leurs investigations à « la mise en danger de la vie d’autrui ».

Mises en examen les 16 et 18 septembre dernier pour « homicides et blessures involontaires », les deux entreprises ferroviaires seront-elles à nouveau mises en examen prochainement ? C’est en tout cas ce que souhaitent les victimes. C’est pourquoi la Fédération nationale des victimes d’attentats et d’accident collectifs (Fenvac) a, via son avocat M° Georges Holleaux, demandé le 14 octobre aux juges d’instruction d’auditionner les patrons de la SNCF et de RFF. Objectif : les mettre en examen pour « mise en danger de la vie d’autrui ». Ce chef d’inculpation signifierait que l’entreprise a fait consciemment courir un risque d’accident aux usagers des trains passant en gare de Bretigny, et ce indépendamment du fait qu’il y ait eu ou non un accident. Conséquence : si la SNCF et RFF étaient mis en examen pour mise en danger de la vie d’autrui, tous les usagers sont susceptibles de se constituer partie civile.

Le 12 juillet 2013, le train Corail 3657 en gare de Brétigny-sur-Orge (Essone) déraillait et causait la mort de sept personnes ainsi que plusieurs dizaines de blessés. « Il apparait que l’assemblage éclissé à l’origine du déraillement se trouvait en phase terminale de désintégration, du fait du manquement par SNCF et RFF à plusieurs de leurs obligations règlemtaires », écrit M° Holleaux aux juges Caroline Davroux, Philippe Devoucoux et Marie-Denise Pichonnier.

« La SNCF avait conscience de la récurrence des défaillances techniques »

Il s’appuie pour cela sur le rapport très critique remis aux magistrats instructeurs le 25 juin dernier par Michel Dubernard et Pierre Henquenet qui « signale, à plusieurs reprises, que la SNCF et ses agents de maintenance avaient tout à fait conscience des particularités en termes de maintenance du secteur de Brétigny-sur-Orge, et de la récurrence des défaillances techniques ».

Les nombreuses pièces retrouvées sur le ballast autour de la traverse jonction double incriminée attestent de la fréquence des interventions antérieures et notamment des « changements de boulons pour cause de défaillance, voire de rupture », pour reprendre la terminologie employée par les experts judiciaires. Le problème pour l’entreprise, c’est que dès avril 2009, Alain Delaunay, expert monitorat de Saint-Pierre-des-Corps relevait que « les traverses jonction double (TJD) de Brétigny présentent régulièrement des difficultés de maintenance et ont déjà fait l’objet d’expertises ».

Tous les agents ne savent pas détecter les fissures à l’aide d’un marteau

Dans son courrier aux juges, la Fenvac rappelle cette remarque des experts judiciaires l’été dernier : « l’obsolescence et l’inadaptation du plan de voies de la gare de Brétigny émanent de rapports d’experts de 2009, mettant en exergue le danger d’y faire circuler des trains à plus de 100 kilomètres/heure (rappelons que ces appareils peuvent être franchis en itinéraire direct jusqu’à 150 kilomètres/heure ». L’association déplore que les préconisations des rapports de 2009 soient « restées lettres mortes »

« On ne peut donc que constater un manque volontaire, conscient et manifeste d’application des règles de maintenance et de circulation adaptées aux spécificités du secteur », écrit encore M° Holleaux. À cela s’ajoute l’inexistence de consignes écrites s’agissant du contrôle de la boulonnerie, ainsi que le manque de formation des agents.

Enfin , il ressort des procès verbaux d’audition réalisés par les magistrats instructeurs que la vérification au marteau permettant de vérifier qu’il n’y a pas de fissure n’est pas quelque chose que tous les agents savent faire. Du coup, certains ne font même pas l’opération lors de leurs tournées d’inspection des rails.

lefigaro.fr - Anne Jouan - le 15.10.2014


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