Brétigny : un nouveau rapport sévère pour la SNCF

L’accident « a brutalement concrétisé des insuffisances en matière de prévention des risques qui résultaient de dérives et de désordres plus anciens dans l’organisation du travail », note ce rapport réalisé à la demande du CHSCT.

Les tentatives pour déterminer les causes du déraillement de Brétigny, qui a fait 7 morts et des dizaines de blessés le 12 juillet 2013, se poursuivent. Apres ceux produits par la SNCF, le ministère des Transports et les experts mandatés par les juges, un nouveau rapport va nourrir le dossier, cette fois commandé par le comité d hygiène et de sécurité (CHSCT) de l’établissement de la compagnie ferroviaire dont dépend Brétigny.

Ce rapport, dont l’existence a été révélée par le site spécialisé "Mobilettre", et que les "Echos" ont pu consulter, n’est pas un élément de la procédure judiciaire en cours. Et il a été rédigé par des experts choisis par les représentants des salariés, c’est-à-dire par les syndicats. La direction, qui se refuse aujourd’hui à tout commentaire (le document de 270 pages ne sera officiellement étudié que le 12 novembre) le soulignera sans doute quand elle choisira de s’exprimer.

Le rapport est en effet très sévère pour les choix faits depuis des années par l’entreprise publique. Les experts désignés dans le cadre de l’enquête avaient déjà estimé que la défaillance de la pièce métallique qui a provoqué le déraillement était due à un défaut de maintenance. Les experts du CHSCT s’emploient eux à démontrer que ces lacunes dans la maintenance sont le résultat de « dysfonctionnements organisationnels » dues en grande partie à des contraintes économiques. Dans leur démonstration, ils ne consacrent qu’un chapitre sur 9 du rapport à l’accident lui-même

Leur analyse remonte jusqu’à la réforme institutionnelle de la fin des années 90 qui a abouti à confier la dette de 20 milliards d’euros de la SNCF et la propriété des voies à Réseau ferré de France( RFF), la maintenance du réseau restant assuré par la SNCF. Placé sous pression économique, RFF aurait imposé à la SNCF des exigences élevées, « qui se sont traduites par une forte diminution des moyens et des objectifs irréalistes en matière de productivité », écrivent les experts.

Conséquence, le réseau s’est mis à vieillir de manière accélérée, « plaçant les équipes en situations de réguliers débordements et d’urgence répétées ». Les effectifs ont reculé, entraînant « un net recul des compétences que les différentes directions n’ont jamais semblé prendre réellement au sérieux ». En parallèle , « la culture de sécurité a peu à peu perdu de sa cohérence et de sa force ». L’accident a donc « brutalement concrétisé des insuffisances en matière de prévention des risques qui résultaient de dérives et de désordres plus anciens dans l’organisation du travail ».

Cette lecture correspond à celle développée depuis des années par les représentants des salariés, notamment, la CGT et Sud. Nul doute donc que la direction contestera cette approche, en particulier parce que le rapport assure que « le secteur de Bretigny-sur-Orge n’est pas une exception » ce qui va à rebours du discours de la SNCF sur la sûreté du réseau

lesechos.fr - le 25.10.2014 - Lionel Steinmann


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