Corée du Sud : 36 ans de prison pour le capitaine du « Sewol »

Lee Joon-seok, le capitaine du ferry qui avait fait naufrage, coûtant la vie à plus de 300 passagers, en majorité des lycéens, en avril, a été condamné à trente-six ans de prison, mardi 11 novembre.

Le parquet avait réclamé la peine de mort à l’encontre de celui qui était jugé depuis le 10 juin pour « homicide par négligence aggravée ». Le parquet accusait le capitaine du Sewol d’avoir quitté le navire sans faire aucun effort pour secourir les passagers lors du naufrage. Les trois juges professionnels du tribunal de Gwangju n’ont cependant pas suivi ce réquisitoire : « Il ne nous a pas été possible de conclure que les accusés (...) savaient que les victimes allaient mourir à cause de leurs agissements ni qu’ils avaient l’intention de les tuer, ont déclaré les magistrats. Par conséquent, les chefs de meurtre sont rejetés. »

Pendant les débats, le marin a estimé qu’il « mérit[ait] » la peine capitale, mais il a souligné qu’il n’avait pas eu l’intention de sacrifier la vie des passagers. « J’étais trop paniqué, j’étais incapable de faire quoi que ce soit, a-t-il plaidé. Je n’ai pas pris les mesures appropriées, ce qui a conduit à la perte de nombreuses vies précieuses. »

Certaines familles présentes à cette ultime audience ont laissé éclater leur colère en comprenant que le capitaine échappait à la peine de mort. « Où est la justice ? » a ainsi lancé une femme aux juges. « C’est injuste. Qui pense à la vie de nos enfants ? Ils [les accusés] méritent plus que la mort », s’écriait une autre.

Contre trois autres gradés appartenant à l’équipage et pour lesquels le ministère public avait requis la réclusion criminelle à perpétuité, le tribunal s’est également montré plus clément en prononçant des peines comprises entre quinze et trente ans.

FIN DES RECHERCHES

L’épilogue judiciaire de cette catastrophe, parmi les plus meurtrières qu’ait connues la Corée du Sud en temps de paix, coïncide opportunément avec la fin des recherches sous-marines déclarée ce mardi également.

Neuf passagers sont toujours portés disparus. Le corps d’une étudiante a été découvert à la fin d’octobre alors que la précédente mise au jour remontait au 18 juillet. « La situation dans le bateau est devenue trop difficile pour poursuivre les opérations de recherches », a justifié le ministre des affaires maritimes Lee Ju-young.

L’instruction a mis en évidence une combinaison de facteurs expliquant la catastrophe, de la surcharge du navire de 6 825 tonnes à l’incompétence de l’équipage, en passant par des travaux d’agrandissement illégaux qui ont affaibli sa flottabilité.

L’ÉQUIPAGE, PREMIER DANS LES CANOTS DE SAUVETAGE

Mais la colère des familles s’est centrée sur les membres de l’équipage, parmi les premiers à grimper à bord des canots de sauvetage, abandonnant à leur sort des centaines de passagers toujours coincés à bord du navire en perdition. L’angoisse des familles s’est trouvée décuplée lorsqu’il est apparu que l’équipage avait donné l’ordre aux passagers de ne pas bouger, ce qui a coûté de nombreuses vies, d’après l’accusation.

Des vidéos tournées par des lycéens sur leurs téléphones portables, et retrouvées lors de la récupération des corps dans l’épave, faisaient entendre un message par haut-parleurs leur intimant de ne pas bouger alors que le ferry prenait de plus en plus de gîte. Les passagers ne sont plus parvenus ensuite à remonter des couloirs à l’oblique, rendus glissants par l’eau qui s’engouffrait.

L’émotion suscitée par cette affaire est si vive en Corée du Sud que certains se sont demandé si les accusés bénéficieraient d’un procès équitable. La présidente sud-coréenne Park Geun-hye avait assimilé les agissements des membres de l’équipage à des meurtres quelques semaines après le désastre, et les accusés ont eu du mal à trouver des avocats qui acceptent de les défendre.

lemonde.fr avec AFP - le 11.11.2014


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