Attaque contre « Charlie Hebdo » : « Les victimes doivent savoir qu’elles peuvent solliciter de différentes façons une aide adaptée »

Au lendemain de l’attaque contre Charlie Hebdo, Françoise Rudetzki, déléguée au terrorisme au sein de la Fédération nationale des victimes d’attentats et de catastrophes collectives (Fenvac), explique à 20 Minutes comment sont prises en charge les victimes d’un tel événement traumatique.

Comment doivent-être prises en charge, au niveau psychologique, les victimes ?
Il n’y a pas de règle dans ce domaine. Cependant, il faut éviter d’attendre trop longtemps pour recevoir une aide psychologique. Il y a parfois un temps de latence, où les personnes estiment qu’elles vont bien, mais des troubles (du sommeil, angoisses, phobies de la foule…) peuvent se manifester. Ces personnes doivent savoir qu’elles peuvent solliciter de différentes façons une aide adaptée à leur cas.

Quelles sont-elles ?
D’abord, depuis les attentats de 1995, des cellules d’urgence médico-psychologiques sont mises en place sur les lieux des catastrophes pour recueillir la parole des personnes qui ont vécu les événements et qui ne sont pas hospitalisées. Pour les blessés, une prise en charge psychologique est intégrée aux soins hospitaliers, même si ce sont les soins physiques qui priment. Enfin, les soutiens associatifs sont aussi présents pour orienter les victimes vers des structures spécialisées ou des psychologues privés si elles le souhaitent. Les proches des personnes décédées peuvent aussi recevoir un appui, mais ce soutien, qui se fait au long cours, ne se fera que dans quelque temps, quand la période de deuil sera passée.

Charlie Hebdo devrait sortir la semaine prochaine. Les victimes seront-elles capables de reprendre le travail si vite ?
Il est extraordinaire que, grâce à la mobilisation de journalistes et à la proposition d’aide pour réaliser le journal dans les temps qui viennent, Charlie Hebdo puisse vivre et continuer de paraître. Il est évident que les victimes qui souhaitent y participer -celles qui ne sont pas blessées, qui étaient présentes dans les locaux mais qui ont pu s’échapper pourront le faire, mais c’est important que la France -les professionnels de presse, la population civile, le politique- manifestent leur solidarité avec les victimes de cet attentat.

Cette mobilisation populaire est en effet inédite…
Tout à fait. Après 30 ans de combat en faveur des victimes et contre le terrorisme, ce réveil de la population civile est pour moi très important. On n’a jamais vu ça en France, ni en 1986, ni en 1995. Ce réveil de la population civile, cette solidarité et cette volonté de défendre nos valeurs démocratiques et nos libertés individuelles (que l’on ne doit pas abandonner face au terrorisme), font du 7 janvier un moment particulièrement important

Cela peut-il aider les victimes de l’attaque ?
Oui, cela peut participer et aider les victimes à se reconstruire, même si ce n’est pas l’aspect le plus important du suivi : nous sommes présents non seulement dans les moments d’émotion, comme actuellement, mais aussi dans les mois et les années à venir pour aider ces personnes à sortir de leur état de victime, à se réinsérer, socialement, familialement…

Cette attaque peut-elle faire remonter des angoisses chez les victimes d’attaques antérieures ?
Les victimes du passé sont évidemment plus sensibles et plus sensibilisées à ce type d’événement. Mais elles sont aussi sensibles à cet esprit de solidarité qui se manifeste. Par ailleurs, elles sont aussi prêtes à aider les victimes actuelles, à leur apporter leur soutien, leur expérience, pour celles qui auraient besoin de discuter avec des personnes qui ont vécu le même type d’événement traumatique.

20minutes le 08.01.2015


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