L’identification des corps après un crash, un processus très codifié

150 personnes se trouvaient à bord de l’A320 qui s’est écrasé dans les Alpes mardi. L’existence de tout survivant ayant été écartée, l’heure est désormais à l’identification des corps.

Les images des débris de l’A320 de Germanwings, éparpillés sur plus d’un hectare à flanc de montagne, laissent présager de l’ampleur du travail qui attend les médecins légistes. L’identification des corps est pourtant un impératif pour rendre les dépouilles aux familles, qui pourront ainsi entamer leur travail de deuil, et recenser officiellement les victimes. Elle répond à un protocole précis, appliqué à la plupart des accidents de grande ampleur (bus, train…).

Dans un premier temps, le site est quadrillé de façon méthodique pour relever tous les corps ou fragments de corps. Leur localisation est enregistrée précisément, et ces restes humains sont ensuite conditionnés et entreposés dans une sorte de morgue temporaire avant d’être transférés aux médecins légistes. Voilà pour la théorie. Dans le cas présent, le terrain extrêmement escarpé où reposent les restes de l’avion rend cette première étape particulièrement difficile. Les débris humains (aucun corps n’aurait été retrouvé entier) sont éparpillés sur un hectare et demi de terrain, dont des à-pics sur lesquels il n’est possible de se déplacer qu’en cordée. Sans compter le froid, qui complique ces conditions de travail dantesques. L’intervention a donc été confiée à des militaires issus de pelotons de gendarmerie de haute montagne, qui ont entamé le travail de repérage des fragments de corps. Ceux-ci sont pour l’instant laissés sur place afin de permettre une reconstitution en 3D de la scène de la catastrophe. Les experts ont d’ores et déjà annoncé qu’il faudrait plusieurs semaines pour venir à bout de cette phase de travail.

Recueillir des indices

De leur côté, les enquêteurs auront pour mission de recueillir des informations sur les victimes afin de faciliter leur identification. Le questionnement des familles permet d’accumuler des éléments dits « ante mortem » : particularités physiques des défunts (taille, pointure, tatouage, couleur des yeux et des cheveux, port d’une prothèse…), radios dentaires ou matériel génétique exploitable, comme une brosse à cheveux ou à dents. Mais là encore, la tâche s’annonce ardue, car les passagers représentent pas moins de 15 nationalités différentes.
Le travail de recoupement des informations par les médecins légistes commence alors. « Les indices sur l’aspect physique des gens permettent de réaliser un premier tri, explique le Pr Valéry Hédouin, chef du service de médecine légale au CHRU de Lille. Mais dans le cas présent, on imagine que cela va difficilement être possible, vu l’état des dépouilles ». La deuxième étape consiste donc à s’appuyer sur le dossier dentaire, quand il a pu être récupéré. « Les dents sont très solides, et l’intervention d’un dentiste va sculpter la dent de façon unique, qui permettra d’identifier de façon très sûre un individu si l’on dispose de radios », poursuit le Pr Hédouin.

« Une question de dignité »

Des analyses ADN sont également réalisées pour identifier des fragments de corps ne présentant aucun indice. Les techniques de plus en plus performantes en la matière ont accru leur importance dans le travail des légistes. « Des analyses ADN vont vraisemblablement être réalisées sur tout ce qu’ils trouveront. Cela permet de rendre un corps le plus complet possible aux familles, c’est une question de dignité », estime Mariannick Le Gueut, professeur de médecine légale à Rennes.
Les informations ante mortem et postmortem sont mises en regard lors de réunions rassemblant des enquêteurs, un médecin légiste, un biologiste, un odontologiste, voire un magistrat du parquet. L’identification permet de déclarer la mort de la victime, puis de rendre le corps, du moins ce qui a pu lui être attribué, à ses proches.
L’identification des corps peut également faire progresser l’enquête. « Dans le cadre d’un accident de bus par exemple, l’autopsie du conducteur peut aider à savoir s’il a fait un malaise qui expliquerait le drame, rappelle le Dr François Paysant, du CHU de Grenoble. Retrouver le pilote de l’avion pourrait donc être intéressant. Par ailleurs, ce travail d’identification permet aussi de savoir s’il n’y avait pas à bord une personne qui n’était pas censée s’y trouver ».

lefigaro.fr - le 26.03.2015


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