Le secours en montagne divise pompiers et gendarmes

Le torchon brûle entre les pompiers et les gendarmes sur le secours en montagne, les soldats du feu exprimant ouvertement leur ras-le-bol d’être "ravalés au rang de simples supplétifs des secours" par les gendarmes spécialisés, dans leur mensuel Le sapeur-pompier magazine.

"Les dysfonctionnements (avec la gendarmerie, ndlr) se multiplient avec des conséquences dramatiques", écrit dans l’éditorial du magazine daté de mai le colonel Jacques Perrin, citant "le décès en février, d’une randonneuse dans les Vosges".

Sans l’affirmer nettement, l’officier laisse entendre que la mort de cette randonneuse le 14 février aurait pu être évitée si les pompiers avaient été mobilisés.

Dans le même magazine, envoyé à toutes les casernes de France, le patron des pompiers de Haute-Savoie le lieutenant-colonel Guy Morand, "observe que les gendarmes du peloton de gendarmerie de haute montagne (PGHM) de Chamonix diffusent un numéro d’appel des secours à 10 chiffres, dans des endroits comme des refuges, certaines stations de sport d’hiver, ou sur des panneaux de randonnées". Selon lui, ce numéro court-circuite les 15, 17, 18, 112, et ces numéros à 10 chiffres "ne sont pas conforme à la réglementation et à la loi de Sécurité civile d’août 2004".

Les pompiers des départements de montagne sont "lassés d’être confrontés à des comportements hégémoniques et méprisants", renchérit le président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, le colonel Richard Vignon qui réclame "une initiative forte du ministre de l’Intérieur".

Interrogés par l’AFP, les gendarmes de montagne et le ministère de l’Intérieur n’ont pas souhaité répondre.

Auteur d’un ouvrage juridique de référence sur le secours en montagne, le préfet Marcel Pérès affirme : "Le secours en montagne est une magnifique vitrine que les différents services se disputent, et qui a été attribué aux gendarmes et au CRS de montagne pour des raisons historiques".

Cette attribution remonte à Noël 1956 avec la mort de Jean Vincendon et François Henry, deux jeunes alpinistes qui avaient tenté l’ascension du Mont-Blanc par la Brenva en plein hiver. Ils étaient restés bloqués à 4.000 m d’altitude et leurs agonies avaient été suivie en direct à la jumelle pendant 10 jours par les habitants de Chamonix (Haute-Savoie).

Deux ans après naissait le PGHM de Chamonix, suivis d’autres PGHM et des CRS de montagne.

Selon M. Pérès, il y a déjà eu des frictions entre gendarmes de montagne et pompiers, notamment lors de l’avalanche meurtrière (12 décès) du hameau de Montroc à Chamonix, le 9 février 1999. Les pompiers avaient estimé qu’ils auraient pu évacuer les habitants du hameau, mais les gendarmes du PGHM avaient répondu que le risque d’avalanche sur la route en cas d’évacuation était plus fort que dans les chalets. Les tensions augmentent actuellement, reconnaît le préfet sans vouloir s’immiscer dans ce débat.

Le colonel Perrin concède "le PGHM est un corps d’élite, nous ne contestons pas, mais nous aussi avons des compétences en montagne, nous avons des guides de montagne qui sont pompiers".

"Pour la gendarmerie, dont l’image est lié à la répression, le secours en montagne redore leur blason, mais nous aussi, au moment où nous voulons redynamiser le volontariat, nous souhaitons mettre en valeur notre savoir et il faut que le gouvernement reconnaisse que tous les acteurs du secours sont complémentaires", ajoute le colonel Perrin.

AFP, par Jacques GUILLON, 24 mai 2010.


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