Inondations dans le Var : les raisons de la crue

Episode météorologique inhabituel pour la saison, facteurs locaux aggravants… Plusieurs éléments ont contribué à la catastrophe dans la région de Draguignan. Les météorologues connaissent bien le phénomène à l’origine des précipitations : des masses d’air chaud qui se chargent d’humidité au-dessus de la Méditerranée et éclatent en pluies torrentielles au-dessus de la côte.

Dans le métier, on appelle cela des "épisodes cévenols", du nom de l’arrière-pays de Nîmes où ils sont fréquents. Mais les dégâts qu’il laisse sur son passage ne sont pas facilement prévisibles. Le Var, où les inondations ont causé la mort d’au moins 25 personnes, en a fait l’amère expérience mardi 15 juin.

UN SYSTÈME DE SURVEILLANCE PERFECTIBLE

"Nous savons bien prévoir où ces épisodes cévenols vont arriver à l’échelle d’une région, explique Emmanuel Bocrie, qui dirige l’unité médias de Météo France, mais localement, dans le département, c’est beaucoup plus difficile. C’est la limite de l’art du prévisionniste…" Le système de vigilance de Météo France, qui est passé au niveau "orange" lundi soir, est conçu à l’échelon départemental.

Mise en place après la tempête de 1999, la carte de vigilance s’appuie sur l’historique des données et des dégâts causés par les épisodes météorologiques violents de ces dernières années pour définir le niveau d’alerte. "On se pose en permanence la question de passer au rouge. Ici, le risque météorologique était orange presque rouge, mais bien orange", précise Emmanuel Bocrie. Ce risque est ensuite croisé avec le niveau de risque d’inondation défini par le Service central d’hydrométéorologie et d’appui à la prévision des inondations (Schapi), qui surveille les risques de crues des rivières. "Sur la carte de vigilance, on indique toujours la couleur la plus forte entre le risque météorologique et le risque d’inondation", explique Emmanuel Bocrie.

Problème, le réseau de vigilance crues du Schapi ne maille pas finement tout le territoire. Dans le Var, le réseau de surveillance des cours d’eau en cause dans les inondations des environs de Draguignan n’est pas encore en place. Le niveau de vigilance n’a donc pris en compte que le risque météorologique.

DES FACTEURS LOCAUX AGGRAVANTS

Ici, les précipitations les plus fortes se sont concentrées sur une zone très réduite, à un endroit où la disposition du terrain facilite la concentration du ruissellement. Les habitants de Draguignan décrivent une arrivée d’eau très puissante et très brutale vers 17 h 30. "C’est une dynamique très, très rapide", explique Nathalie Dorsliger, de l’antenne montpelliéraine du Bureau de recherche géologique et minière (BRGM). "Et même s’il s’agit principalement d’un phénomène de ruissellement sur le lit des cours d’eau, il y a un phénomène de saturation. Quand les sols sont complètement gorgés d’eau, tout ruisselle", et le sol ne retient plus rien.
Circonstance potentiellement aggravante, ce type d’épisode est intervenu à une période inhabituelle : les crues dites "cévenoles" se produisent en général à l’automne, parfois au début du printemps. Ce facteur pourrait avoir amplifié les inondations : en juin, la terre est plus humide et donc plus vite saturée.

La nature des sols a également un impact fort sur le comportement des eaux. "Vu la forte teneur en éléments calcaires des sols du secteur, explique Marc Moulin, hydrogéologue au BRGM en Provence-Alpes-Côte d’Azur, il est possible qu’une partie provienne de résurgence rapide" de l’eau venue de la circulation sous-terraine.
"Ce type de sol très fissuré, très fracturé, peut avoir un effet tampon ou un effet accélérateur, concurrent de la décrue, suivant la dynamique de circulation sous-terraine." Il ne s’agit pour l’instant que d’hypothèses : les experts du BRGM attendent des données plus précises pour connaître la dynamique exacte des dégâts causés dans le Var.

Le Monde.fr, par Marion Solletty, le 17 juin 2010.


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