Villeurbanne : l’explosion mortelle devant le tribunal

Jugé hier pour « homicides et blessures involontaires », le propriétaire du local de la rue Jubin, d’où est partie la fuite de gaz, n’aurait pas respecté les normes de sécurité de son installation

Emotion hier devant la 13e chambre du tribunal correctionnel de Lyon. Le procès de l’explosion au gaz d’un local, rue Jubin à Villeurbanne le 5 avril 2001, qui coûta la vie à un policier et à un pompier, a été marqué par le témoignage de rescapés.
Deux pompiers, gravement blessés par la déflagration, ont décrit les conditions périlleuses dans lesquelles ce soir-là ils sont intervenus pour une odeur suspecte de gaz. « Le local était saturé en gaz, à tel point que le seuil d’explosivité de nos appareils de détection était au plus haut. On était conscient du risque, c’était un coup de poker. On a ventilé, mais ça a explosé après quelques secondes seulement », a confié Fabrice Cicarelli.
Un drame auquel la justice lyonnaise a consacré plus de six ans d’enquête. Des montagnes d’expertises. Au terme d’une instruction à rebondissements, colorée par une piste criminelle finalement abandonnée, elle a retenu la responsabilité présumée du propriétaire du local. Mis en examen pour « homicides et blessures involontaires », Jean-François Floris s’est senti bien seul hier face aux familles des victimes. Ingénieur en électricité de 45 ans, il lui est reproché un montage « inadapté » de son installation de gaz. Refaite à neuf lors de l’achat d’une cuisine équipée, elle présentait sur le dispositif de raccordement des signes de « non-conformité », ont indiqué les experts. « Le flexible relié à la gazinière était débranché, note la présidente Marie-Odile Théoleyre. L’embout était lisse alors qu’il aurait dû être annelé. Cela a pu favoriser sa désolidarisation du robinet ».
Se comparant à un bricoleur du dimanche, Floris a expliqué avoir suivi à la lettre les explications du vendeur de la grande surface spécialisée. « Vu que j’y connais pas grand chose, je me suis fait conseiller. Les pièces étaient neuves et estampillées de la norme NF. Je n’avais pas de doutes », se défend-il.
Agacées, la dizaine de parties civiles a pointé du doigt la grossiéreté de l’installation, à l’origine selon elle, de la fuite. « Vous avez dû forcer pour que ça rentre. Des colliers de serrage entouraient le branchement, alors qu’il aurait dû être soudé. Hors d’accès et dissimulé derrière un coffrage… ce dispositif, c’était du bricolage », a fustigé Me Hartmann, l’avocat de cinq pompiers blessés.
Ni surpression, ni acte de malveillance, le parquet a écarté des hypothèses, avancées par la défense. En fin limier juridique, Me Fabrice Pothier a tenté de desserrer l’étau de responsabilités de son client. Selon lui, la faute n’est pas caractérisée. « Avait-il conscience du risque ? Non. Il s’est juste trompé d’embout ». Et de demander la relaxe.
Le jugement a été mis en délibéré au 17 novembre.

Le Progrès, Arnaud Guiguitant, 20 septembre 2008


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