Panique à la Love Parade : 19 morts et 80 blessés

Au moins 19 personnes sont mortes et 80 ont été blessées samedi au cours de la Love Parade, fête de la musique techno qui réunissait plus d’un million de ravers à Duisbourg, dans l’ouest de l’Allemagne, a annoncé le maire de la ville.

Le précédent bilan de la police faisait état de 15 morts et 15 blessés graves.

« Selon les dernières informations, 19 personnes sont mortes et près de 80 ont été blessées à l’entrée du festival », a affirmé Adolf Sauerland dans un communiqué dans la nuit de samedi à dimanche.

Cette tragédie rarissime en Europe s’est produite dans un tunnel donnant accès au terrain d’une ancienne gare de marchandises où se déroulait la fête, à laquelle participaient 1,4 million de personnes, selon les organisateurs.

Selon de nombreux témoins, le tunnel de plus de 200 mètres de long sur 30 de large constituait le principal point de passage pour parvenir au lieu de la fête.

La panique s’est déclenchée alors que des milliers de personnes étaient bloquées dans le tunnel.

« Partout il y avait des gens sur le sol, le visage bleui. C’était tout simplement effrayant », a déclaré une jeune femme au journal die Welt.

« Mon ami m’a soulevée au-dessus des corps sinon je serais morte. Comment vais-je pouvoir oublier ces visages de gens morts ? », a-t-elle ajouté.

« Certaines victimes étaient à terre tandis que d’autres escaladaient les murs », a raconté Udo Sandhöfer à la chaîne de télévision NTV.

Quelques policiers et secouristes ont tenté de pénétrer dans le tunnel, « mais il y avait trop de monde », a-t-il ajouté. « Les gens ont continué à pousser pour rentrer dans le tunnel pendant 10 minutes et puis se sont aperçus de ce qui se passait et ont rebroussé chemin ».

Selon une jeune homme de 18 ans, interrogé par le quotidien Bild, « il était impossible » de sortir du tunnel. « C’était comme s’il y avait un mur de gens devant moi. J’ai cru que j’allais mourir », a-t-il déclaré.

On ignorait en début de soirée ce qui avait déclenché le mouvement de panique, mais un responsable de la ville de Duisbourg, Wolfgang Rabe, a déclaré à la télévision que l’incident avait démarré non pas dans le tunnel lui-même, mais dans des escaliers situés de part et d’autre de la rue à sa sortie.

« Quinze personnes sont mortes après avoir escaladé des barrières et être tombées », a-t-il déclaré, expliquant que les autorités n’avaient pas immédiatement interrompu la fête de crainte de provoquer un nouveau mouvement de panique. Les autorités ont largement ouvert les grillages qui entouraient le terrain avant de propager la nouvelle de l’incident.

Des milliers de personnes, ignorant pour la plupart ce qui s’était passé, ont continué à danser et à écouter la musique bien après le drame qui s’est produit vers 17H15 locales (15H15 GMT).

Une autoroute longeant les lieux avait été interdite à la circulation toute la journée, et les secours n’ont donc eu aucun mal à accéder rapidement au lieu de la bousculade meurtrière.

La chancelière Angela Merkel s’est déclarée « bouleversée ». « En ce moment pénible mes pensées vont aux proches des victimes. Je leur exprime ma sympathie et leur adresse mes condoléances ».

De tels mouvements de panique sont rares en Europe et sont généralement le fait de violences à l’occasion d’événements sportifs.

En 1985, 56 personnes ont été tuées à Bradford, en Angleterre, lorsqu’un incendie pendant un match de football a provoqué un mouvement de panique. La même année, au stade du Heysel à Bruxelles, 39 personnes sont mortes en tentant de s’échapper lors d’affrontements entre des supporters des équipes de la Juventus de Turin et de Liverpool.

La Love Parade a été créée à Berlin en 1989 pour quelque 150 personnes, et a depuis fait des émules dans toute l’Europe.

En 1999, elle a atteint son apogée avec 1,5 million de participants, mais elle a connu des problèmes de financement et les Berlinois étaient en outre excédés par ces fêtards souvent sous l’emprise de l’alcool et/ou de la drogue qui causaient des dégâts dans le Tiergarten, le grand parc du centre de la capitale.

En 2007, elle quitte Berlin et elle lance un appel en Europe pour trouver une terre d’accueil. Ce sera finalement la région de la Ruhr : Essen en 2007, Dortmund en 2008. L’édition 2009 prévue à Bochum a dû être annulée à cause de travaux dans la ville.


TEMOIGNAGE : La Love Parade de Duisbourg tourne à la tragédie, on se piétine à mort

« J’ai vu des morts, d’autres vivants mais inconscients » : dans la gare de Duisbourg (ouest de l’Allemagne), des milliers de jeunes traumatisés erraient dimanche au petit matin, au lendemain de la bousculade à la Love Parade qui a fait au moins 19 morts.
« J’étais dans le tunnel vers 17H00. Il y avait trop de barrières, et les passages étaient partout trop étroits », racontait Alexis, 28 ans, originaire de Wuppertal, une ville de la Ruhr proche de Duisbourg où plus de 1,4 million de personnes participaient samedi à ce gigantesque festival de musique techno.
« Il y avait des filles qui s’évanouissaient à cause de la chaleur. C’était dingue. Des policiers étaient sur des escaliers et tiraient les gens pour les sortir. Certains ont essayé de casser les barrières. C’était terrible, c’était le chaos », a-t-il poursuivi.
« Nous étions un groupe de 10 personnes mais nous ne sommes pas parvenus à rejoindre le festival. Il nous a fallu faire demi-tour ».
Le drame, qui selon un bilan de la police dimanche matin a fait 19 morts et 342 blessés, s’est produit vers 15H00 GMT (17H00 locales) dans un tunnel de quelque 200 mètres de long sur 30 mètres de large qui semble avoir été le seul accès au terrain d’une ancienne gare de marchandises où se déroulait la fête.
« J’ai vu des morts dans le tunnel. D’autres étaient vivants mais inconscients par terre, d’autres pleuraient », racontait Anneke Kuypers, 18 ans, une néo-Zélandaise étudiante en Belgique.
« Comme j’ai une formation de secouriste, j’ai essayé d’aider un peu. Les gens souffraient de déshydratation, certains avaient trop bu ou pris de la drogue ».
« Finalement, je suis allée (danser) au festival parce que je voulais décompresser. Mais j’ai perdu trace de mes deux amis et c’est eux qui ont mon argent et mon téléphone », a-t-elle ajouté.
« C’est dingue. La fête a continué », s’indignait Lubbert, 31 ans, originaire de Hanovre (nord).
Les autorités de la ville ont expliqué avoir décidé de ne pas interrompre brutalement la fête, par peur de voir d’autres mouvements de panique au sein de cette foule immense.
« Tout le monde a continué à danser, alors que certains avaient peut-être des amis qui sont morts », poursuivait Lubbert. « Et à la fin les organisateurs ont même dit : +Nous vous remercions pour cette belle journée+ ».
« L’organisation était mauvaise. Très vite, il n’y avait plus rien à boire à part de l’alcool. Et bien que c’était déjà plein, (les organisateurs) laissaient encore rentrer les gens », racontait Patrick Günther, un boulanger de 22 ans.
Les autorités n’ont pas précisé si cette tragédie rarissime en Europe avait fait des victimes étrangères, ce genre de manifestation attirant traditionnellement des jeunes de toute l’Europe.


ENCADRE : six étrangers parmi les 19 tués

Six étrangers font partie des 19 personnes tuées dans une bousculade à Duisbourg (ouest de l’Allemagne) lors d’un festival de musique techno, a-t-on appris dimanche auprès de la police.
Parmi les 18 morts identifiés figurent une Australienne, une Italienne, un Néerlandais, une (bien une) Chinoise, et un homme et une femme de nationalité espagnole, a indiqué un porte-parole de la police.
Au total, 10 femmes et neuf hommes — âgés de 20 à 40 ans — ont été tués samedi après-midi dans la bousculade monstre à l’entrée d’un tunnel menant au festival qui, selon les organisateurs, avait attiré plus d’un million de personnes.


Love Parade meurtrière à Duisbourg : questions sans réponses

Quel a été le déclencheur de la bousculade lors de la Love Parade de Duisbourg (ouest de l’Allemagne) qui a fait 19 morts samedi ? Sur cette question cruciale, comme sur bien d’autres, les organisateurs ont botté en touche dimanche, invoquant l’enquête en cours.

« Ce n’était pas un mouvement de panique », a estimé le directeur adjoint de la police de la ville, Detlef von Schmeling, lors d’une conférence de presse sous haute tension, dimanche à la mairie. Dès samedi, les autorités avaient mis en cause des comportements individuels, comme l’escalade de palissades et de pylônes, alors que nombre de témoins évoquaient une violente bousculade dans le tunnel d’accès au terrain de le fête.
Il a aussi démenti des rumeurs de provocations de la police envers des ravers.

Concernant les proportions exactes du tunnel, dans lequel de nombreux témoins disent avoir vécu un calvaire, le chef de la cellule de crise du festival, Wolfgang Rabe, a indiqué qu’il était « long de 120 mètres », sans préciser sa largeur. Celle-ci serait de 15 à 30 mètres, selon la presse.
De toutes façons, les 16 morts recensés sur place ont été retrouvés du côté ouest de l’accès au festival - pas dans le tunnel, a ajouté M. von Schmeling.
Combien de personnes au total sont venues pour la Love Parade ? Le site et ses voies d’accès étaient-ils adaptés ?

D’une superficie d’au moins 120.000 m2, le site « pouvait accueillir jusqu’à 300.000 personnes (et) il n’était pas plein », a assuré M. Rabe, contredisant là encore des témoignages et l’avis du premier syndicaliste policier du pays, Rainer Wendt, originaire de Duisbourg.

« Je ne peux pas confirmer le chiffre de 1,4 million » de personnes avancé par les organisateurs, a déclaré pour sa part M. von Schmeling.
Pour l’instant, le seul chiffre fiable est celui des arrivées en train à Duisbourg, entre 9H00 et 14H00 locales, soit 105.000 passagers, a ajouté le policier.

Quand a été ouvert une voie de secours ? Une deuxième voie d’accès a été ouverte peu avant la tragédie, qui s’est déroulée vers 15H00 GMT, selon le directeur adjoint de la police. Mais jusqu’à 14H00 GMT, un seul chemin menait et partait du site en traversant le tunnel, a-t-il ajouté.

Le parquet a ouvert dès samedi une enquête judiciaire à partir de deux plaintes, a dit M. von Schmeling. C’est désormais la justice qui devra répondre aux questions, selon les organisateurs.

L’alsace.fr / 25 juillet 2010


Nous soutenir

C’est grâce à votre soutien que nous pouvons vous accompagner dans l’ensemble de vos démarches, faire évoluer la prise en charge des victimes par une mobilisation collective, et poursuivre nos actions de défense des droits des victimes de catastrophes et d’attentats.

Soutenir la FENVAC

Ils financent notre action au service des victimes