la FENVAC à la 33ème Conférence de l’OACI

Du 20 avril au 2 mai s’est tenue à Montréal la 33ème Conférence Diplomatique de l’OACI, agence de l’ONU chargée de l’organisation de l’aviation civile dans le monde.

Les représentants de plus de 90 pays des cinq continents et 16 organisations internationales se sont retrouvés pour discuter de deux projets de conventions (une pour acte illicite, une autre pour risques généraux) visant à moderniser la Convention de Rome de 1952 qui organise l’indemnisation des victimes au sol suite à un crash aérien.

Cette réflexion a été initiée aux lendemains des attentats du 11 septembre, la crainte étant des dommages aux personnes et aux biens dépassant les garanties offertes par les assureurs.

A l’invitation de l’ACVFG (Association américaine des victimes d’accidents aériens présidée par M. Hans Ephraimson-Abt) qui l’a intégré dans sa délégation, la FENVAC a pu pendant une semaine siéger dans cette assemblée en qualité d’observateur au même titre par exemple que l’AWG (groupe des constructeurs), IATA (groupement des compagnies aériennes), ULLBA (assureurs) ou bien encore la Commission Européenne, et faire à ce titre plusieurs observations en séance sur des dispositions jugées contraires à l’intérêt des victimes.

La FENVAC a été tout particulièrement sensible aux positions exprimées notamment par les délégations françaises et allemandes au danger pour la sécurité à prévoir des systèmes dérogatoires d’indemnisation exonérant ipso facto de toute responsabilité les autres acteurs du monde de l’aérien pour canaliser cette responsabilité sur les seules compagnies aériennes.

La délégation des familles de victimes est également très réticente à l’idée de créer un mécanisme d’indemnisation avec un fonds alimenté par un prélèvement sur les billets d’avion, alors même qu’il nous semble possible d’envisager notamment une couverture par les compagnies d’assurances bien au-delà des montants mentionnés dans ces projets.

Notre position finale a fait l’objet d’une communication lue en assemblée le dernier jour par Guillaume Denoix de St Marc, président de la toute nouvelle Association française des victimes du terrorisme, qui a pris le relais de la FENVAC la 2ème semaine des débats.

Allocution finale de Guillaume au nom des familles de victimes

Madame la Présidente, Honorables Déléguées, Mesdames et Messieurs

Nous vous remercions les efforts de tous et votre sollicitude pour les futures victimes.

Je m’appelle Guillaume Denoix de Saint Marc, de l’Association française des Victimes du Terrorisme. J’ai perdu mon père Jean-Henri Denoix de Saint Marc qui était l’une des 170 victimes, de 18 nationalités – africaines, européennes, nord et sud-américaines – de l’attentat contre le DC10 d’UTA, vol UT772, le 19 septembre 1989, au dessus du Niger. Cet évènement a eu lieu dix mois après l’attentat contre le PANAM 103 au dessus de l’Écosse, le 21 décembre 1988. 440 passagers, membres d’équipage et personnes au sol ont péri du fait de ces deux tragédies aériennes.

Je suis probablement la seule personne dans cette auguste assemblée à pouvoir me prétendre et ayant l’expérience d’une négociation directe pour obtenir des compensations, puis procéder à la répartition, suite à un évènement impliquant un avion civil.
Autant de sujets pour lesquels l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale c’est fortement impliquée ces huit dernières années.

Aujourd’hui, je représente, ici, l’Air Crash Victims Families Group (ACVFG) dont vous connaissez tous le Président et Porte-parole emblématique, Hans Ephraimson-Abt.
Pour des raisons de santé, il ne peut pas se joindre à cette Conférence Diplomatique.
Il vous salue et vous exprime ses regrets de ne pas pouvoir être parmi nous aujourd’hui.

L’ACVFG est une fédération internationale, autofinancée, d’associations autour du globe de familles de victimes et de survivants de tragédies aériennes.
Durant les 26 dernières années nous avons participé en tant que conseillers ou observateurs aux réunions et groupes de travail de l’OACI, participant, entre-autres, à la Convention 1999 de Montréal pour le XXIème siècle.

Les familles de victimes, qui ont patiemment, avec dévouement et humilité, participé à cette entreprise collective veulent vous faire part de leurs appréciation des efforts communs en vue de moderniser la vielle Convention de Rome de 1952.

Durant les dernières années vous avez régulièrement que notre présence et participation dans cette tentative – plus particulièrement nos nombreuses interventions – étaient un appel à votre conscience.
A l’heure du bilan, il semble que nous ayons aussi été votre Cassandre, dont les avis d’hier et d’aujourd’hui ont plutôt été ignorés.

Vous parlez constamment de « l’intérêt des victimes » durant vos délibérations sur la modernisation des conventions. Nous nous demandons combien de nos collègues, au fond de la salle, ont agi pour leurs propres intérêts … et semblent avoir réussi.

Après une longue et périlleuse Odyssée – qui a duré 8 ans – nous avons presque fini notre trajet commun.

Nous sommes très déçus par les Conventions présentées aujourd’hui. Elles semblent comporter des reculs par rapport aux avancées obtenues unanimement dans la Convention de Montréal en 1999 à laquelle nous avions participé.

Dans leur rédaction actuelle, ces Conventions ne pourront pas être ratifiés par les Etats les plus importants, puisque les lois de ces pays octroient déjà à leurs citoyens des droits spécifiques et des protections que ces deux conventions supprimeraient.
En bonne conscience, les représentations élues de ces pays ne pourront pas ou ne voudront jamais ratifier ces deux conventions.

Nous voudrions attirer l’attention de cette honorable assistance sur certaines dispositions qui nous semblent, sur un plan pratique, être la source d’énormes difficultés et de conflits potentiels entre les futures victimes, l’industrie aéronautique et les Etats, manquant ainsi le principal objectif de nos travaux.

Pour avoir vécu et géré de telles situations, nous constatons que le vers et dans le fruit et nos associations ne peuvent soutenir les conventions telles qu’elles sont rédigées auprès de nos Etats respectifs.

Il est triste de le constater, mais nous prenons le chemin des échecs de Rome I et Rome II.
C’est d’autant plus regrettable que nous nous sommes rencontrés il y a dix ans, quand nous avons donné un nouveau souffle à la Convention de Varsovie, vielle de 70 ans, lors de la Convention 1999 de Montréal pour le XXIème siècle.

Nous n’aurions pas dû renoncer à faire un dernier effort, comme nous l’avions demandé, pour reproduire le succès de Varsovie – Montréal.

Au nom de toutes les victimes d’attentats ou d’accidents aériens de part le monde, nous vous remercions, Madame la Présidente, Honorables Délégués, Mesdames et Messieurs, pour votre dévouement, votre intérêt, et, nous l’espérons, votre soutien.


L’ensemble de la documentation de la Conférence

Le communiqué final de l’OACI


Crédit photos : Plus d’infos ... L’OACI sur Wikipédia Statistiques OACI 2008 sur la sécurité et la sûreté Les conventions internationales sur le transport aérien de passagers

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