La délicate ouverture des boîtes noires de l’AF447

La catastrophe aérienne du vol Rio-Paris avait coûté la vie à 228 personnes il y a bientôt deux ans.

De manière très officielle, en présence de la justice, de la gendarmerie et des enquêteurs techniques et judiciaires, les deux enregistreurs de vol de l’AF447 Rio-Paris sont arrivés au BEA, dont les laboratoires sont installés au Bourget. Christophe Menez, directeur du département technique du BEA, a expliqué comment ses collaborateurs allaient procéder dans les heures qui viennent. On saura si les mémoires sont lisibles au début de la semaine prochaine. L’opération est réalisée en permanence en présence d’officiers de police judiciaire avec une traçabilité importante. Pour cela, certaines séquences sont enregistrées en vidéo.

Présentés ce matin à la presse, les deux enregistreurs de vol sont en bon état physique apparent. Les appareils ont été transportés depuis le navire qui les a récupérés au milieu de l’océan Atlantique dans des bacs d’eau douce, plus précisément déminéralisée qui évite au phénomène de corrosion de se développer. Les mémoires informatiques sont contenues dans des cylindres étanches à l’abri des chocs et du feu. "Ces mémoires fixées sur une carte électronique sont analogues aux mémoires flash d’une clé USB. Nous devons donc prendre beaucoup de précautions vis-à-vis des décharges électrostatiques en les maniant", avertit Christophe Menez.

Lecture des données

La chronologie des opérations est la suivante, semblable pour les deux enregistreurs (données et vocal) :

- L’ouverture du module, de la taille d’une grosse cannette de boisson, prendra quelques heures.

- La carte-mémoire est enrobée dans une couche de protection ignifugée qui doit être retirée. La carte, après nettoyage du vernis et des éventuels dépôts de sel, est séchée dans une étuve au minimum douze heures pour évaporer toute trace d’eau.

- À la loupe et même au microscope est examiné l’état physique de la mémoire, puis des tests électriques de résistance sont effectués. C’est seulement à ce stade qu’intervient la lecture des données. Celles-ci sont immédiatement copiées sur le réseau sécurisé du BEA et sur une autre carte semblable qui sera l’outil de travail. L’original restera sous scellés. Compter une bonne journée.

Les recherches en mer se poursuivent

La durée des opérations peut donc atteindre trois jours ou être indéfinissable s’il y a des difficultés de lecture. Il pourrait alors être fait appel aux ingénieurs d’Honeywell, constructeur des enregistreurs, pour les décrypter. "Nous sommes relativement confiants, ajoute Jean-Paul Troadec, directeur du BEA, mais attendons trois jours, et nous pourrions changer d’avis."

La semaine prochaine pourrait donc démarrer le travail d’analyse, dont la durée ne se compte pas en jours mais en semaines ou en mois. L’objectif du BEA est de sortir un rapport final début 2012 avec des recommandations concernant la sécurité des vols.

De son côté, l’enquête judiciaire, qui, elle, recherche des responsables, va utiliser les mêmes sources des enregistreurs de vol comme des pièces repêchées (moteur, avionique, 60 calculateurs, cockpit) qui seront ramenées en France et conservées au CEAT à Toulouse. En mer, les recherches se poursuivent pendant encore deux semaines. Parmi les pièces à retrouver figurent notamment les trois sondes Pitot, dont on sait que la défaillance est intervenue au début de la séquence infernale d’alarmes générées par le système de l’A330.

Par THIERRY VIGOUREUX - Le Point.fr - Publié le 12 mai 2011.


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