L’enquête sur le vol Rio-Paris suscite des tensions

PARIS (Reuters) - Des tensions sont apparues entre Air France et Airbus, les spéculations prenant de l’ampleur sur la cause de l’accident du vol AF447 Rio-Paris en juin 2009 avec la lecture des boîtes noires de l’appareil.

Les deux entreprises, mises en examen en mars pour homicides et blessures involontaires dans l’enquête sur cette catastrophe qui a fait 228 morts, ont démenti tout désaccord. Les éléments de preuve déterminants issus des deux boîtes noires repêchées au début mai ne devraient pas être connus avant l’été.

"Attendons quelques semaines que les experts nous délivrent un message cohérent avant de partir sur des supputations dans un sens ou dans un autre", a dit jeudi le directeur général d’Air France-KLM Pierre-Henri Gourgeon, à l’occasion de la présentation des comptes annuels du groupe, écartant les questions sur son avenir à la tête de la compagnie aérienne.

Il a souligné qu’il n’était pas encore possible de déterminer les responsabilités dans l’accident du vol Rio-Paris, et qu’un crash était le fruit de la combinaison de divers éléments.

S’adressant ensuite à un collaborateur après la conférence, il a eu ces propos, enregistrés au passage par un micro et relayés à des journalistes : "La manière dont j’ai répondu est un peu impolie, mais je suis obligé à cause d’Airbus."

AUCUNE RECOMMANDATION D’AIRBUS

Le Figaro écrivait mardi que les premiers éléments mettaient Airbus hors de cause et orientaient les enquêteurs vers une responsabilité du seul équipage d’Air France ou des procédures de sécurité imposées par la compagnie.

Dans une note obtenue par Reuters, Airbus dit n’avoir transmis dans l’immédiat aucune recommandation de sécurité aux compagnies utilisant l’A330 à la suite de l’analyse préliminaire des boîtes noires.

"Ce n’est pas très ’fair play’", a commenté une source proche du dossier, en ajoutant que cette manière de procéder avait rompu une convention.

Une porte-parole d’Air France a démenti tout désaccord avec Airbus.

"Notre relation avec Air France est solide. Ils utilisent tous nos produits, dont quelque 180 avions. Avec Air France, nous avons partagé les coûts des recherches et nous avons intérêt à soutenir l’enquête et à comprendre ce qui a causé la perte tragique du vol 447", a de même déclaré un porte-parole d’Airbus.

Les informations apparemment contradictoires sur l’interprétation des boîtes noires se succèdent dans les médias. Dernière en date, la radio Europe 1 rapportait jeudi qu’il n’y aurait pas eu d’erreur de pilotage dans la trajectoire de l’avion et qu’Air France aurait 90% de chances d’être disculpée.

Interrogé par Reuters, le Bureau d’enquête et d’analyses (BEA), chargé de l’examen des boîtes noires, n’a souhaité faire "aucun commentaire" sur cette information.

Pierre-Henri Gourgeon a rappelé jeudi à des journalistes qu’Air France et Airbus avaient pris "un certain nombre d’initiatives" après l’accident.

L’hypothèse d’un problème de sondes de mesure de vitesse du type Pitot, fabriquées par Thales et qui équipaient les A330 et A340, a été avancée comme une cause possible du drame. Les Pitot ont été remplacées par d’autres sondes sur toute la flotte Air France après l’accident.

Les sondes Pitot de l’épave pourraient être remontées plus tard. Ces petits tubes placés à l’avant de l’appareil givraient à haute altitude, ce qui aurait pu perturber le pilotage.

La lecture des boîtes noires a permis de recueillir l’intégralité des données techniques concernant les paramètres du vol et les deux dernières heures de conversations et de bruits dans le cockpit.

Par ailleurs, selon la gendarmerie, l’identification de deux corps retrouvés dans les débris de l’appareil et remontés à la surface est possible grâce à l’exploitation de leur ADN.

Le renouvellement du mandat de Pierre-Henri Gourgeon pour quatre années supplémentaires a été entériné mercredi soir par le conseil d’administration d’Air France-KLM, mais doit être soumis au vote des actionnaires lors de l’assemblée générale prévue le 7 juillet.

par Tim Hepher et Cyril Altmeyer - Edité par Dominique Rodriguez - Le Point.fr - Publié le 19 mai 2011.


Nous soutenir

C’est grâce à votre soutien que nous pouvons vous accompagner dans l’ensemble de vos démarches, faire évoluer la prise en charge des victimes par une mobilisation collective, et poursuivre nos actions de défense des droits des victimes de catastrophes et d’attentats.

Soutenir la FENVAC

Ils financent notre action au service des victimes