Karachi : le Conseil constitutionnel se prononcera sur le secret-défense

La Cour de cassation a décidé mercredi 31 août de demander au Conseil constitutionnel de se prononcer sur les conditions d’application du secret-défense dans les enquêtes judiciaires, suivant une requête des familles des victimes de l’attentat de 2002 à Karachi.

Échaudées par le refus opposé par les autorités à des demandes de déclassification de documents ainsi qu’à une demande de perquisition, ces familles affirment que plusieurs articles de loi méconnaissent leur droit à un procès équitable et contredisent le principe de séparation des pouvoirs.

La chambre criminelle de la Cour de cassation les a suivies mercredi en donnant son feu vert à la transmission de l’intégralité de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) qu’elles avaient déposée, a-t-on appris de source judiciaire.

La chambre criminelle de la Cour devait décider si les faits présentés par cette QPC sont nouveaux et sérieux. Lors de cette audience, le parquet général avait recommandé la transmission au Conseil constitutionnel d’un article du code de la défense et d’un article du code de procédure pénale, mais a estimé que plusieurs articles du code pénal mis en cause par les familles ne devaient pas l’être.

"C’est une nouvelle victoire importante dans la perspective d’une modification de la loi sur le secret-défense, d’autant plus que la Cour de cassation est allée au-delà de l’avis du parquet général et a suivi notre argumentation en transmettant l’intégralité de la QPC", s’est félicité auprès de l’AFP un des avocats des familles, Me Olivier Morice.

L’OMBRE DES RÉTROCOMISSIONS

Les "sages" ont désormais trois mois pour répondre à cette QPC et demander éventuellement aux autorités une modification des textes.

Les familles des victimes de l’attentat de Karachi, qui avait fait 15 morts, dont 11 salariés français de la Direction des constructions navales le 8 mai 2002, contestaient notamment la loi du 29 juillet 2009, qui a étendu le secret-défense – concernant jusqu’à présent des documents – à une vingtaine de lieux les abritant.

Les familles déplorent que les juges enquêtant sur les différents volets de l’affaire n’aient pu avoir accès à de nombreux documents en vertu de ce secret-défense. Ce motif a en particulier été invoqué en novembre 2010 par le premier ministre, François Fillon, pour refuser au juge Renaud Van Ruymbeke l’autorisation de perquisitionner les locaux de la Direction générale de la sécurité extérieure.

Longtemps tournée vers la thèse d’un attentat-suicide islamiste, l’enquête sur Karachi s’est orientée vers celle d’un attentat en représailles à l’arrêt, décidé par Jacques Chirac en 1995, de versement de commissions liées à des contrats d’armement signés avec le Pakistan en 1994.

La justice s’interroge, dans le volet financier de l’affaire, sur d’éventuelles rétrocommissions qui auraient été destinées au financement de la campagne présidentielle du premier ministre d’alors, Edouard Balladur.

LeMonde.fr avec AFP publié le 31 août 2011.


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