Derrière le deuil, les blessures, le traumatisme, surgit un autre effet du terrorisme : l’impact professionnel. Moins médiatisé, mais lourd de conséquences.
Voilà pourquoi Elisabeth Pelsez, déléguée interministérielle à l’aide aux victimes, et Jean Bassères, directeur général de Pôle Emploi, signent ce vendredi un accord-cadre à Paris.
Objectif : "Accompagner les victimes d’actes de terrorisme dans leur retour à l’emploi". Ce partenariat s’inspire de Nice, où un tel accompagnement a été instauré en juin. Eclairage de Keren Pilibossian, responsable juridique de l’antenne niçoise de l’Association française des victimes du terrorisme (1).
Cet accord répond-il à une demande des associations de victimes ?
Cela correspond, avant tout, à une demande des victimes. Après la principale problématique, médicale et psychologique, puis les démarches administratives et juridiques, la question professionnelle a émergé. Certains ont commencé à réinvestir leur vie, ont eu envie reprendre une activité professionnelle qui fait partie de leur identité. Nous avons sollicité les acteurs de l’emploi dans les Alpes-Maritimes (Pôle Emploi, Direccte...) pour répondre à ces demandes.
À travers quelles actions ?
Aujourd’hui, deux permanences par mois se tiennent à l’espace d’accueil des victimes de l’attentat à Nice. Il n’y en avait qu’une par mois au début. Une chargée d’accompagnement à l’emploi examine la situation de la personne, l’informe sur les structures qu’elle peut solliciter, fait le lien pour qu’un bilan de compétences soit mis en place... On ne lâche pas ces personnes, on les accompagne de bout en bout ! Lors de sa visite à Nice, Mme Pelsez était ravie de ce dispositif, le plus abouti à ce jour. Elle a souhaité l’étendre au territoire national.
À quelles types de situations êtes-vous confrontés ?
Beaucoup de personnes ont été en arrêt-maladie après l’attentat [du 14 juillet 2016, nldr]. Certaines ont perdu tout le bénéfice de voir renouveler leur CDD. D’autres ont démissionné de manière impulsive, négocié des ruptures conventionnelles... Tout cela de manière assez décousue. D’autres encore ont essayé de reprendre leur activité, mais ont réalisé qu’elles n’en étaient plus en capacité. Les difficultés liées à l’emploi sont un réel problème pour la plupart des gens que je reçois.
Les employeurs se sont-ils montrés plutôt compréhensifs ?
Je ne veux pas faire de généralité... Mais nous avons connu beaucoup de situations pas très belles, où des employeurs pleins de compassion au départ ne se montraient plus aussi compatissants, à mesure que les arrêts de travail se succédaient. Or pour les victimes, cela représente un isolement supplémentaire. A travers nos actions, nous essayons de leur dire : “Une autre vie est possible !”
Avez-vous en tête des succès ?
Oui. Je commence à recevoir des messages de personnes qui disent être heureuses aujourd’hui. C’est la plus belle récompense...
Date : 30/11/17
Auteur : C.C.
Source : Nice Matin