Accident de car de Puisseguin en 2015 : l’instruction terminée sans mise en examen

Le 23 octobre 2015, une collision entre un camion et un autocar fit 43 morts à Puisseguin (Gironde), l’un des accidents routiers le plus meurtriers en France. L’enquête s’achemine vers un non-lieu.

L’enquête sur l’accident de Puisseguin (Gironde), l’un des plus meurtriers pour un car avec 43 morts en 2015, s’achemine vers un non-lieu en l’absence de mises en examen, une perspective qu’ont vivement dénoncée les avocats des quelques centaines de parties civiles.

Le 23 octobre 2015, une collision entre un camion et un autocar avait fait 43 morts à Puisseguin, l’accident routier le plus meurtrier en France depuis celui de Beaune (Côte-d’Or) en 1982 (53 morts, pour la plupart des enfants).

Cinq ans après, le juge d’instruction chargé de ce délicat dossier à Libourne (Gironde) a récemment avisé les parties qu’il mettait fin à ses investigations, sans avoir prononcé de mise en examen, a annoncé, mardi 10 mars à l’Agence France-Presse (AFP), le procureur de la République, Olivier Kern.

« On est en train de nous dire, 43 personnes sont mortes et “c’est la faute à pas de chance”. On n’est pas allé au fond des choses », s’est insurgé Marie Mescam, avocate de victimes et de leurs proches. « S’il n’y a pas de mise en examen c’est qu’on s’achemine vers un non-lieu », a-t-elle déploré.

Délai de trois mois

Cette étape procédurale ouvre un délai de trois mois durant lequel les parties et le parquet peuvent faire des observations ou demander des investigations complémentaires, avant les réquisitions du ministère public puis la décision finale du juge d’instruction.

Cette annonce « ne préjuge pas » de la teneur des réquisitions que prendra le parquet, a toutefois souligné le procureur, sans plus de détails. Et pour les victimes, elle ne signe pas non plus la fin de leur long combat judiciaire pour identifier les responsabilités. Elles réclament de nouvelles investigations.
Ce jour-là, sur la D17, le virage serré était connu, limité à 90 km/h, mais sans gros passif accidentogène. Pourtant, vers 7 h 30, un semi-remorque arrivant à 75 km/h s’était déporté sur la gauche au sortir du village et s’était mis en portefeuille avant de percuter un car de retraités partis en excursion, venant en sens inverse.

« S’il n’y avait eu que le choc, il n’y aurait pas de victime », avait assuré à l’époque un rescapé, Raymond Silvestrini. Mais, le car s’était embrasé « en moins de trois minutes », selon un autre survivant. La plupart des victimes étaient membres du club du troisième âge de Petit-Palais-et-Cornemps, une petite commune voisine. Les passagers furent piégés dans le car et moururent brûlés vifs ou asphyxiés.

Normes de constructions des autocars

En 2017, le bureau d’enquêtes sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT) avait préconisé de renforcer les normes de construction des autocars, notamment la tenue des matériaux au feu. Dans son rapport, il attribuait la cause directe de l’accident à une perte de contrôle du poids-lourd entré en collision avec l’autocar.

Il soulignait que le camion était équipé d’un réservoir supplémentaire de gazole non homologué et que les dispositifs de sortie de secours et de désenfumage du car étaient difficiles à actionner. « Nous comptions sur une dernière expertise, celle du réservoir additionnel » du camion, mais celui-ci n’a pas été mis en cause, a expliqué Michel Vigier, président du collectif des victimes de Puisseguin.

« Les parties civiles ne veulent qu’une chose, c’est que ce type d’accident ne se reproduise pas. On voit qu’il y a d’autres cars qui sont sujets à des incendies, à des accidents, il y en a beaucoup (…) On voit bien que les normes qui sont préconisées aujourd’hui par les pouvoirs publics sont insuffisantes », a déclaré Me Antoine Chambolle, qui représente 140 parties civiles.

Il a annoncé avoir transmis une demande au magistrat instructeur pour faire entendre « le ministre des transports, au sujet de normes plus strictes, et le représentant de Mercedes Europe (fabricant du car) concernant l’utilisation de matériaux nocifs (notamment dans l’habitacle avec le dégagement de fumée toxique avec le feu) ». Le juge a un mois pour répondre.

Publié par Le Monde le 10/03/2020

Nous soutenir

C’est grâce à votre soutien que nous pouvons vous accompagner dans l’ensemble de vos démarches, faire évoluer la prise en charge des victimes par une mobilisation collective, et poursuivre nos actions de défense des droits des victimes de catastrophes et d’attentats.

Soutenir la FENVAC

Ils financent notre action au service des victimes