ATTENTAT AVORTE DU THALYS DU 21 AOUT 2015 I RESUME D’UNE PREMIERE SEMAINE SOUS HAUTE TENSION

Ce procès, qui a donc commencé lundi 16 novembre, a connu une première semaine sous haute tension, au sein d’une salle d’audience où se sont mêlées régulièrement friction et agitation entre les diverses parties, avec un besoin constant de connaissance précise et exacte du déroulé des faits, exprimé par tous.

Les deux premiers jours étaient consacrés à l’examen de personnalité des 4 accusés renvoyés devant la Cour d’assises spécialement composée :
Ayoub EL KHAZZANI, principal accusé dans cette affaire pour avoir tenté de commettre un attentat à bord du train Thalys reliant Amsterdam à Paris le 21 août 2015. Après une enfance au Maroc, il rejoint l’Espagne au titre du regroupement familial. C’est après avoir vu des images de populations civiles bombardées par les États-Unis et l’armée de BACHAR EL-ASSAD qu’il dit s’être senti sensible à cette situation qu’il voyait comme une injustice, et que seul l’Etat Islamique, qu’il voyait comme une sorte de « Robin des Bois », pouvait combattre. Il partira en Syrie au mois de mai 2015.
Redouane EL AMRANI EZZERRIFI, lui, quitte le Maroc pour l’Europe en 2015. Il a rencontré ABDELHAMID ABAAOUD, terroriste djihadiste et organisateur des attentats du 13 novembre 2015, en Turquie où il a logé au même endroit avec d’autres migrants, puis a effectué un voyage entre la Turquie et la Grèce dans le même bateau.
BILAL CHATRA est un jeune algérien âgé de 24 ans se décrivant comme étant « un enfant des rues ». Il quitte l’Algérie à 18 ans afin de « découvrir le monde ». Il arrive en Turquie, à Istanbul où il devient passeur. Il y rencontre lui aussi ABDELHAMID ABAAOUD qui le prend sous son aile. Il partira en Syrie pendant 5 mois puis prendra « la route des Balkans » afin d’ouvrir le chemin à ABDELHAMID ABAAOUD en vue de la préparation des attentats du 13 novembre 2015. Il a déclaré à la Cour que son rôle s’était néanmoins arrêté là.
MOHAMED BAKKALI, un belge de 33 ans, est présenté comme le logisticien présumé des attentats du 13 novembre. Il conteste toutes les accusations à son égard. S’il reconnaît avoir eu une conception « littéraliste » de l’islam, il affirme en revanche avoir toujours rejeté sectarisme et violence.

Les jours 3 et 4 ont été l’occasion d’auditionner deux commissaires de police de la Sous-direction antiterroriste (SDAT), afin de revenir de façon précise sur le déroulé exact des faits. Ce récit fût l’objet d’âpres discussions entre l’avocat d’AYOUB EL KHAZZANI, Me Sarah MAUGER-POLIAK, les deux avocats généraux et le Président. Tous cherchent à comprendre comment s’est exactement produit cette tentative d’attentat, dans lequel deux personnes ont été blessées alors que plus de 300 passagers étaient à bords du train.
Les passagers du train, primo-intervenants face au danger, se sont succédés à la barre. Tous décrivent le regard sombre, noir et déterminé de cet homme, Ayoub EL KHAZZANI, sorti torse nu des toilettes du Thalys, l’arme pendante devant lui.
Une certitude se dégage : la catastrophe n’a été évitée que de justesse, et si chacun n’avait pas agi tel que cela s’est déroulé, le drame aurait peut-être eu lieu. Du banquier qui a immédiatement tenté d’arrêter l’assaillant, au guitariste s’emparant de l’arme, en passant par le contrôleur qui s’est interposé dans ce qu’il pensait être une rixe entre voyageurs, à l’intervention de trois amis américains en voyage en Europe, dont deux bénéficiaient d’une expérience militaire, le pire a été évité.

Le jour 5 a ensuite laissé place à l’audition de certains passagers du train, dont l’un des 3 passagers américains, ALEKSANDER SKARLATOS, ainsi que CHRIS NORMAN, britannique, qui ont décrit avec précision la violence des faits.
ALEKSANDER SKARLATOS fut le premier à porter assistance à son ami Spencer STONE dans un combat acharné à mains nues qui l’opposait au terroriste. Ce dernier a successivement tenté de tirer une balle dans la tête de Spencer STONE avec la kalachnikov, puis avec son pistolet semi-automatique, avant qu’il ne lui soit arraché des mains par ALEKSANDER SKARLATOS.
Dans sa détermination de reprendre le contrôle de la situation, le terroriste s’est ensuite saisi d’un cutter en sa possession et a lacéré le cou et le bras de Spencer STONE. En réaction, le jeune américain a projeté Ayoub EL KHAZZANI avec ses jambes de l’autre côté du wagon. C’est à ce moment-là que le troisième ami, ANTHONY SADLER, a porté assistance à ses amis d’enfance en frappant de toutes ses forces le terroriste. Le trio s’est mis à tabasser l’individu jusqu’à ce que Spencer STONE écrase sa tête contre une table et que ALEKSANDER SKARLATOS tente à deux reprises de l’exécuter d’une balle dans la tête avec le pistolet semi-automatique. Le pistolet n’étant pas chargé, ALEKSANDER SKARLATOS s’est résolu à frapper Ayoub EL KHAZZANI avec le canon de la kalachnikov, tandis que Spencer STONE lui faisait une clé d’étranglement, menant à l’évanouissement du terroriste. ALEKSANDER SKARLATOS a alors remis en état de fonctionnement l’AK47 et a fait le tour du train pour vérifier qu’il n’y avait pas de complice. Pendant ce temps-là, CHRIS NORMAN, le passager britannique auditionné ; et un agent du Thalys, conducteur de réserve, ont bâillonné le terroriste à l’aide de cravates.

SPENCER STONE a également porté assistance à MARC MOOGALIAN, blessé par balle au niveau du cou par le terroriste avec un PSA alors qu’il tentait de fuir avec la kalachnikov ; initialement arrachée des mains du terroriste par Damien A.

En réponse à ces témoignages, l’avocate d’Ayoub EL KHAZZANI, Me Sarah MAUGER - POLIAK, a pointé du doigt les liens supposés d’ALEKSANDER SKARLATOS avec l’extrême droite américaine, en produisant des articles de presse détaillant ses engagements politiques. Elle a également insisté sur le fait qu’ALEKSANDER SKARLATOS est un « professionnel de la communication », ancien candidat au congrès américain et acteur hollywoodien, puisqu’il a joué son propre rôle dans un film produit par Clint Eastwood. Derrière cet argumentaire se cacherait l’idée, selon l’avocate, d’un récit édulcoré dressé par les américains dans leur intérêt, et non au service de la vérité. L’avocate a également fourni un témoignage d’un passager, déclarant que ALEKSANDER SKARLATOS a tenté de tirer dans la tête d’AYOUB EL KHAZZANI alors que celui-ci était déjà à terre ; Déclarations que ALEKSANDER SKARLATOS nie en bloc et qui ne sont corroborées par aucun autre élément dans le dossier.
Me MAUGER-POLIAK a indiqué que "contrairement aux Etats-Unis, il n’y a pas la loi du talion en France ; ce qu’aurait tendance à oublier les membres du Ministère public », qui ont alors bondi de leurs chaises en qualifiant ces propos d’intolérables et demandant alors une suspension d’audience. Les Avocats Généraux se sont alors retirés avec la Cour et les avocats de la défense ont tous été convoqués pour discuter des derniers échanges dans le bureau du Président.
Me Thibault DE MONTBRIAL, avocat d’ALEKSANDER SKARLATOS, lui, mentionne une scène de légitime défense devant un terroriste qui résistait et qui avait déjà tiré un coup de feu sur un autre passager, à savoir MARC MOOGALIAN.

ALEKSANDER SKARLATOS a déclaré qu’ils étaient censés mourir ce jour-là, et qu’il considère la date du 21 août 2015 comme une deuxième naissance. Il a expliqué refaire des cauchemars de temps en temps, tout comme le conducteur de réserve, qui a indiqué avoir rencontré de grandes difficultés dans sa vie personnelle dues à des pertes de moral, de la dépression etc.

Retrouvez ci-joint le compte-rendu de cette première semaine de procès :

Compte-rendu de la 1ère semaine de procès - THALYS

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