PROCÈS DE LA CATASTROPHE DE BRÉTIGNY : LA PAROLE ENFIN DONNÉE AUX VICTIMES DE L’ACCIDENT DE TRAIN

Il aura fallu attendre la sixième semaine du procès pour qu’elles puissent prendre la parole. Une quarantaine de rescapés, blessés, proches des sept victimes décédées ou représentants de syndicats ferroviaires vont témoigner devant le tribunal d’Evry au procès de la catastrophe ferroviaire de Brétigny-sur-Orge. Les faits remonte au 12 juillet 2013, mais les scènes d’horreur qu’elles ont vécues ont toujours aujourd’hui des conséquences prégnantes sur leur vie.

En tout, 435 victimes ont été identifiées et parmi elles, 184, dont 9 personnes morales, se sont portées parties civiles et seulement moins d’un quart ont décidé de témoigner. « C’est le parcours du combattant pour les victimes », a regretté Jean-Luc Marissal, le vice-président de l’association des victimes de Brétigny (EDVCB). « Beaucoup de personnes ont abandonné car elles n’avaient pas de soutiens, elles n’avaient pas la force, et je les comprends », a-t-il ajouté.

Dominique réapprend à entrer dans une gare
Jean-Luc Marissal est le premier à avoir pris la parole, après cinq semaines d’audiences techniques où le tribunal a essayé de comprendre si le train Intercités Paris-Limoges a déraillé en gare de Brétigny-sur-Orge le 12 juillet 2013 à cause d’un problème de maintenance du réseau ou en raison d’un défaut indécelable de l’acier.

Avant de s’exprimer sur son cas personnel, Jean-Luc Marissal a lu au tribunal le témoignage d’une sexagénaire, Dominique D., toujours trop bouleversée pour pouvoir se rendre au procès. Encore marquée physiquement et psychologiquement, elle essaie de se reconstruire et « travaille depuis deux mois à rentrer dans la gare, aller sur les quais, sans train puis avec train », malgré les « fourmis dans les jambes » au moment de l’arrivée de la locomotive. Neuf ans après, elle s’interroge toujours : « Pourquoi eux et pas nous ? » en pensant aux morts.

Philippe prend des somnifères dans le train
D’âges, parcours ou professions différents, la douzaine de parties civiles qui se sont exprimées mardi ont en commun un même traumatisme et une peur des trains qui persiste. Un des blessés, Philippe G., a expliqué dorénavant voyager très tôt pour dormir dans le wagon. Quand cela n’est pas possible, il prend des somnifères. « Mais je me réveille toujours en sursaut quand je passe à un aiguillage », a-t-il précisé. C’est sur un tel appareil de voie qu’une éclisse, sorte d’agrafe métallique, s’est retournée, provoquant la catastrophe le 12 juillet 2013.

Quand il vient à Paris, cet homme prend la voiture. « J’ai tout faux, je le sais », a-t-il reconnu, conscient des risques d’accident automobile. « Mais j’ai plus confiance en moi et en ma conduite qu’en la SNCF ».

Nathalie ne reprend toujours pas le train
Nathalie M., enseignante, aurait dû prendre le train précédent. En retard, elle est finalement montée dans l’Intercités Paris-Limoges 3657, qui a quitté la gare d’Austerlitz à 16h53 avant de dérailler à 17h11 à Brétigny-sur-Orge, dans l’Essonne. « Je me suis dit "c’est pas grave c’est les vacances, j’ai un billet échangeable, il n’y a pas mort d’homme" », a-t-elle expliqué, des trémolos dans la voix.

Quand elle se lève pour se rendre aux toilettes, elle sent « de grosses secousses ». Elle se retrouve « ballottée, cognée ». Très vite, « des gens sont venus pour nous aider à sortir, ils nous ont dit de ne pas regarder par terre ». A ce jour, Nathalie M. ne reprend toujours pas le train. « Mais la voiture c’est pas toujours pratique, surtout sur Paris », sourit-elle.

Crédit photos : Date : 31 mai 2022 Auteur : M.F avec AFP Source : 20minutes.fr

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