Le 15 novembre 2007, l’A340-600 percute le mur antibruit de l’aéroport lors d’essais au sol.
Le contenu du rapport d’enquête dont nous avons pris connaissance (près de 1 000 pages détaillées) est sans ambiguïté : des procédures obligatoires n’ont pas été respectées. Un an après le crash de l’Airbus A340-600 qui a percuté le 15 novembre 2007 un mur antibruit lors d’essais au sol sur une piste réservée à l’aéroport de Toulouse-Blagnac, faisant trois blessés dans le cockpit, l’enquête pointe une série de négligences. Bouclées par les enquêteurs du bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA), les conclusions des investigations menées par la gendarmerie des transports aériens sont aujourd’hui entre les mains du parquet qui pourrait dans les prochaines semaines engager des poursuites contre Airbus.
En attendant, c’est bien la conjonction de deux facteurs importants qui sont à l’origine du crash de l’A340 destiné à la compagnie Etihad. Lors des essais au sol sur cet appareil en cours de livraison, l’enquête révèle « l’absence de deux cales » sous les trains de pneus de l’avion. Les pilotes en charge de ces essais sur la zone Bikini de l’aéroport se seraient donc « affranchis » de l’obligation de « caler l’avion », obligation pourtant inscrite dans le process d’Airbus. Second dysfonctionnement, la poussée simultanée des quatre réacteurs. Ces derniers, selon le BEA, ont atteint une puissance non conforme. Ce qui a entraîné le ripage violent de l’appareil qui a fini sa course contre le mur antibruit. Là aussi, il apparaît bien que le protocole n’a pas été scrupuleusement respecté. En revanche, l’A340-600 est mis hors de cause « sur le plan technique. »
Ces conclusions ont conduit Airbus à mettre en place de nouvelles procédures car d’autres essais de ce type, sans calage de l’appareil, « ont pu être effectués par le passé », confie une source du dossier. À la suite de cette affaire, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Lors de l’accident, sept techniciens de la société émiratie Abu Dhabi Aircraft Technologies, une société d’ingénierie et de maintenance mandatée par Etihad Airways et deux d’Airbus effectuaient un point fixe moteur avec l’assistance de deux techniciens de piste. L’épave de l’appareil est toujours remisée dans un hangar de l’aéroport.
Le BEA réagit
Interrogé hier, le Bureau d’Enquêtes et d’Analyses (BEA) n’a pas souhaité commenter l’information selon laquelle la procédure des essais moteurs au point fixe n’avait pas été respectée. « Le fait que l’avion n’était pas calé a déjà été annoncé par le BEA le 20 novembre 2007. C’est une circonstance de l’accident qui n’est pas nouvelle. En revanche, c’est à l’enquête de rechercher pourquoi les roues n’étaient pas calées » déclare officiellement le BEA. L’enquête, elle, est désormais bouclée et fait l’objet maintenant de la rédaction du rapport final. Elle a été menée par le BEA et par le BEA Défense. Ce sont les enquêteurs qui avaient suivi le crash de Concorde qui ont été mobilisés.
Chez Airbus, la ligne officielle est de ne pas commenter une enquête du BEA en cours. « Nous avons apporté tout l’appui que le BEA nous a demandé » déclare simplement une porte-parole. Les enquêteurs ont donc été amenés à comparer les process qu’Airbus avait mis en place pour les essais moteurs avec ce qu’il s’est passé le 15 novembre 2007.
La Dépêche du Midi, 21/11/2008