Le professeur qui encadrait un petit groupe de lycéens dont certains sont décédés après avoir été ensevelis sous une avalanche, aux Deux Alpes, mercredi dernier, a été mis en examen ce samedi pour homicides involontaires et placé sous contrôle judiciaire.
« Il reconnaît sa responsabilité, il n’est pas dans le déni. Il ne s’est pas rendu compte du danger car beaucoup de monde avait emprunté cette piste depuis deux jours », a déclaré son avocate, Me Bénédicte Tarayre.
Deux élèves de 16 ans avaient trouvé la mort dans cet accident. Le lendemain de la catastrophe, le procureur avait confirmé que le groupe de lycéens lyonnais scolarisés en 1ère « option sports » avait enjambé le filet qui matérialisait la fermeture de cette piste noire, interdite au public depuis le début de la saison.
Le professeur de 47 ans avait été placé en garde en vue au CHU de Grenoble (Isère) où il était hospitalisé. Le procureur, le juge d’instruction et une greffière se sont rendus à son chevet pour lui signifier sa mise en examen.
L’enquête s’était très vite concentrée sur cet enseignant, sous traitement après un récent séjour en hôpital psychiatrique, ce qui pose la question de sa capacité à encadrer un groupe de jeunes. Les premières auditions de ce prof d’EPS du collège-lycée Saint-Exupéry de Lyon ont délivré de premiers éléments.
Il était sorti en novembre d’un séjour en hôpital psychiatrique et prenait un lourd traitement, notamment des anti-dépresseurs et des stabilisateurs d’humeur. Entendu par les gendarmes au CHU de Grenoble, il a d’ailleurs demandé à retourner à l’hôpital psychiatrique. Mais à l’issue de sa garde à vue ce samedi, il a bien été bien déféré au parquet de Grenoble qui a ouvert une information judiciaire.
La piste fermée déjà descendue la veille
Cet enseignant avait appris à skier en autodidacte et n’avait pas regardé la météo le matin des faits alors que Météo-France annonçait un risque « marqué » d’avalanche (de niveau trois sur une échelle de cinq).
Au moment de s’engager sur la piste noire, fermée par un filet, il a estimé « qu’il pouvait y aller et a dit en garde à vue qu’il n’avait pas vu le danger ». Et ce d’autant plus qu’il avait déjà parcouru, la veille, cette piste pourtant fermée depuis le début de la saison. Certains élèves qu’il accompagnait avaient alors refusé de s’engager.
Comment la responsabilité d’un groupe de lycéens a-t-elle pu être confiée à ce professeur en dépit de son état mental fragile ? L’enquête pourrait se pencher sur les responsabilités de sa hiérarchie et de l’établissement scolaire.
Cette avalanche qui a tué un touriste ukrainien outre les deux lycéens lyonnais, une fille et un garçon, a suscité un grand émoi à Lyon et dans la communauté éducative. Chaque année, des élèves de la première option sport de l’établissement partaient pour une semaine de ski. Cette fois-ci, 19 élèves composaient le groupe accompagné de trois professeurs d’EPS.
Le responsable du voyage avait interdit la descente
Ils étaient répartis selon leur niveau en ski et les victimes faisaient partie des meilleurs. Mercredi matin, ils avaient déjà émis le souhait de descendre la piste noire fermée mais l’enseignant responsable de la sortie s’y était opposé, selon le procureur de la République à Grenoble, Jean-Yves Coquillat.
L’après-midi, ce professeur était resté à l’hôtel avec une élève blessée et deux autres, fatigués. Le reste du groupe s’était alors divisé en deux : six avec une enseignante et les dix autres avec le professeur en garde à vue. Qui, lui, s’est engagé avec eux sur la piste fatale.
Située dans une combe, beaucoup de neige s’y était accumulé durant la semaine et « la poudre » y était d’autant plus tentante qu’il faisait très beau. De nombreux skieurs avaient d’ailleurs emprunté cette piste dans la journée. Dont un groupe de Hongrois et de Roumains, en amont des lycéens lyonnais, qui pourrait avoir déclenché l’avalanche.
Le ski hors piste étant fortement déconseillé mais pas interdit, comme l’a rappelé jeudi le parquet.