« Que l’on ne vienne pas nous parler de justice compassionnelle. Nous ne voulons pas de la compassion. Si les familles veulent pleurer leurs morts, elles vont au cimetière. Mais si elles viennent au tribunal, c’est pour demander justice… »
Moment intense, hier avec la plaidoirie de Me Stella Bisseuil. Depuis le début de l’affaire, elle est la figure de proue des parties civiles. Et l’équipe qu’elle forme avec le président des Familles endeuillées qu’elle représente, Gérard Ratier, lui a donné une parfaite connaissance du dossier, peut-être même la meilleure. Les parties civiles attendaient ce moment… Elles n’ont pas été déçues.
Pour Stella Bisseuil, l’usine ne se préoccupait pas du circuit des déchets et c’est cette négligence qui a permis que se mettent en place discrètement les conditions de la catastrophe. Mais surtout, elle va revenir sur le rôle trouble de la Commission d’enquête interne :
« Dès le début, la CEI connaissait la piste chimique. En 48 heures, on a compris beaucoup de choses, on a entendu tous les salariés, on savait que la benne en question avait un contenu hétérogène… Mais s’il y a plusieurs produits, il y a problème ! C’est anormal ! »
Elle décortique à partir de la procédure, ce qui laisse à penser selon elle que la CEI a plutôt dispersé un écran de fumée plutôt que d’aller directement voir la police. « Le mensonge, quand il est découvert, devient un outil pour le juge. »
Lorsque Me Bisseuil cesse de plaider, l’émotion silencieuse de la salle d’audience glisse vers une tentative d’applaudissement, vite contenue par le président Brunet.
Pour la CGT, Me Sylvie Topaloff, elle, s’est attaquée avec ardeur aux expertises et aux mystères de la chimie. Selon elle « il est impossible qu’une main malveillante, même un geste de mauvaise humeur puisse être à l’origine de la catastrophe ». Elle va ensuite s’efforcer de démontrer au contraire que tout était réuni pour que l’accident puisse se produire. Une plaidoirie qui a été suivie, avec une attention particulière par… le philosophe Alain Finkielkraut, qui était venu soutenir sa compagne dans ce difficile exercice.
La Dépêche - 7 mars 2012