Crash aérien La Vèze-Besançon : le rapport qui vise le pilote

Chaque fois qu’ils se retrouvent, Marie-Claire et Jean-Pierre Denué et Bruno Ramus, c’est pour évoquer cet événement qui a endeuillé leurs vies, ce crash aérien survenu à La Vèze, le 19 octobre 2006 et qui a coûté la vie à leurs fils, tous deux chirurgiens du CHU de Besançon. Ce soir-là, les deux médecins se rendaient à Amiens pour y prélever un foie en vue d’une greffe hépatique. Leur avion, un Beechcraft C 90 de la compagnie Flowair basée à l’aéroport de Lyon-Bron, s’était écrasé peu après son décollage de l’aérodrome à 22 h 40. Quatre personnes perdaient la vie : les docteurs Pierre-Olivier Denué, chef de clinique, 34 ans, Benjamin Ramus interne, 26 ans, le pilote Barthélemy Maresma, 48 ans, et le copilote Fabien Parot, 35 ans.

Cinq ans et une semaine après ce drame, les familles des victimes et leurs avocats, ont été reçus hier par le juge Julien Retailleau en charge du dossier, au palais de justice de Besançon. Pareille rencontre était d’autant plus primordiale pour eux qu’ils attendaient le rapport d’étape sur l’expertise ordonnée par le juge et dont les conclusions seront connues à la fin de cette année. « Le juge nous a fait part de l’avancement de l’instruction, encore inachevée. On retient que le pilote n’avait pas à être aux commandes de l’appareil. C’est une étape importante, le juge s’est donné les moyens de faire la lumière », souligne Bruno Ramus, président de l’Association des victimes et de l’entourage du crash de Besançon. Prudemment, ce dernier observe que le rapport pointe « l’émergence d’un problème au niveau du recrutement et de la formation du pilote car il y a des procédures réglementaires inhérentes à la qualification de pilote ». En clair, le pilote décédé ne possédait ni les licences ni les qualifications requises pour commander, ce soir-là, le Beechcraft 90 de Flowair.

Dans son rapport rendu précédemment aux familles, le bureau d’enquêtes et d’analyses pour la sécurité de l’aviation civile n’avait-il pas mis en exergue les insuffisances de l’expérience professionnelle du pilote « et les possibles limites de ses capacités techniques au cours de ce décollage » ?

VERS DES MISES EXAMEN

De son côté, l’avocat des familles et de la FENVAC, ou Fédération nationale des victimes d’accidents collectifs, M e Sébastien Busy, du barreau de Reims, note : « Les investigations vont permettre de mieux comprendre les causes de l’accident et de vérifier les compétences du pilote. Le rapport complet déterminera les responsabilités et peut déboucher sur des mises en examen au premier semestre 2012. Mais je suis habitué à ce type de dossier, le monde aérien est clos, il a ses règles et se protège, la réglementation aérienne est complexe. Là, il faut comprendre pourquoi ce pilote était aux commandes de l’appareil et s’il pouvait y être. Est-ce que, dans le cas présent, les règles de recrutement, formation et contrôle ont été appliquées, que ce soit du côté de la Direction générale de l’aviation civile ou de l’employeur, Flowair ? » Par ailleurs, dans ce dossier, le CHU bisontin, défendu par M e Vincent Braillard, est mis en cause devant le tribunal administratif dans le cadre d’une passation de marché public.

Reste que l’experte nommée est rompue à disséquer ce type d’accident, considérée comme indépendante et ne craignant pas de pointer les fautes et les responsabilités. Les familles souhaitent que ses conclusions provoquent des changements réglementaires, notamment la vérification des titres des pilotes et « que les missions de prélèvement d’organes soient considérées comme missions médicales avec la qualification de vol sanitaire pour les pilotes, comme pour les pilotes d’hélicoptères des SAMU ».

Yves ANDRIKIAN - L’Est Républicain 27 octobre 2010


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