Explosion mortelle rue de Trévise : l’état de la canalisation de gaz mis en cause pour la première fois

INFO LE PARISIEN. Un expert, sollicité cet été, évoque une corrosion du tuyau de gaz qui l’aurait fragilisé. L’entretien du réseau GRDF pose question. L’explosion survenue le 12 janvier 2019 avait fait quatre morts et des dizaines de
blessés.

Le 12 janvier 2019, une violente explosion soufflait les immeubles de la rue de Trévise et ses environs, dans le IXe arrondissement, faisant quatre morts.

Doit-on s’attendre à un rebondissement judiciaire majeur dans l’affaire de l’explosion de la rue de Trévise ? Le rapport d’analyse portant sur la rupture de la canalisation, réclamé cet été par les experts au civil, vient d’être rendu. La conclusion, dont « le Parisien » a eu connaissance, met certes en cause l’affaissement du sous-sol sous la canalisation, mais aussi, et c’est nouveau, l’état de la canalisation de gaz elle-même, qui, en se cassant, a provoqué la
mortelle explosion du 12 janvier 2019. Quatre personnes sont mortes, plus de soixante blessés ont été recensés et des dizaines de riverains n’ont toujours pas regagné leur logement, quatre ans et demi plus tard.
« Contrairement à la conclusion de l’Institut de soudure (qui avait réalisé une première expertise), je me prononce pour une rupture brutale due conjointement à l’affaissement local du sol et à la propagation de fissures générées par les cratères de corrosion », peut-on lire en conclusion du rapport. En clair, le tuyau était rouillé, donc fragilisé.

Jusqu’à ce jour, le scenario privilégié est celui d’un affaissement du sol, sous la canalisation de gaz, qui, ne reposant plus sur rien, se serait rompue. Cet affaissement du sol aurait été provoqué par une fuite d’eau usée au 6, rue de Trévise. Le syndic de l’immeuble, Cipa, est mis en examen pour blessures et homicides involontaires, pour avoir mis trop longtemps à réparer ce collecteur. Quant à la Ville de Paris, elle est mise en examen pour n’avoir pas cherché davantage l’origine de ces affaissements récurrents.

« Les installations de gaz GRDF desservant l’immeuble n’appellent aucune remarque des experts quant au respect des dispositions réglementaires », indiquait le procureur de la République de Paris, Rémy Heitz, dans un communiqué de presse du 30 décembre 2019.

Sauf que dans le volet civil, les experts ont voulu en savoir plus sur
l’état de cette canalisation. Après tout, l’Institut de soudure, faisait
état dans son rapport de juillet 2019, de « facteurs » qui « ont pu
favoriser de façon secondaire la rupture du tube », mention faite de
« corrosion externe ».

Pour explorer ces « facteurs secondaires », les experts ont fait appel à un spécialiste de la mécanique de rupture, professeur émérite à l’université d’Auvergne. Il a eu connaissance de nombreuses pièces du dossier, retracé la chronologie des interventions depuis juin 2015, et passé au crible, sur une vingtaine de pages, plusieurs scenarii, calculs et formules mathématiques à l’appui, pour comprendre l’origine de la rupture de la canalisation.

GRDF rappelle que l’expertise est toujours en cours

« Il apparaît que la section du tube était de nature à pouvoir supporter en flexion les charges appliquées en raison de la perte de portance du remblai », peut-on lire en conclusion. « Le tube a en fait subi une corrosion avancée qui a conduit à générer des entailles significatives, dont la profondeur atteint parfois un tiers de l’épaisseur du tube, voire plus », note le spécialiste, pour qui la rupture est donc due « conjointement à l’affaissement local du sol et
à la propagation des fissures ».

Les différentes parties ont jusqu’au 30 novembre pour formuler des
remarques en retour. Sollicitées par « le Parisien », aucune des
parties n’a souhaité s’exprimer. La prudence est de mise, et GRDF
rappelle que l’expertise est toujours en cours.

« C’est la première fois que c’est aussi clair sur le fait que la canalisation de gaz était fissurée et a aussi participé à l’explosion » réagit Dominique Paris, pour l’association Trévise Ensemble. « J’espère qu’on arrivera à connaître le fin de mot de l’histoire », lâche Linda Zaourar, pour Vret, association de victimes également, hantée
par « l’odeur de gaz, les jours précédant l’explosion ».

Cet article est rédigé par Carole Sterlé pour le Parisien.

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