Justice : fin des juridictions de proximité et création de juridictions spécialisées adoptées au Sénat

PARIS - Le Sénat a adopté jeudi soir, en première lecture, un projet de loi sur la justice qui supprime les juridictions de proximité et étend les procédures simplifiées comme le plaider-coupable ou l’ordonnance pénale, un texte vivement contesté par la gauche.
Ce texte prévoit aussi des mesures sur le divorce et la suppression du tribunal aux armées de Paris.

Seule la majorité UMP et Union Centriste a voté pour le projet de loi "relatif à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles". La gauche PS, CRC-SPG (Communiste et parti de gauche) et RDSE (à majorité radicaux de gauche) a voté contre.

Le projet de loi s’inspire du rapport de l’universitaire Serge Guinchard de juin 2008 qui proposait la déjudiciarisation de certains contentieux et a été rendu nécessaire par la réforme de la carte judiciaire.

Il supprime les juridictions de proximité créées en 2002 et intègre les juges de proximité aux tribunaux d’instance. Selon le rapporteur Yves Détraigne (UC) cette mesure "entraînera le transfert de plus de 100.000 affaires civiles nouvelles chaque année vers les tribunaux d’instance".

Le texte institue plusieurs pôles spécialisés en matière pénale dont l’un spécialisé pour les crimes de guerre, contre l’humanité et de torture et un autre pour les accidents collectifs, comme la catastrophe du Mont St Odile.
Le champ de trois procédures pénales simplifiées est étendu : l’ordonnance pénale, la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (plaider-coupable) et l’amende forfaitaire. Le Sénat a limité l’extension de l’ordonnance pénale jugeant qu’elle ne permettait "à aucun moment à la personne d’être entendue par un magistrat, à moins qu’elle ne fasse opposition", selon Yves Détraigne.

Le texte concerne également le divorce. Le Sénat a profondément modifié le projet du gouvernement en rejetant la dispense de comparution devant le juge pour les couples sans enfant mineur et souhaitant divorcer par consentement mutuel.

Le gouvernement proposait aussi d’expérimenter pendant trois ans l’obligation de recourir à une médiation familiale en cas de modification de modalités d’exercice de l’autorité parentale fixées par décision judiciaire. Le Sénat a voté cette mesure mais en la limitant.

Autre volet important : le texte supprime le Tribunal aux armées de Paris (TAP) compétent pour les faits commis ou subis par des militaires en opération extérieure. Ces compétences sont transférées au TGI de Paris. Des modifications dans la procédure pénale appliquée aux militaires ont été également votées.

"Encore un fourre-tout, l’urgence réelle serait de répondre au cri d’alarme lancé par les professionnels de la justice", s’est exclamé la présidente du groupe CRC-SPG Nicole Borvo Cohen-Seat.

Jean-Pierre Michel (PS) a fustigé l’extension du plaider-coupable à l’ensemble des délits : "procès Chirac, procès Tapie, terminé ! Plus d’audience, plus de publicité !.

"Ce projet de loi est inopportun. S’il est mené dans une discrétion exceptionnelle, il n’en aura pas moins des effets néfastes sur une justice déjà très fragilisée" a asséné Jacques Mezard (RDSE).

"Le gouvernement a fait des efforts à nul autre pareils en matière de moyens. Depuis 2007, le budget de la justice n’a cessé d’augmenter. Le nombre de magistrats, de greffiers a considérablement augmenté et les créations de poste se poursuivent" s’est défendu le ministre de la Justice, Michel Mercier.

Le texte inscrit en urgence (une lecture par Assemblée) doit encore être examiné à l’Assemblée nationale.

Par AFP - L’Express.fr Publié le 15 avril 2011


Nous soutenir

C’est grâce à votre soutien que nous pouvons vous accompagner dans l’ensemble de vos démarches, faire évoluer la prise en charge des victimes par une mobilisation collective, et poursuivre nos actions de défense des droits des victimes de catastrophes et d’attentats.

Soutenir la FENVAC

Ils financent notre action au service des victimes