JUSTICE I CRASH DU VOL AF447 RIO –PARIS : Le tribunal a rendu son délibéré

Près de quatorze ans après le crash du vol AF 447 qui avait coûté la vie à deux cent vingt-huit personnes, le tribunal de Paris a rendu sa décision à l’encontre des sociétés Airbus et Air France. L’heure de vérité pour la centaine de proches de victimes venue écouter le rendu de la justice treize ans après les faits.

L’avionneur Européen et la compagnie Française étaient poursuivis pour homicides involontaires. Le procès, qui s’était déroulé du 10 octobre au 8 décembre 2022, devait permettre de déterminer si les fautes d’Airbus et d’Air France étaient en lien avec l’accident.

La tension était palpable dans la salle du tribunal judiciaire de Paris devant laquelle des dizaines de journalistes attendaient. Les proches, unis, collés les uns aux autres retenaient leur souffle à la lecture du délibéré par la Présidente du Tribunal. Après un temps d’espoir à l’évocation des fautes commises par les entreprises prévenues, c’est le choc à l’annonce de la relaxe. Les familles des victimes présentes, agrégées autour de l’association AF447 Ensemble, semblent abasourdies par la nouvelle qu’elles mettent quelques minutes à appréhender.

En effet, le tribunal a retenu plusieurs imprudences commises par Airbus notamment l’absence de retrofit des sondes pitots présentes sur l’avion, c’est-à-dire le remplacement par des sondes de durabilité supérieure ; l’absence de partage d’expériences par Airbus qui aurait permis aux différentes compagnies d’adopter des pratiques plus adaptées, et d’être préparés aux incidents de givrage ; une procédure inadéquate aux incidents de givrage ; l’absence de message permettant d’informer l’équipage de l’indisponibilité des sondes pitots ayant impacté sur les choix opérés durant la conduite du vol.

Concernant Air France, les juges ont estimé que la compagnie aurait notamment dû envoyer la note d’information dédiée aux pilotes, concernant les incidents sur les sondes pitots dès le premier incident.

Toutefois 3% des incidents de givrage s’étant produits sur des sondes pitots de marque différente, le tribunal a considéré qu’il n’était pas démontré que le changement de sondes aurait empêché le givrage et donc l’accident.
Les juges ont également retenu que les pilotes avaient tous été formés à la procédure d’urgence dans les trois ans précédents le crash, et qu’ils disposaient ainsi d’informations suffisantes à l’époque, sur les incidents de givrage des sondes et sur la connaissance des autres pilotes sur le sujet.

De ce fait, le tribunal a estimé que malgré l’existence de fautes de la part d’Airbus et Air France, il n’était pas démontré que celles-ci étaient en lien direct avec le dommage. Les deux entreprises ont donc été relaxées des charges d’homicides involontaires qui pesaient sur elles.

Le tribunal a ensuite examiné la responsabilité d’Air France et d’Airbus d’un point de vue civil, en examinant spécifiquement la perte de chance de survie des passagers.

Le retrofit des sondes, survenu en août 2009, soit après le crash, a bien permis de faire chuter de manière considérable le nombre d’incidents de givrage sur les sondes pitots. Ainsi le changement des sondes pitots aurait bien permis d’éviter la survenance de l’accident. L’absence de message sur l’indisponibilité des sondes n’a pas permis à l’équipage de confirmer son diagnostic et d’adopter la procédure adéquate pour éviter le crash.

Ainsi l’avionneur Européen et la compagnie Française ont été reconnus civilement responsable du dommage et sont tenus de le réparer.

Bien qu’Airbus et Air France soient reconnus responsable du crash de l’AF447 sur le plan civil visant à réparer le dommage d’un point de vue indemnitaire, ils n’ont pas été reconnus coupable de ce dernier.

Cette décision s’avère incompréhensible pour les proches des victimes qui espéraient beaucoup de ce procès. À la sortie du tribunal, Danièle Lamy la Présidente de l’association Entraide et solidarité AF447 a résumé le ressenti des proches des victimes, « Les familles sont mortifiées, accablées, les mots me manquent ». Par ce jugement, le tribunal a semblé confirmer l’impunité dont bénéficient les deux entreprises, empêchant toute remise en question de la part de ces dernières, alors qu’elles mettent chaque jour en danger la vie des usagers de leur service. La causalité directe étant extrêmement difficile à démontrer dans pareille situation, la culpabilité demeurera inenvisageable pour des acteurs économiques de cette envergure.

Pendant cette épreuve supplémentaire, la FENVAC, constituée partie civile dans cette affaire et représentée par son avocat Maitre Busy, s’est tenue aux côtés des proches des victimes. Elle restera mobilisée afin de les soutenir et les accompagner, à l’heure où ils réfléchissent déjà à toutes les voies de recours envisageables face à ce « crash judiciaire ».

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