JUSTICE I RETOUR SUR LA PREMIÈRE SEMAINE D’AUDIENCE DU PROCÈS EN APPEL DE L’ATTENTAT DÉJOUÉ LORS DE L’EURO 2016 DIT "RÉDA KRIKET"

Les premiers éléments de l’affaire dite "RÉDA KRIKET" ont été communiqués pour la première fois au public en mars 2016 lorsque les enquêteurs de la DGSI ont découvert un arsenal d’armes et d’explosifs dans un appartement loué à Argenteuil par Réda KRIKET, sous une fausse identité. Ce dernier était connu de la justice comme délinquant multirécidiviste et se serait radicalisé en prison. L’ADN d’Abderrahmane AMEROUD, djihadiste connu des services de renseignement, avait été retrouvé sur des armes saisies dans l’appartement. Les investigations ont permis de savoir que la cellule terroriste souhaitait commettre d’un attentat durant l’Euro de football en 2016.

En première instance, le 09 avril 2021, la Cour d’assises de paris avait reconnu coupables de l’infraction d’association de malfaiteurs criminelle terroriste quatre des sept accusés. Réda KRIKET, Abderrahmane AMEROUD ainsi que leurs complices, Anis BAHRI, étaient condamnés à 24 ans de réclusion criminelle. Miloud FEIA, autre accusé, était condamné à 12 ans de réclusion criminelle.

Ce jugement avait fait l’objet d’appels par le parquet et par les accusés. Par conséquent, la Cour d’Assises d’appel spécialement composée devra juger à nouveau cette affaire pendant les cinq prochaines semaines, et devra tenter de répondre aux interrogations restantes quant à la nature, les cibles et le moment des attaques projetées.

Ainsi, ce vendredi 13 mai 2022, s’est ouvert le procès en appel de Réda KRIKET, Anis BAHRI, Abderahmane AMEUROUD, Yasin ALAMI et Sofiane BELOUAFI. Les cinq accusés, était répartis au sein de la salle d’audience. Yasin ALAMI, poursuivi pour une infraction de droit commun, était seul dans un box près des avocates générales du Parquet national antiterroriste tandis que Réda KRIKET, Anis BAHRI et Abderahmane AMEUROUD était assis dans le box en face. Sofiane BELOUAFI, acquitté en première instance, comparaissait libre et était assis auprès de son avocate.

Le début de l’audience a été mis à mal par le retard de Sofiane BELOUAFI ne s’étant présenté devant la Cour d’assises qu’à 11h au lieu de 9h30. Puis, lors de son contrôle de sécurité, les gendarmes ont pu découvrir une petite quantité de stupéfiants. Le Président de la Cour d’assises a donc commencé cette audience par un rappel à l’ordre en prévenant l’accusé que si ce comportement venait à se répéter des dispositions pourraient être prises contre lui.

Après ce premier incident, les accusés se sont présentés rapidement sur indication du Président puis il en a été de même pour les parties civiles qui étaient au nombre de trois : la FENVAC, l’AfVT et Mme Murielle HADOK (propriétaire de l’appartement conspiratif). Après avoir fait un rappel des faits, de l’enquête et de la procédure de première instance, le Président a donné la parole aux accusés concernant, notamment, leurs attentes vis-à-vis du procès.

Sofiane BELOUAFI, acquitté en première instance, a expliqué ne rien à voir avec cette histoire et avoir été satisfait de l’arrêt rendu en première instance. Puis, Yasin ALAMI a déclaré ne rien avoir à dire pour l’instant tandis que Réda KRIKET a saisi l’occasion pour tenter de reprendre le Président sur l’état de la procédure qu’il venait de décrire. Quant à lui, Anis BAHRI a expliqué espérer que la lumière soit faite sur ce qui lui est reproché et qu’il a la même appréhension qu’au procès de première instance. Enfin Abderahmane AMEUROUD a souhaité utiliser ce temps de parole pour revenir sur une déclaration qu’il aurait faite à l’ouverture du procès de première instance et qui lui a été imputée dans l’arrêt de la Cour. En effet, il aurait déclaré ne se soumettre qu’à la loi de Dieu, ce que ce dernier conteste expliquant qu’il ne comparaîtrait pas devant la Cour si tel était le cas.

Dès l’après-midi de la première journée d’audience, l’avocat d’Abderahmane AMEUROUD a versé au débat les comptes rendus d’audience réalisés par la FENVAC et l’AfVT lors du procès en première instance démontrant que son client n’a jamais tenu les propos qui lui sont imputés. Puis le premier témoin cité par la Cour a été auditionné. Il s’agit de l’enquêtrice de personnalité intervenue pour Réda KRIKET. Elle est revenue rapidement sur son enfance perturbée due à une délinquance dès le plus jeune âge et des parents qui ont tenté de l’envoyer en Algérie pour lui faire changer de comportement. Suite à cela, Réda KRIKET aurait développé une réelle obsession pour l’argent et a vécu seul tandis que ses parents ont déménagé à Avignon. Sa scolarité s’est arrêtée au collège et il n’a eu aucun emploi fixe hormis quelques expériences sommaires.

Pendant l’entretien de personnalité, il aurait évoqué deux relations sentimentales importantes. La relation avec sa première compagne a duré de 2005 à 2009 mais s’est terminée due à la violence de sa compagne sur Réda KRIKET qui serait due à une consommation de cocaïne. Un enfant est né de cette union, il vit actuellement avec sa grand-mère. Il a eu une deuxième relation de 2009 à 2014 lors de laquelle il a caché sa réelle identité avant d’être incarcéré en 2010. Cette compagne a évoqué la pratique croissante de la religion chez Réda KRIKET comme raison de leur séparation. Sa première compagne avait évoqué à l’enquêtrice de personnalité le bourrage de crâne religieux et les signalements qu’elle avait pu faire suite à l’expression de son souhait de partir en Syrie. Sa deuxième compagne a évoqué une interdiction de fumer, de se rendre dans les restaurants qui servent de l’alcool et ses demandes de porter le voile. Les membres de la famille de Réda KRIKET se sont, quant à eux, accordés sur le point que ce dernier n’a jamais tenu de propos radicaux.

Réda KRIKET a ensuite été interrogé sur l’enquête de personnalité. Il a confirmé son obsession pour l’argent mais a refusé d’être vu comme un leader charismatique considérant simplement qu’il avait souvent des ‘bons plans’ pour de l’argent rapide. L’avocate générale a demandé alors à Réda KRIKET la raison pour laquelle il a choisi de cacher sa réelle identité à sa deuxième compagne au début de leur relation. Après avoir expliqué plusieurs fois qu’il était alors en cavale, son ton monte et s’impatiente de pouvoir parler d’autres points de fond dont notamment sa relation à la religion. Il ne pourra pas s’exprimer sur ce point puisqu’il est rappelé à l’ordre par le Président.

La Cour a ensuite entendu une deuxième témoin ayant réalisé l’expertise psychiatrique et médico psychologique de trois des accusés. Elle a débuté avec l’expertise d’Abderahmane AMEUROUD expliquant qu’il a une personnalité lisse, n’ayant rien de saillant même s’il se plaint d’un moral assez bas car ses enfants ont été choqués par son arrestation à laquelle ils ont assisté. Il a expliqué connaître Réda KRIKET mais avoir simplement su qu’il était recherché pour vol. Il se défend de la consultation de vidéos de propagande sur YouTube par le fait que tout le monde en regarde.

Puis la témoin est revenue sur l’expertise réalisée sur Yasin ALAMI qui s’est présenté à l’entretien en expliquant être cassé et démoralisé. La témoin a relevé chez lui une faible empathie faisant penser à une personnalité antisociale. Sur les faits, il a expliqué avoir connu Réda en 2013 car il avait besoin d’argent mais s’est dit fier d’être un délinquant de droit commun en opposition aux faits de terrorisme reprochés aux autres accusés. L’expertise a relevé un défaut de concentration probablement lié à une forte consommation de cannabis et a conclu à la nécessité de prononcer une injonction de soin pour s’assurer de son suivi psychologique.

Enfin, la témoin a détaillé l’expertise réalisée sur Sofiane BELOUAFI et a expliqué que pendant son adolescence il a eu une chute de plusieurs mètres le plongeant dans un coma pendant un mois. Le psychiatre n’a constaté cependant aucune maladie mentale ou dépression. Sur les faits, il a raconté que Réda KRIKET est un ami d’enfance et qu’à l’époque des faits il ne l’a vu qu’une seule fois dans une sandwicherie. Il s’est dit en contradiction avec les djihadistes et que ce qu’il a pu dire en garde à vue était dû à sa consommation de cannabis. L’experte a relevé qu’il n’a eu aucun trouble de mémoire sans que cela n’implique une mémoire parfaite.

La dernière témoin entendue par la Cour a réalisé l’enquête de personnalité de Yasin ALAMI. Elle a décrit une famille venant d’un niveau social modeste sans être dans le besoin. Son adolescence s’est déroulée sans accros jusqu’au déménagement de la famille à Bruxelles en 1996 où Yasin ALAMI a développé de ‘mauvaises’ fréquentations et a commencé à consommer des stupéfiants et de l’alcool. Après une scolarité qui s’est arrêtée au collège, des tentatives d’emploi et de formation, l’accusé a été incarcéré entre 2000 et 2005. A sa sortie de prison, il a rencontré un assistant social avec qui il a développé une relation. Sur sa vie sentimentale, il a eu plusieurs relations mais ne s’est jamais considéré en couple. En 2012, il a fait la connaissance de sa femme. Il l’a rencontrée après l’avoir vue dans une vidéo d’un mariage. Pendant un certain temps, ils ont eu une relation par téléphone car celle-ci se trouvait au Maroc. Leur rencontre a eu lieu au Maroc en décembre 2012. Le même mois, ils se sont mariés civilement avec elle.

Le mardi 17 mai 2022 s’est tenue la troisième journée d’audience du procès de l’attentat déjoué, consacrée à l’audition de deux témoins de la DGSI. Ils ont témoigné tous les deux par visioconférence sous anonymat, qui est de droit dans cette situation, ce que rappelle le président de la Cour d’assises.

En début de matinée, le témoin RIO 135149 a présenté les éléments du contexte général de l’évolution de l’idéologie djihadiste jusqu’à 2012. Pour lui, il est nécessaire d’avoir connaissance du contexte général car chaque vague d’attaques est la conséquence d’un contexte international. Après être revenu sur différents attentats, dont ceux du World Trade Center en 1993 et ceux du 11 septembre 2001, le témoin est revenu sur un projet d’attentat du GSPC datant de 1998 dans lequel aurait été impliqué Abderrahmane AMEUROUD. En effet, à l’époque des faits, il avait été arrêté mais relâché par la suite. Il aurait aussi fait partie du groupe des campeurs qui s’adonnait à des entraînements poussés en forêt pour s’aguerrir. Le témoin a évoqué un épisode au cours duquel, lors d’un entraînement, le groupe a dû faire appel à des CRS pour un incident et AMEUROUD aurait décliné une fausse identité. Il lui est aussi reproché d’avoir fréquenté pendant 13 mois le camp de formation et de sélection Al Farouq en Afghanistan, directement contrôlé par Ben Laden, ce que le concerné a contesté.

Le témoin est revenu ensuite sur la période des années 2000 où la mouvance djihadiste française s’est structurée en différents groupes qui ne partent pas forcément sur les zones de conflit. Avec le début des Printemps arabes en 2011 en Tunisie et en Libye, une nouvelle zone de djihad s’est construite avec une réelle volonté de certains de mettre l’accent sur la création d’un État structuré. La trace d’Anis BAHRI est alors retrouvée en Tunisie en juillet 2012, avec d’autres djihadistes tels que Tyler VILUS, afin d’aider à la construction de cet État instaurant la Charia. Le témoin a souligné d’ailleurs la présence de Réda KRIKET en septembre 2012 en Tunisie en même temps que son co-accusé. Sa défense a insisté cependant sur le fait qu’il y était pour un mariage avec sa compagne de l’époque. La situation en Libye est encore plus chaotique avec notamment l’attaque sur le consulat américain le 11 septembre 2012 qui a engendré la mort de l’ambassadeur américain. Le témoin a souligné d’ailleurs trois trajets d’Anis BAHRI en Libye en 2012, 2013 et 2014.

Au sujet d’Anis BAHRI, le témoin de la DGSI a insisté longuement sur sa tentative de rejoindre la Syrie après l’interpellation de Réda KRIKET. En effet, Anis BAHRI avait alors tenté d’organiser son exfiltration en se recommandant de deux éminents membres de la cellule des opérations extérieures de l’État Islamique, dont Boubaker El Hakim. Pour lui, on ne donne pas le nom de garants sans raison. Cela avait voulu dire qu’il y avait une relation de confiance avec le ou les garants qu’il s’était fait en prison ou bien sur zone lors de combats. Pour le témoin c’est le premier djihadiste, se réclamant de deux membres éminents d’une telle façon.

L’après-midi a été consacrée à l’audition du témoin de la DGSI 562 SI qui a été chef de la sous-direction de lutte antiterroriste de la DGSI de 2013 à 2020. Le témoin est tout d’abord revenu sur le contexte général des attentats en France à partir de 2012. Après avoir expliqué l’évolution de la menace terroriste en France à partir des attentats de 2012, il a expliqué que la plupart des terroristes ayant commis ou projeté un attentat en France sont passés par la Syrie pour s’entraîner au maniement des armes. C’est ainsi qu’il a précisé que les enquêteurs ont suspecté qu’Anis BAHRI et Réda KRIKET s’étaient rendus en Syrie ensembles en 2014 puisqu’ils ont été en Turquie à la même période, ce qu’ont contesté les accusés par le biais de leurs conseils.

Puis le témoin est passé à la seconde partie de son intervention et a présenté le contexte général de l’enquête qui a permis de déjouer l’attentat et d’interpeller les accusés présents. Il a expliqué tout d’abord qu’une enquête avait été ouverte suite à une information des autorités turques concernant Tarek BAHRI. Le 6 novembre 2015, les autorités turques sont intervenues sur un hôtel proche de la frontière avec la Syrie qui logeait principalement des gens attendant de se rendre en Syrie et où sont interpellés Tarek BAHRI et FEYA. Ce dernier est expulsé vers la France tandis que Tarek BAHRI est expulsé vers la Tunisie. Le départ de celui-ci pour la Syrie était inconnu de sa famille et se faisait potentiellement sous l’influence de son frère Anis BAHRI. Puis le 11 décembre 2015, a eu lieu une perquisition administrative au domicile de la famille BAHRI qui visait le 3e frère Nizar BAHRI dont les renseignements indiquaient qu’il faisait partie de la mouvance djihadiste. Durant cette perquisition des faux documents d’identité portugais ont été découverts avec la photo d’Anis BAHRI, qui a été entendu sur place librement.

Par la suite les renseignements ont été informés qu’Anis BAHRI et Réda KRIKET seraient des revenants de Syrie. Réda KRIKET a alors fait l’objet d’un mandat d’arrêt et Anis BAHRI a manqué de se présenter à une convocation au commissariat. Une surveillance était donc mise en place sur Anis BAHRI permettant ainsi aux enquêteurs de découvrir l’appartement conspiratif d’Argenteuil. Puis les renseignements belges ont informé les autorités françaises que la moto empruntée par Anis BAHRI pour aller à l’appartement conspiratif, a été utilisée pour rendre visite à Abderrahmane AMEUROUD en Belgique. En mars 2016, l’appartement d’Argenteuil est perquisitionné et est découvert un arsenal d’armes et d’explosifs ainsi que des recherches de location d’appartement dans différentes grandes villes de France. L’avocate générale a relevé que ces villes correspondent aux villes hôtes de l’Euro 2016. Le lendemain Réda KRIKET est interpellé et le 25 mars 2016, Abderrahmane AMEUROUD est arrêté à son domicile en Belgique. Anis BAHRI est alors localisé aux Pays-Bas et il a tenté de rejoindre la Syrie comme expliqué par le premier témoin.

Le mercredi 18 mai 2022 s’est tenue la quatrième journée d’audience du procès de l’attentat déjoué. La matinée a commencé par l’audition du témoin T121SI qui a fait une déposition sous anonymat en visio-conférence. Il a fait d’abord un rappel de la chronologie de l’enquête qui a été menée. Cette dernière ayant conduit à l’arrestation de Réda KRIKET et d’Anis BAHRI avait débuté six mois plus tôt en Turquie. Deux individus de nationalité française, Miloud FEIA et Tarik BAHRI (le frère d’Anis BAHRI) sont arrêtés en 2015 par les services turcs à Adana (Turquie). Aussitôt informés, les enquêteurs de la DGSI ont commencé leurs investigations et ont fait le lien entre Tarik BAHRI et son frère d’Anis BAHRI, soupçonné d’avoir rejoint la Syrie début 2015 avec Réda KRIKET.

L’enquêteur a rappelé que lors de son audition relative à son séjour en Turquie, Miloud FEIA a indiqué avoir visité un local commercial et que Tarik BAHRI aurait fait la même chose de son côté dans la perspective d’ouvrir un commerce (restauration).
Le témoin a évoqué également la relation entre Miloud FEIA et Anis BAHRI. Les deux individus se sont rencontrés en détention et sont restés en contact après leur libération. Aussi, le témoin a souligné qu’Anis BAHRI et Réda KRIKET avaient rejoint la Turquie par des vols avec transits peu commun et que leurs proches avaient indiqué qu’il était possible qu’ils aient rejoint la Syrie. D’un autre côté, le témoin a fait savoir que lors de l’audition des deux neveux de Réda KRIKET, Sanae a parlé de la radicalisation de son oncle. L’avocat de ce dernier a demandé au témoin de confirmer le voyage de Réda KRIKET en Syrie ou au moins confirmer que cette information provient d’un service de renseignent étranger. Le témoin dit ne pas avoir de réponse à cette question. L’avocate de Soufiane BELOUAFI a sollicité des explications sur la découverte tardive (un an après) de l’ADN de son client. Le témoin a mis cela sur le compte de la charge du travail des enquêteurs à cette époque.

À 13h30, un enquêteur est interrogé. Il était chargé de l’opération de sécurisation de l’appartement sur la commune d’Argenteuil. Il a précisé que les opérateurs sur place avaient la certitude qu’il y avait un local avec des explosifs en poudre blanche. Il a expliqué qu’une première fouille avait été réalisée à l’aide d’un chien spécialisé pour détecter les engins pyrotechniques, les explosifs. Il a décrit l’appartement et a dressé une liste des objets qui ont été retrouvés dans l’appartement tels que le matériel de laboratoire pouvant servir à fabriquer des explosifs, un détonateur artisanal, une guirlande de noël, des fioles, des masques… Le Président a fait projeter des photographies de bidons bleus, de sacs, de fils qui pouvaient permettre la fabrication d’explosifs. Le Président lui a demandé s’il fallait avoir des connaissances élaborées pour utiliser les explosifs. Le témoin a répondu que oui et qu’il fallait avoir une formation. Le témoin a indiqué ensuite que des mélanges permettant de faire de gros explosifs avaient été retrouvés. L’avocate générale a ensuite posé une question à l’enquêteur au sujet de l’aspirateur retrouvé dans l’appartement. Il lui est demandé si pour les différentes opérations liées à la fabrication d’engins explosifs, il était nécessaire de travailler dans des lieux propres sans poussière. L’enquêteur a répondu qu’il était important de travailler dans des lieux propres car un composant extérieur modifierait la composition de l’explosion. Les avocats de la défense lui ont ensuite posé des questions, notamment sur les autres éléments présents dans l’appartement tel qu’une machine pour compter les billets.

Une deuxième enquêtrice, membre de la DGSI, est ensuite interrogée par visioconférence, sous anonymat, à 15h00. Elle était chargée du dispositif à Argenteuil. Elle a évoqué tout d’abord les surveillances d’Anis BAHRI et de Réda KRIKET et ensuite l’interpellation de ce dernier le 24 mars 2016. Elle a décrit par ailleurs l’opération qui a eu lieu dans l’appartement à Argenteuil, la sécurisation des lieux et leur arrivée avec Réda KRIKET dans l’appartement qui s’est tourné vers elle et lui a dit « Le chien ne doit pas rentrer dans l’appartement ». Elle a ajouté qu’un démineur lui a indiqué n’avoir jamais vu ça en termes d’explosifs et de matériaux pour en fabriquer. Elle a décrit les pièces et les objets qui se trouvaient dans ces pièces. Elle a évoqué un coffre qui contenait des fioles, de l’explosifs industriels mais aussi du nombre d’armes retrouvées (cinq kalachnikovs, d’autres armes à feu, sept armes de poing, de nombreuses munitions). L’enquêtrice a présenté les traces ADN des accusés, retrouvées dans l’appartement et sur des objets. Le Président l’a interrogé sur l’attitude de Réda KRIKET qui était à l’aise au départ et a commencé à se crisper après lorsqu’il a été conduit devant l’immeuble à Argenteuil. L’enquêtrice a indiqué qu’en plus du fait qu’il ait été crispé, il a été aussi coopératif notamment lors de l’ouverture de la porte. L’avocate générale l’interroge sur les vêtements retrouvés, sur le coffre qui ne pouvait s’ouvrir tout seul et sur le nombre de guirlandes retrouvées. Elle a répondu que ces guirlandes, beaucoup utilisées en Syrie, permettent notamment de déclencher des explosifs. Les avocats de la défense ont demandé à l’enquêtrice combien il y avait exactement de cartouches. Ils lui ont indiqué ensuite que les membres de la DGSI disent tous la même chose derrière un écran. La défense a ensuite demandé à l’enquêtrice pourquoi il n’avait pas été fait de co-saisine avec un service judiciaire de droit commun car un compteur de billet et un brouilleur d’ondes ont été également retrouvés supposant qu’il s’agirait plutôt d’activités concernant les domaines de grand banditisme que ceux du terrorisme. L’enquêtrice a répondu que les matériaux retrouvés tueraient beaucoup de personnes et qu’il s’agissait ici d’une montée meurtrière maximale pour que ce ne soit pas du terrorisme. Un avocat de la défense a ajouté qu’en plus des bijoux ont été retrouvés des bombes lacrymogènes. Il a rappelé à l’enquêtrice que des agents de sécurité de banques ont déjà été neutralisés par des bombes lacrymogènes.

Le jeudi 19 mai 2022, un enquêteur belge a témoigné anonymement. Il a affirmé, dans un premier temps, s’agissant de Reda KRIKET que l’enquête a démontré son implication dans des groupes terroristes et qu’il a financé le groupe ZERKANI. De plus, l’enquêteur a précisé que Reda KRIKET s’est rendu au domicile de M. ZERKANI et a eu des contacts téléphoniques avec ce dernier. Il a ajouté que Reda KRIKET a été condamné pour association de malfaiteurs terroriste pour avoir mis un véhicule à disposition de M. ZERKANI. Quant à Abderrahmane AMEUROUD, l’enquêteur a indiqué que de nombreuses photos et des vidéos de propagande ont été retrouvées lors des perquisitions. Ensuite, il a souligné qu’Yasin ALAMI est soupçonné d’avoir un lien avec un certain M. MEDHI qui est soupçonné d’avoir envoyé des personnes en Syrie et en Irak. Selon lui, Yasin ALAMI a eu des contacts avec Reda KRIKET, Abderrahmane AMEUROUD et M. ZERKANI. Enfin, l’enquêteur a mentionné les 18 contacts entre M. ALAMI et M. ZERKANI en 2013 ainsi qu’avec M. KRIKET.

Le vendredi 20 mai 2022, un témoin a été auditionné anonymement sur les perquisitions réalisées chez M. BAHRI à la suite de son interpellation en Turquie. Il a précisé que M. BAHRI, lors d’une audition libre portant sur son frère Tarek, a indiqué vouloir rejoindre la Syrie.
Un second témoin a ensuite été interrogé de manière anonyme sur la garde à vue de Reda KRIKET. Il a expliqué que lors de sa garde à vue, Réda KRIKET a dit avoir fait connaissance d’un certain « ABOUBAK » afin de stocker des armes avec son cousin en louant un appartement sous une fausse identité. Le témoin a indiqué que M. BAHRI fréquentait l’appartement et que M. ABOUBAK et son cousin y ont déposé des armes et de quoi confectionner des explosifs. Lors du sixième interrogatoire devant le juge d’instruction, l’enquêteur a indiqué que M. KRIKET reconnaît qu’ABOUBAK n’existait pas et qu’il a acheté une partie des armes et le détonateur pour les billes pour faire un gros braquage. Reda KRIKET n’a pas évoqué lors de cet interrogatoire, d’après l’enquêteur, que les billes auraient servi à la pratique de l’airsoft. Le Président a affirmé que cette position était incohérente avec la suivante, à savoir qu’il pratiquait l’airsoft avec ces billes. Ensuite, le passé judiciaire de M. KRIKET et de M. BAHRI ont été détaillés lors de l’audience. Le Président a précisé que Reda KRIKET a été condamné pour des infractions de droit commun avant la condamnation terroriste en lien avec la filière ZERKANI. Quant à M. BAHRI, il n’a jamais été condamné pour des faits terroristes. Il était précisé que M. BAHRI travaillait et suivait actuellement une formation au quartier de prise en charge de la radicalisation.

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