Mourad Farès, recruteur de djihadistes, a été condamné à vingt-deux ans de prison

Interpellé en 2014 après un long séjour en Syrie, le Haut-Savoyard de 35 ans était jugé par la cour d’assises spéciale de Paris pour avoir dirigé un groupe terroriste.

Les mains agrippées au pupitre du box des accusés, Mourad Farès a encaissé le verdict sans sourciller. A l’issue de cinq jours d’audience et de trois heures de délibéré, la cour d’assises spéciale de Paris a condamné, vendredi 24 janvier, l’homme de 35 ans à vingt-deux ans de réclusion pour « participation à une association de malfaiteurs terroriste », « direction ou organisation d’une association de malfaiteurs terroriste » et « financement d’une entreprise terroriste ».
La peine prononcée est alignée sur les réquisitions du parquet, qui avait demandé à la cour de l’assortir d’une période de sûreté des deux tiers. Issu d’une fratrie d’origine marocaine de Thonon-les-Bains (Haute-Savoie), Mourad Farès était accusé d’avoir incité et aidé des candidats au djihad à rallier la Syrie – où il a lui-même séjourné de juillet 2013 à août 2014 –, et d’y avoir dirigé un groupe de combattants francophones.
Après s’être radicalisé à l’automne 2012, notamment en consultant des vidéos complotistes réalisées par Omar Diaby, un prédicateur d’origine sénégalaise, il a organisé plusieurs réunions, de janvier à juin 2013, afin de préparer un départ groupé pour faire la hijra (l’émigration en terre musulmane) en Syrie.

Une fois arrivé sur place, il a un temps servi dans les rangs de l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL, devenu organisation Etat islamique, EI, en 2014), avant d’incorporer finalement le groupe d’Omar Diaby, affilié à Jabhat Al-Nosra, une branche locale d’Al-Qaida.

Contacte la DGSI afin de « collaborer »
Bras droit puis remplaçant de son « mentor », avec lequel il a fini par se brouiller, Mourad Farès s’est enfui en Turquie, d’où il a contacté la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) afin de « collaborer ». Et ce alors qu’un mandat d’arrêt international le visait, et que sa tête était « mise à prix » par l’EIIL.
Devant les magistrats, le trentenaire a pris un air contrit, regrettant notamment d’avoir tenté d’inciter son frère cadet à le rejoindre en Syrie « pour faire le djihad cinq étoiles contre Bachar Al-Assad ». « Cela montre à quel point j’étais sous l’emprise de cette idéologie, a insisté Mourad Farès. C’est fou. Omar Diaby était comme un gourou. On est persuadé d’être dans le vrai, comme dans une secte, quand on est coupé du monde. Avec le recul, j’ai l’impression d’être dans un cauchemar. »
En détention depuis septembre 2014, il a admis avoir « facilité » le passage en Syrie de plusieurs francophones, à qui il a fait des recommandations – départs par petits groupes, réservations de vols aller-retour. Peu enclin à évoquer son homosexualité devant la cour, il n’a pas reconnu avoir combattu ni avoir été le suppléant d’Omar Diaby à la tête de son groupe, réduisant son rôle à un registre purement « logistique ».

Publié par Rémi Dupré, pour Le Monde, le 25 janvier 2020.

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