D’anciens salariés demandent un supplément d’information après l’explosion de la Saica Pack, révélée par Le Figaro.
« Que se serait-il passé le 13 décembre dernier si, sous la dalle en béton de l’entreprise Saica Pack, il y avait eu plusieurs tonnes d’ammonitrates à la place d’un stock de carton qui a étouffé l’explosion ? », demande Me Laurent de Caunes, avocat de la veuve et du fils d’André Mauzac, cadre d’AZF, tué dans l’explosion de l’usine de Toulouse en 2011.
Mardi, Le Figaro a révélé que, le 13 décembre dernier, une explosion avait partiellement détruit une usine de carton ondulé située à quelques centaines de mètres de l’ancien site AZF. Des bâtonnets de nitrocellulose, un composant de la poudre à canon, ont été retrouvés par les enquêteurs ; ils proviendraient du sous-sol de ce terrain longtemps occupé par l’ancienne poudrerie nationale, et pourraient, selon certains, avoir été le « détonnateur » de l’explosion de l’usine AZF en 2001.
« Continuer à chercher »
À la barre de la Cour d’appel de Toulouse, Me Laurent de Caunes est déterminé. La voix est posée. « L’explosion de la Saica Pack renforce l’exigence de nouvelles interrogations. Il faut donc continuer à chercher et se poser loyalement et complètement toutes les questions. Nous demandons à la cour, comme nous l’avons fait en première instance, de ne pas refermer le dossier », insiste l’avocat.
Plus tôt, en début d’après-midi, Jean-Luc Forget avait également évoqué l’explosion de la Saica Pack. Le défenseur des membres de Mémoire et solidarité, association d’anciens salariés, a demandé « un supplément d’information ». Car pour l’avocat, il y a encore des faits « troublants », « beaucoup de questions qui restent sans réponses ». Me Forget estime ainsi qu’il « serait intéressant de savoir d’où provenaient ces petites capsules de nitrocellulose dans l’entreprise Saica Pack ? Cela peut nous intéresser. Cela peut intéresser la vérité. Est-ce que ces petites capsules auraient pu se trouver dans le hangar 221 ? Puisque nous sommes à la recherche de l’allumette ou du détonateur, alors cherchons ! Mes clients doivent être respectés dans leur quête de vérité. Dans leur démarche. Ils ont besoin de savoir. »
Total se dit « troublé »
La défense de Total et de l’ancien directeur de l’usine, Serge Biechlin, se dit également « troublée » par cet événement récent, passé jusqu’alors inaperçu et révélé par Le Figaro. Daniel Soulez-Larivière, qui plaidera avec les avocats de la défense les 13, 14 et 15 mars, fait « un rapprochement évident avec l’explosion du hangar 221 d’AZF dont les causes restent inconnues à ce jour ». L’avocat explique que « l’explosion spontanée de 2011 aurait été provoquée par la nitrocellulose, explosif d’avant-guerre, décomposé avec le temps, et enfoui dans le sol. Le fait qu’elle se soit produite à 1200 mètres du site 221 d’AZF soulève une nouvelle hypothèse, celle d’une explosion causée par la décomposition d’un explosif présent dans le sous-sol de l’ancienne poudrerie, qui couvrait toute la zone en cause. »
« Tartarinade ! »
Le bâtonnier Thierry Carrère, qui représente l’association des Sinistrés du 21 septembre, ne partage pas l’analyse : « C’est une tartarinade ! Cela fait dix ans que des experts travaillent sur le sujet et ils sont parvenus à des certitudes. Ce n’est pas la peine d’aller chercher ailleurs. Je n’ai pas les moindres doutes sur les causes du sinistre et les responsabilités. »
Stella Bisseuil, avocate de l’association Familles endeuillées, souligne que « faire le lien entre l’explosion à la Saica Pack et la catastrophe de l’usine AZF dix ans plus tôt, c’est - purement et simplement - une interprétation ! Ces deux événements n’ont rien à voir. Le hangar 221 était une petite bombe en attente. »
Les plaidoiries des parties civiles se poursuivent vendredi. Elles reprendront lundi 5 mars et s’achèveront mercredi. Ensuite, vendredi, ce sera l’heure du réquisitoire. Le réquisitoire de Pierre Bernard et Lionel Chassan devrait durer toute la journée.
LeFigaro - Jean Wilfried FORQUES - 2 mars 2012