Une victime avait dénoncé l’insalubrité de l’immeuble

Héléna Fokuo et son ami sont morts dans l’incendie de leur appartement dimanche, à Saint-Denis. La locataire et la ville avaient signalé le danger de cet immeuble vétuste du centre-ville.

Héléna Fokuo venait d’avoir 46 ans. Dimanche, elle est décédée avec son compagnon dans l’incendie de son appartement insalubre situé au 39, rue Gabriel-Péri, un immeuble frappé depuis 2008 par un arrêté de péril imminent. Un drame atroce, pour lequel une enquête pour homicide et blessures involontaires a été ouverte, et qui repose la question de la lutte contre l’habitat indigne dans cette ville où, en dix ans, trente personnes ont péri dans des sinistres liés à l’insalubrité des logements.

Hier, Stéphane Peu, l’adjoint au maire chargé du logement (PC), a dénoncé la législation qui, selon lui, protège encore trop les propriétaires défaillants. Cet immeuble, situé en centre-ville, était en effet connu pour son état très dégradé. Héléna Fokuo, la victime, elle-même, avait dénoncé auprès de la municipalité les pressions exercées par son propriétaire qui louait à prix exorbitant, jusqu’à 40 € le m2, des appartements vétustes, sans eau ni électricité.

« A la suite de sa visite, nous avions adressé en décembre 2011 au procureur de la République un signalement à l’encontre des copropriétaires pour perception indue de loyers et risques face aux installations électriques dangereuses », relate Stéphane Peu. Début mars, le parquet a saisi la cellule habitat indigne de l’Utile 93 (Unité de traitement des infractions à la législation sur les étrangers), qui a ouvert une enquête, toujours en cours. Un des copropriétaires est d’ailleurs convoqué demain pour s’expliquer sur ces faits. De leur côté, les élus de Saint-Denis réclament, au lendemain de ce drame, une modification en profondeur des législations en vigueur et un appareil répressif plus fort. « Manuel Valls présente aujourd’hui à Saint-Ouen les zones de sécurité prioritaire (ZSP). Nous voulons qu’elles prennent en compte la lutte contre le business des marchands de sommeil », exige Stéphane Peu.

Paradoxe, cet immeuble de 20 logements devait bénéficier, comme 230 logements insalubres de Saint-Denis, du programme national de requalification des quartiers anciens dégradés, qui permet d’obtenir des financements exceptionnels (70 M€ alloués par l’Etat, la ville et l’agglomération) pour éradiquer l’habitat indigne. Mais, en dépit des efforts de la municipalité, le dossier peinait à avancer. « Depuis l’arrêté de péril imminent de 2008, nous avons multiplié les injonctions auprès des 11 propriétaires, en vain, précise encore Stéphane Peu. Ils ont récemment voté des travaux, mais nous savions qu’ils ne les feraient pas car l’immeuble est sous le mandat d’un administrateur judiciaire, il n’y a plus de syndic et une ardoise de 150000 €. Le problème, c’est que les procédures sont longues. En Seine-Saint-Denis, par exemple, il faut deux ans pour mener à bien une expropriation ! Il faut changer les lois pour permettre aux pouvoirs publics et aux municipalités d’agir plus vite. Ce sont des vies qui sont en jeu. » La mairie a décidé de porter plainte contre les copropriétaires de l’immeuble où a lieu ce drame.

Nathalie PERRIER, LeParisien.fr - 11 septembre 2012


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