Aiguilleurs du ciel : la DGAC évoque un système « officieux »

L’institution a remis jeudi un rapport après les révélations du « Figaro » sur l’organisation du contrôle aérien.

Un soutien mais pas de démenti clair. La Direction générale de l’aviation civile (DGAC) a remis jeudi son rapport sur l’absentéisme des contrôleurs aériens à Dominique Bussereau, secrétaire d’État aux Transports. Ce dernier l’avait exigé mercredi matin après les révélations du Figaro sur l’existence d’un système d’autogestion de l’effectif dans les tours de contrôle, baptisé « clairance ».

La DGAC planchait en fait sur le sujet depuis le 31 juillet et l’envoi d’un référé de la Cour des comptes à Jean-Louis Borloo, ministre de l’Écologie, qui chapeaute les Transports, et à Dominique Bussereau. Ce rapport rappelle tout d’abord que « le ciel français est l’un des plus sûrs et que le transport aérien reste un moyen de transport sécurisé ». Il reconnaît cependant l’existence des clairances. Selon les informations du Figaro, ce terme qui est à l’origine une autorisation de décoller ou d’atterrir est peu à peu devenu l’autorisation de rester chez soi. Les contrôleurs aériens ont mis sur pied un système de vacances illégales qui les conduit à assurer parfois le trafic aérien en sous-effectif. Le rapport de la DGAC reconnaît qu’en « période de faible trafic, le chef d’équipe peut être amené à octroyer une autorisation d’absence à certains contrôleurs », un système « baptisé clairance ». Le rapport indique également qu’en « l’absence de système de pointage systématique des présences, il est difficile de contrôler effectivement le phénomène ». « L’ampleur du phénomène est difficile à mesurer puisqu’il est officieux », conclut la DGAC.

Omerta sur le sujet

Selon nos informations, le référé de la Cour des comptes devrait être transmis à l’Assemblée nationale la semaine pro­chaine. « La DGAC répond à côté, explique une source gouvernementale. La Cour des comptes a découvert un véritable système d’autogestion. Toute la question est maintenant d’en estimer le coût. » L’Usac-CGT, premier syndicat chez les contrôleurs aériens, qui n’a toujours pas clairement démenti l’existence des clai­rances, a rappelé hier dans un communiqué que « l’effectif ne peut être disponible en permanence puisqu’une partie est en congé, en formation, ou occupée à des tâches d’études ou d’encadrement ». Selon le syndicat, ces absences ne dépasseraient jamais 20 à 25 % de l’effectif. Les contrôleurs aériens travaillent 32 heures par semaine avec 25 % de temps de récupération soit 24 heures à leur poste de travail. Selon les informations du Figaro, ce nombre d’heures n’est pas assuré dans beaucoup de cas.

« Personne n’ose y mettre les pieds »

Une véritable omerta règne sur le sujet. « Si on se penche sur ce type de sujet, on risque une grève et une paralysie du ciel », explique-t-on dans l’entourage de Dominique Bussereau. « Ce système est ancien et archiconnu, explique un ancien cadre de la DGAC. Nous avons eu un incident à Nice il y a trois ans. Un avion s’était détourné vers l’aéroport pour des raisons de sécurité. Deux contrôleurs étaient de vacation cette nuit-là : l’un était rentré chez lui et l’autre s’était endormi. L’avion a tourné longtemps avant de pouvoir atterrir. » De son côté, la direction d’Air France se refuse officiellement à tout commentaire. « Ce sujet est régulièrement évoqué au plus haut niveau de la compagnie, explique un cadre sous couvert d’anonymat. Mais personne n’ose y mettre les pieds. »

Des pilotes d’Air France confirment à mots couverts l’absentéisme dans les tours de contrôle. « Les aiguilleurs du ciel ont sur leur écran de contrôle, le numéro de vol et le nom de son commandant de bord, explique l’un d’eux. On ne peut pas prendre le risque de représailles. »

Des cadres de la compagnie évoquent également l’impact économique des clairances. La capacité maximale de contrôle aérien de Roissy a en effet été fixée à 600 000 vols par an, contre 1,2 million à Atlanta qui dispose du même nombre de pistes (quatre). Roissy a accueilli 55 400 avions en 2008. « Mais lors de certaines périodes de pointe, la compagnie a été handicapée par ce seuil ces dernières années, explique un cadre. Depuis le début de la crise, le sujet est en revanche moins prioritaire. »

Source : Le Figaro, le 25/09/09.


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