Ouverture du procès en appel des surirradiés d’Epinal

En première instance, deux anciens médecins et un radiophysicien ont été condamnés à 18 mois de prison ferme pour leur responsabilité dans le plus grave accident de radiothérapie de France, qui a fait 450 victimes, dont 12 mortelles.

Le procès en appel des surirradiations à l’hôpital d’Epinal, le plus grave accident de radiothérapie recensé en France avec près de 450 victimes, s’ouvre mercredi après-midi à Paris. Deux anciens médecins de l’hôpital et le radiophysicien, condamnés à 18 mois de prison ferme en première instance en janvier 2013 pour homicides et blessures involontaires, comparaîtront jusqu’au 12 décembre, à raison de trois après-midi par semaine.

Entre 2001 et 2006, ce sont près de 450 patients traités pour des cancers de la prostate qui avaient été victimes de surdoses de radiation lors de deux dysfonctionnements distincts. Douze en sont morts et les autres souffrent de graves séquelles du système urinaire et anal. Joshua Anah, radiophysicien, avait été condamné à trois ans de prison dont 18 mois ferme et 10 000 euros d’amende pour homicides et blessures involontaires et soustraction de preuve. Le tribunal avait par ailleurs prononcé à son encontre une interdiction professionnelle de cinq ans.

Deux médecins radiothérapeutes, Jean-François Sztermer et Michel Aubertel, avaient eux été condamnés à quatre ans de prison dont 18 mois ferme et 20 000 euros d’amende chacun pour homicides et blessures involontaires, ainsi que non-assistance à personne en danger. Ils ont été interdits définitivement d’exercer.

Quatre autres prévenus poursuivis en première instance pour non-assistance à personne en danger avaient été relaxés : l’ex-directrice de la Ddass des Vosges, l’ancien directeur de l’agence régionale d’hospitalisation de Lorraine, la directrice de l’hôpital et l’établissement lui-même comme personne morale.

Ils ne sont pas concernés par ce nouveau procès, le parquet n’ayant pas fait appel de ces relaxes. Il avait par contre formé un « appel incident » à ceux des trois condamnés, ce qui permet éventuellement d’alourdir leurs peines.

Environ 70 parties civiles sont attendues pour le premier jour de ce procès qui sera retransmis en direct et en totalité dans une salle du tribunal d’Epinal.

« Pas de traitement »

Philippe Stäbler, président de l’Association des victimes, qui regroupe 212 membres, se dit « fin prêt pour la bagarre ». Il « n’attend rien des prévenus », car, dit-il, « on n’a rien eu de leur part en première instance, à part une compassion de façade, alors je ne vois pas pourquoi ça changerait en appel ».

« Les condamnations en première instance nous ont globalement satisfaits. J’espère qu’elles seront au moins confirmées, s’ils écopent de plus, tant mieux. Je suis confiant ». Mais il souligne aussi que « le temps passe et (...) certains sont fatigués. Les santés de tout un chacun se dégradent. Plusieurs voulaient venir à Paris pour ce deuxième procès, beaucoup ne pourront pas ».

Outre ces problèmes physiques, Jean-Claude Larcier, 67 ans, surirradié, souligne que « pour les victimes, c’est toujours une épreuve de témoigner. Ce qui est le plus difficile, c’est d’entendre les prévenus dire qu’ils passent leurs "journées à sauver des vies" ». Lui aussi en est persuadé : « les médecins ne reconnaîtront jamais ».

« L’indemnisation des préjudices corporels a été longue, mais aujourd’hui, tous les dossiers ont été traités. En revanche, en ce qui concerne le préjudice moral et le préjudice d’anxiété, l’action est toujours en cours et beaucoup plus compliquée », nuance-t-il. Et « il n’y a pas de traitement pour les conséquences de nos surirradiations ».

Seule consolation pour Jean-Claude Larcier, « notre accident a considérablement amélioré les procédures de sécurité en radiothérapie ». Car même s’il ne garantirait pas « que ça ne pourrait pas se reproduire (...) la bonne nouvelle, c’est que depuis les accidents d’Epinal, le nombre de radiophysiciens a quasiment doublé, en passant de 300 à plus de 500 ».

AFP - le 12.11.2014


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