Vol Rio-Paris : nouvelle plainte contre l’Etat

Nouvelle offensive dans l’affaire du vol Rio-Paris d’Air France. Les familles des victimes allemandes vont déposer, dans les prochains jours, une plainte contre X visant l’Etat français auprès de la juge d’instruction Sylvie Zimmerman, en charge de l’enquête sur l’accident qui a fait 228 morts le 1er juillet 2009.

Dénoncer. Leur avocat, Ulrich von Jeinsen, reproche à Paris d’avoir transposé de manière incomplète une directive de Bruxelles datant de 2003, qui impose de stocker puis de transmettre aux autorités européennes les incidents aériens. En raison de ce « manquement », il est possible que « l’Etat français n’ait pas eu connaissance de 30 incidents similaires », impliquant les sondes de mesure de vitesse, survenus avant le drame. Le givrage de ces sondes est considéré par le Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA) et par les experts judiciaires comme un élément contributif - le seul avéré à ce jour - du crash.

La directive ayant été largement transposée, il s’agit surtout de dénoncer sa mauvaise application par la Direction générale de l’avion civile (DGAC). Celle-ci avait certes alerté, en septembre 2008, son homologue européenne, l’AESA, suite à un grave problème de sondes survenu sur un vol d’Air Caraïbes, et alors que les mêmes défaillances apparaissaient chez Air France. Mais la DGAC n’a mentionné que huit cas, alors qu’une trentaine ont été recensées à la suite du crash. « On sait que tous les incidents n’ont pas été transmis », indique Me Jean-Pierre Bellecave, correspondant en France de l’avocat allemand.

Du côté des familles de victimes françaises, on s’interroge sur l’utilité de cette nouvelle plainte. En effet, l’Etat n’est pas responsable sur le plan pénal - seuls ses représentants le sont. De plus, la juge d’instruction peut enquêter sur toutes les causes de l’accident. Une simple demande d’acte aurait suffi à mettre la magistrate sur cette piste. « On n’a pas besoin de cette plainte pour faire avancer le dossier », indique Alain Jakubowicz, l’un des avocats de l’association Entraide et solidarité AF447. « C’est un coup médiatique des familles allemandes, qui sont très remontées », ajoute hors micro un proche des familles françaises.

Insuffisance. Sur le fond du dossier, il y a toutefois consensus des deux côtés du Rhin. Pour Alain Jakubowicz, l’un des points clés du dossier, « complètement passé sous silence par les experts judiciaires », est bien l’insuffisance du « retour d’expérience ».Ce dispositif très réglementé, censé assurer la sécurité, grâce à l’analyse des problèmes techniques. Avec, à la clé, une question que la justice devra trancher : une meilleure gestion des incidents de sondes aurait-elle pu éviter le crash ?

Yann PHILPPIN / Libération / 7 août 2010


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