Les boîtes noires élucident 90% des crashs d’avions

Alors que les boîtes boires de l’AF447 Rio-Paris viennent d’être retrouvées, lefigaro.fr revient sur quelques-unes des affaires où ces appareils ont permis de percer le mystère.

Obligatoires dans les avions depuis le début des années 60, les boîtes noires se sont révélé les alliées indispensables des enquêteurs lors des crashs aériens. « Lorsqu’un appareil est perdu corps et biens, à moins de trouver la pièce qui a cassé, la seule façon de découvrir ce qui s’est passé est d’analyser les boîtes noires », souligne Robert Galan, expert en aéronautique (1). « Dans 90% des cas, les enregistreurs de vol révèlent la cause de l’accident. On a dans l’histoire de l’aviation des dizaines et des dizaines d’exemples ».

Robert Galan se souvient notamment de deux accidents survenus en 1994 dans lesquels l’enregistreur des données de vol et l’enregistreur de conversations dans le cockpit ont donné le scénario. Le 23 mars, un appareil de la compagnie russe Aeroflot reliant Moscou à Hong-Kong chute en pleine taïga sibérienne, tuant les 75 passagers et membres d’équipage à bord. Pendant quinze jours toutes les pistes - terroriste, avarie technique, collision avec un oiseau - sont considérées jusqu’au moment où le CVR (Cockpit Voice Recorder) livre ses secrets. Sur la bande, les enquêteurs entendent une voix d’enfant demandant « puis-je tourner le gouvernail ? ».

Crash du vol 593 d’Aeroflot : un enfant aux commandes
Ils découvrent que le pilote a fait pénétrer dans le cockpit sa fille de 11 ans et son fils de 16 ans et leur a laissé les commandes. Lorsqu’arrive le tour du garçon, il désactive sans s’en rendre compte, en exerçant une trop grande pression sur le manche, le pilote automatique des ailerons. L’avion plonge pendant quatre longues minutes. Malgré les efforts du pilote et du co-pilote qui parviennent à reprendre le contrôle de l’appareil, l’Airbus, qui vole à très basse attitude, s’écrase.

Un mois plus tard, le 26 avril, le vol 140 de la China Airlines, parti de Tapei, sombre alors qu’il entame sa phase d’approche autour de l’aéroport de Nagoya. L’appareil reprend de l’attitude avant de chuter. Le DFDR (Digital flight Data Recorder) montre une contradiction entre la gouverne de profondeur et le plan horizontal. Le pilote avait par erreur actionné la remise des gaz en pilote automatique et poursuivi son plan de descente.

Des précisions sur le crash de l’avion présidentiel polonais
Plus récemment, les boîtes noires ont permis, de nombreuses fois, de préciser les circonstances de drames. Le CVR du vol United 93, un des quatre avions détournés par al-Qaida, le 11 septembre 2001, qui s’est écrasé dans un champ de Pennsylvanie, confirmera l’hypothèse d’une lutte entre les passagers et les kamikazes. Sur l’enregistrement, un des djihadistes mentionne une bagarre, puis l’enregistreur capte des voix hurlant « dans le cockpit » suivi de la prière d’un des terroristes s’en remettant à dieu. En février 2009, un appareil de Continental Airlines s’écrase suite à une erreur de pilotage sur une maison dans la banlieue de Buffalo (Etat de New York). A l’écoute du CVR, les enquêteurs réalisent que le pilote et son copilote se sont montrés très distraits, échangeant des propos « non liés à leur travail » alors que l’avion était à moins de 3.000 mètres. Ce qui est interdit.

De même, les enregistreurs du Tupolev de Lech Kaczynski, le président polonais tué en avril 2010 dans le crash de son avion de fonction, révèlent la présence dans le cockpit aux côtés des pilotes du chef de l’armée de l’air. Dès lors, certains se sont demandé si le haut gradé n’avait pas forcé les pilotes à tenter un atterrissage, en dépit des mises en gardes des contrôleurs aériens. Cependant, les boites noires ne suffisent pas à percer tous les mystères. Lors de la disparition d’un appareil d’Egyptair dans l’Atlantique au large des Etats-Unis, en 1999, on entend le copilote dire « je m’en remets à dieu ». Les enquêteurs américains ont évoqué un suicide du pilote et un accident provoqué délibérément mais n’ont pu le prouver.

Reste à savoir si les boîtes noires de l’AF 447, retrouvés début mai, livreront autant de secrets. « De mémoire, je dirai que c’est la première fois qu’on les retrouve immergées aussi profondément dans l’océan où elles ont subi une énorme pression, et aussi longtemps (deux ans, ndlr) », estime Robert Galan. Si elles ont résisté au choc de l’impact, il faut encore vérifier, en les ouvrant, qu’elles n’ont pas été attaquées par la corrosion.

Publié par Par Constance Jamet le 03/05/2011 - LeFigaro.fr


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