Carlos ne plaide ni coupable, ni innocent de l’attentat de la rue Marbeuf

Au cours d’une défense particulièrement alambiquée, Ilich Ramirez Sanchez, alias Carlos, a refusé lundi devant la cour d’assises spéciale de Paris de se déclarer "innocent ou coupable" de l’attentat de la rue Marbeuf qui a fait à Paris un mort et 66 blessés le 22 avril 1982.

Jeudi, lorsque la cour a examiné l’attaque terroriste commise le 29 mars 1982 contre le train Le Capitole (5 morts et 28 blessés), l’accusé avait déjà adopté cette stratégie de défense, mais de manière moins affirmée.

Lundi, à force d’acharnement, Me Francis Szpiner, qui défend plusieurs parties civiles, est parvenu à le pousser dans ses derniers retranchements.
"Vous dites que vous n’êtes pas impliqué (dans l’attentat de la rue Marbeuf) ?" l’interroge Me Szpiner.

"J’ai pas dit ça ! Pourquoi je vous ferais ce plaisir ?!" s’énerve Carlos.
Face au magma des déclarations de Carlos, le président Olivier Leurent finit par lui dire : "Dites-vous que vous n’avez rien à voir" dans cette affaire ?
"Je n’ai jamais dit que je n’avais rien à voir et je ne le dirai jamais", persiste Carlos, qui n’a "rien à répondre à cette question". En d’autres termes, persiste-t-il, "je refuse de me déclarer innocent ou coupable. Vous m’accusez sans preuve".
"Je n’ai pas à nier, ni à confirmer", avait déclaré quelques minutes plus tôt le Vénézuélien, accusant le ministère public d’avoir "bidonné, falsifié" le dossier.

"C’est facile de dire : +C’est pas moi+. Mais c’est pas la question. (...) Je veux profiter (de ce procès) pour disséquer ce dossier bidon qui est la honte de la justice antiterroriste française", avait-il encore promis.

Avant que la cour ne se retire, Me Francis Vuillemin endosse l’habit du pompier après les tirades incendiaires de son client.

"Ce sont des propos provocateurs, mais c’est le personnage", plaide-t-il. En fait, décrypte-t-il, "ce qu’il a voulu dire c’est que c’est à l’accusation de faire une démonstration crédible avec des preuves sérieuses."

Depuis le début de son procès le 7 novembre, Carlos multiplie les attaques contre la justice française et notamment contre l’instruction menée par l’ancien juge d’instruction Jean-Louis Bruguière, qu’il traite régulièrement de "cocaïnomane" ou de "petit indic du FBI".

Sûr de lui, l’accusé refuse de s’abaisser à répondre aux questions des magistrats, notamment des avocats généraux qui selon lui ne sont pas "du niveau d’un procès de cette envergure".

Un accusé, a-t-il résumé lundi, n’a que trois lignes de défense à son procès. Dire aux juges : "Un : je suis innocent. Deux : je suis coupable. Trois : je vous emmerde". Or depuis le début de son procès, il a clairement fait savoir qu’il rejetait les deux premières options.

Le 22 avril 1982 à 09H02, une bombe avait explosé devant le 33 rue Marbeuf, à deux pas des Champs-Elysées, qui abritait au 3e étage le siège du journal Al Watan Al Arabi ("La Nation arabe"), connu pour ses positions pro-irakiennes et son opposition au régime syrien.
"On a mis mon nom partout", s’est plaint Carlos lundi, mais a-t-il accusé, ce sont les Syriens, qui étaient alors "en conflit ouvert et public avec l’Irak" qui ont attaqué le journal.

Dans ce dossier, "il n’y a rien qui mène" vers l’Organisation des révolutionnaires internationalistes, s’est-il défendu, tout en réfutant avoir orchestré l’attentat afin d’obtenir la libération de ses frères d’armes Magdalena Kopp et Bruno Bréguet, alors incarcérés en France.
Leur procès débutait justement ce 22 avril 1982 à 09H00 au Palais de Justice de Paris. Réplique de Carlos : "Ah bon, le 22, il y avait un procès ?"

Dorothée MOISAN - AFP - 15 novembre 2011


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