Une chaîne de manquements à l’origine des sur-irradiations de Toulouse

Deux rapports sur la surexposition aux radiations de 145 patients à Toulouse en 2006 et 2007, publiés mardi, mettent en cause le CHU de Toulouse tout en considérant que l’accident n’est pas responsable des 18 décès survenus, des conclusions qui confortent les irradiés dans leur colère.

L’accident, qui s’est produit à l’hôpital de Toulouse-Rangueil, est imputable à une "erreur d’étalonnage" intervenue "lors de la mise en service de laccélérateur", et "la sur-irradiation ne peut être mise en cause pour les 18 décès survenus jusqu’ici", constate l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) dans son expertise sur les conséquences de l’erreur.

Mais l’Inspection générale des Affaires sociales (Igas) et l’Autorité de Sûreté nucléaire (ASN), revenant à la demande du ministère de la Santé sur les causes de l’accident, notent dans leur propre rapport une série de manquements de la part de l’hôpital.

Pour eux, lors de la mise en place de son nouveau centre de radiochirurgie stéréotaxique, et "bien que des observations lui aient été faites à ce sujet, le CHU n’a jamais voulu rééquilibrer l’organisation de son centre en prenant mieux en compte les besoins de la radiothérapie et de la radiophysique, qui sont restés les maillons faibles du projet".

"Aucun radiothérapeute n’est intervenu formellement au cours de la procédure de marché public (...) pour choisir un équipement faisant appel aux rayonnements ionisants", soulignent-ils. Par ailleurs, "les compétences et les effectifs en radiophysique médicale étaient insuffisants et avaient été sous-estimés par le CHU".

D’autre part, au moment de l’installation, "les équipes les plus avancées (...) n’ont pas été suffisamment consultées", poursuivent l’Igas et l’ASN en concluant qu’en raison de cette chaîne de faiblesses, "les contrôles mis en oeuvre ne permettaient pas de détecter l’anomalie".

La ministre de la Santé Roselyne Bachelot note dans une interview parue mardi dans Le Parisien qu’il y a eu "des dysfonctionnements dans l’organisation de l’hôpital qui ont sans doute malheureusement contribué à créer les conditions de l’accident".

Le directeur général du CHU de Toulouse, Jean-Jacques Romatet, a reconnu la responsabilité de son établissement. "Quand on est hospitalier et qu’on a le souci de soigner, un accident comme celui-là est pour nous une catastrophe. On peut employer les mots les plus terribles, les plus épouvantables, pour nous c’est un échec", a-t-il déclaré devant la presse.

L’hôpital de Toulouse utilisait un appareil de la société Brainlab, destiné à irradier les tumeurs cérébrales profondément situées.

En ce qui concerne les conséquences sanitaires, l’IRSN affirme que parmi les 18 décès, 16 ont été consécutifs à "l’évolution classique de pathologies au pronostic généralement défavorable (...), et 2 des suites de pathologies non liées au système nerveux central".

Selon l’IRSN, "l’entière connaissance de l’impact sanitaire de cet accident ne pourra être appréhendée que d’ici 2011-2012". En effet, si "environ un tiers de la cohorte traitée pour des pathologies bénignes (...) présente ou pourrait présenter des complications neurologiques secondaires (...) certaines de ces complications sont toutefois réversibles".

A Toulouse, l’association SOS Irradiés 31 a exprimé sa "colère envers le CHU et le fabricant de l’appareil".

Son avocat, Me Christophe Lèguevaques, a déclaré à l’AFP que "depuis le début on savait que le CHU était fautif puisqu’il y avait eu une série de manquements et la plus évidente étant une erreur de calibrage".

Le Depêche, le 26 février 2008.


Nous soutenir

C’est grâce à votre soutien que nous pouvons vous accompagner dans l’ensemble de vos démarches, faire évoluer la prise en charge des victimes par une mobilisation collective, et poursuivre nos actions de défense des droits des victimes de catastrophes et d’attentats.

Soutenir la FENVAC

Ils financent notre action au service des victimes